Candy, une infirmière sur le front
Par Nanou

 

 


3 - Le pique-nique


Le dimanche suivant, Candy avait été invitée par Annie à un pique-nique. Archibald les avait rejoints près du lac Michigan.

- Candy, je suis heureux que tu aies pu te libérer, cela faisait un bout de temps qu'on ne s'était pas vu !
- Oui et Annie m'a annoncé la bonne nouvelle, je te félicite Archibald !
- Merci Candy, tu as été la première au courant. Nous avons envoyé un télégramme à Albert qui ne devrait pas tarder à rentrer. Nous avons aussi une surprise pour toi !
- Une surprise ?
- Oui, regarde !
- Patty !!

En effet, Patty s'était déplacée pour voir ses meilleurs amis. Candy ne l'avait plus vu depuis l'enterrement d'Alistaire. Elles se sont écrit plusieurs fois mais comme elles étaient souvent submergées de travail, aucune des deux n'avait pu se voir.

- Oh Patty, comme ça me fait plaisir de te voir, ça faisait si longtemps !

Les deux amies se jetèrent dans les bras l'une de l'autre.

- Candy, tu n'as pas changé !
- Mais toi non plus Patty ! Tu as toujours autant de travail ?
- Oh oui Candy, nous avons envoyé des milliers de colis vers la France et les locaux ne désemplissent pas. C'est incroyable comme les gens sont généreux, je n'arrive pas à en croire mes yeux ! Nous avons nos réseaux pour que les colis arrivent à destination, car sinon ils seraient confisqués par les Allemands en chemin. Les infirmières nous aident beaucoup aussi !
- Bien sûr, et tu peux compter sur moi si tu as besoin de quoi que ce soit !
- Je le sais bien Candy. Tu as toujours été là pour moi.

Candy et Patty n'avaient pas besoin de parler pour se comprendre. Elles étaient généreuses et prêtes à tout pour sauver des vies.

- Dites les filles, je commence à avoir faim moi !
- Archibald, espèce de glouton, tu pourrais attendre quand même ! Tu auras tout le temps de manger quand tu épouseras Annie !

Tout le monde éclata de rire. Qu'es ce qu'on est bien ensemble, se disait Candy, à manger, à parler de tout et de rien. Dans combien de temps aurais-je des moments comme ceux-là ?

Ses amis se rendirent compte que quelque chose n'allait pas.

- Candy, qu'y a-t-il ? s'écria Annie
- Oui, tu as l'air tout bouleversé ! rajouta Patty
- Dis nous quelque chose, demanda Archibald

Candy se leva aussitôt.

- Je ne peux plus vous cacher cela plus longtemps. J'ai pris une décision il y a quelques temps mais je ne savais pas comment vous l'annoncer…voilà, j'ai décidé de partir pour la France.

- Quoi ?!! s'écrièrent Patty et Archibald

- Oh non Candy, murmura Annie

- J'y ai bien réfléchi vous savez…

Annie se mit à pleurer.

- Je t'en prie Annie. J'ai besoin de votre soutien à tous. Ne rendez pas mon départ difficile !

Candy essayait de contenir sa peine tant bien que mal.

- Candy, pourquoi avoir pris une telle décision ? demanda Archibald
- Archibald, sache que je ne pars pas sur un coup de tête, j'ai pesé le pour et le 
contre et je ne pouvais pas là alors que des millions de gens meurent chaque jour 
en France !
- Candy…murmura le jeune homme
- Candy, je respecte ton choix mais la pensée de te voir partir pour le front m'est
insupportable. J'ai déjà perdu Alistaire et je ne veux pas perdre aussi ma meilleure
amie !
- Candy, je t'en prie, ne pars pas !!Et si je ne te revoyais pas ? cria Annie
- Annie, arrête !! Je t'interdis de penser une telle chose !! hurla Archibald

La violence du ton d'Archibald surprit tout le monde mais chacun savait qu'il avait raison. La douleur de voir partir son amie la plus chère était pénible pour Annie. Patty essayait de la consoler. Tout le monde était bouleversé. Candy ne reviendrait pas sur sa décision, c'est sûr. Il ne restait plus qu'à accepter l'horrible situation. Chacun essayait plus ou moins de retenir ses larmes.

- Candy, promets moi d'être prudente, de ne pas jouer les casse-cou ! implora Archibald
- Oui Archibald je te le promets….

Annie ne pouvait rien dire, la voix brisée par l'émotion. Les trois amis serrèrent Candy dans leurs bras. Ils restèrent ainsi un long moment, comme s'ils voulaient profiter de sa présence.

- Quand pars-tu Candy ? Nous voudrions être là pour ton départ…lui demanda Annie
- Non Annie, je ne préfère pas, ce serait encore plus difficile de partir.
- Elle a raison Annie, on ne lui serait d'aucun soutien…expliqua Archibald
- Je suis désolée d'avoir gâché cette journée ! dit Candy
- Ne t'en fais pas pour ça Candy, l'essentiel est que nous soyons avec toi ! la rassura Patty

Patty serra Candy dans ses bras.

- Les blessés auront de la chance de t'avoir ! lui murmura Patty
- Merci de me réconforter Patty …



Allongée dans son lit, Candy n'arrivait pas à s'endormir. Elle avait passé une journée assez difficile. A présent, elle était soulagée d'avoir parlé. Le plus dur avait été de voir ses mais tristes, les yeux pleins de larmes.

Annie et Archibald n'auraient jamais pensé qu'une telle chose arriverait. Certes, l'Europe connaît une grave crise et les morts se comptent par milliers mais Candy, leur Candy partir si loin, exposée aux tirs des soldats…Annie en eut froid dans le dos. Elle voulait protéger Candy de tous les dangers mais là elle ne pouvait rien faire. A chaque instant, Candy avait été là pour elle mais elle, elle ne serait pas là pour Candy et cette seule pensée était douloureuse pour Annie.

Archibald non plus n'arrivait pas à trouver le sommeil. Il avait perdu son frère à la guerre et la plaie n'était pas encore cicatrisée. Et maintenant, c'est Candy qui allait partir en France… Il avait toujours eu beaucoup d'affection pour elle et il ne se faisait pas à l'idée de son départ.

Patty quant à elle, pensait à Alistaire. " Les guerres sont vraiment cruelles. Elles arrachent les êtres que l'on aime. Je ne veux pas qu'il arrive quelque chose à Candy. Et si j'allais aussi en Europe ? Je pourrais m'occuper de l'acheminement des colis de provisions de la Croix Rouge ? Peut-être…J'aimerais voir l'ampleur des dégâts sur place. Je serais à même de voir les besoins des uns et des autres. Il est vrai que la distance fausse les quantités réelles nécessaires pour la survie des gens. Il faut que je réfléchisse…Pour le moment, c'est Candy qui part. Je prierais pour qu'il ne t'arrive rien Candy.

Cette dernière se demandait comment elle annoncerait la nouvelle à Albert. " Annie, Archibald et Patty ont plus ou moins bien réagi violemment. Que va dire Albert ? Va-t-il me soutenir dans ma décision ? J'ai hâte qu'il rentre ! "

Cette nuit-là, quatre personnes n'arrivèrent pas à trouver le sommeil.

Ch 4 : La confrontation



Albert était de retour le lendemain. Dès les premières heures, il fut assailli par une foule de collaborateurs, si bien que Candy ne put le voir qu'en fin de matinée.

- Candy, quelle agréable surprise !
- Bonjour Albert, vous avez fait un bon voyage ?
- J'ai connu mieux mais que me vaut l'honneur de ta visite ?
- Eh bien, j'ai quelque chose de très important à vous dire…
- Oh, ça a l'air plutôt grave ? Que se passe t-il Candy ?
- Ce que je vais vous dire ne va sûrement pas vous faire plaisir Albert, mais je veux vous le dire.

Albert voyait bien qu'à son ton elle ne plaisantait pas.

- Très bien Candy, je t'écoute. Tu ne veux pas t'asseoir ?
- Non, je préfère rester debout. Albert…j'ai décidé de partir en France.

Albert était assis à son bureau et se leva d'un bond à la nouvelle.

- Candy, as-tu bien réfléchi ? Enfin, c'est une décision grave ! Hum, je vois à ton regard que c'est oui…Comme nous sommes à des milliers de kilomètres de l'Europe, je n'avais pas réellement pris conscience de l'ampleur de l'évènement mais après mon voyage, je peux te dire Candy que le spectacle est désolant. Les trains peuvent à peine circuler et je ne parle pas des morts près des voies ferrées. Les villes dans le Nord de la France sont méconnaissables, la plupart ont été détruites par les bombes et les femmes et les enfants qui y restent se terrent pour éviter l'ennemi. Je ne veux pas te décourager Candy mais….

Il n'osa pas finir sa phrase mais Candy comprit qu'il était triste.

- Albert, je comprends que vous soyez inquiet, ça ne va pas être gai tous les jours et je serais en danger en permanence dans ces abris qui servent d'hôpitaux, mais je ne peux pas fermer le yeux sur ce qui se passe en Europe ! Il est possible que les Etats-Unis y soient mêlés un jour. Alors là, d'autres infirmières seront obligés de partir. Vous comprenez pourquoi je ne peux pas rester les bras croisés, à me demander si la prochaine sera moi ?!

Albert baissa la tête.

- Alors je ne peux que me résigner à te laisser partir Candy…
- Oh Albert…

Candy ne put s'empêcher de verser une larme. Albert, lui, faisait un effort surhumain pour ne pas pleurer. Il la serra contre lui comme quelqu'un de désespéré qui se raccroche à un être cher. Il posa ses mains sur les épaules de la jeune femme.

- Candy, promets-moi de bien faire attention à toi.
- Je vous le promets Albert.
- Connais-tu la date de ton départ ?
- Toutes les infirmières seront convoquées jeudi prochain et le départ se fera sûrement le lendemain ou le surlendemain.
- J'aimerais assister à ton départ Candy.
- J'ai déjà refusé qu'Annie et Archibald viennent.
- J'insiste Candy.
- Très bien Albert, c'est comme vous voulez.

Candy quitta un Albert bouleversé mais qui ne voulait rien extérioriser, surtout devant elle. Il devait lui donner du courage et non pas la démoraliser davantage. Une fois qu'elle fut partie, il frappa des poings sur la table.

- Pourquoi faut-il que cette guerre ait lieu ?! Oh Candy, j'espère que tout se passera bien….

Albert écrasa une larme au coin de l'œil. Il avait tellement d'affection pour Candy que son départ le rendait à la fois triste et amer. S'il l'avait adoptée, c'est parce qu'elle avait les mêmes yeux que sa sœur bien-aimée, morte trop jeune, qui avait laissé un grand vide dans son cœur. Candy avait su lui faire oublier sa tristesse mais maintenant elle partait pour la France et mettrait sûrement sa vie en danger pour sauver des gens.

- Candy….si tu as fait un tel choix, c'est parce que tu as décidé un jour de te dévouer pour ceux qui souffrent, les personnes démunies. J'ai mal de te voir partir mais je sais que tu reviendras, je suis sûr que tu reviendras…

Sur le chemin du retour, Candy avait les idées plutôt confuses. D'un côté, elle comprenait que ses amis ne soient pas enchantés à l'idée de la voir partir, mais de l'autre, elle leur en voulait un peu de ne pas la soutenir plus que cela.

Elle devait encore prévenir Sœur Maria et Melle Pony, en espérant qu'elles seraient plus compréhensives. Elle alla voir ses deux bienfaitrices qui furent peinées de la voir partir mais ne laissèrent rien paraître. La séparation fut difficile mais comme toujours les deux femmes lui donnèrent maints et maints conseils et multiplièrent les prières pour qu'elle revienne saine et sauve.

Le plus dur fut de faire comprendre à Capucin qu'elle ne pouvait pas l'emmener. Elle essaya de l'enfermer dans sa chambre mais rien n'y fait. Il s'échappa par la fenêtre et lui courut après.

- Capucin ! Je t'en prie mon petit, ne me suis pas, essaye de comprendre…

Elle le prit dans ses bras et pleura. Finalement, le raton laveur la laissa partir en couinant. Elle déposa quelques friandises dans son panier.

Pour Mina, la chienne, se fut moins compliqué. Elle lui sauta dessus plusieurs fois en la léchant et pensa que la jeune femme viendra la voir bientôt. Pourtant, Melle Pony lui écrira que le jour de son départ, la chienne avait hurlé à la lune toute la nuit !

Les enfants pleurèrent quand ils apprirent la nouvelle mais Candy les rassura et leur promit de revenir et qu'elle s'amuserait avec eux lors de sa prochaine visite. Elle dut faire un effort pour ne pas pleurer et fit le pitre pour qu'ils gardent une image heureuse d'elle.

Maintenant, elle se sentait soulagée d'avoir parlé de ses intentions. Il ne lui restait plus qu'à se préparer mentalement pour affronter l'horreur de la guerre. Mais est ce qu'on peut vraiment se préparer à une guerre ?



Ch 5 : Le départ



En quelques jours, tous le membres de ma famille André étaient au courant du départ de Candy. Tante Elroy n'avait aucune envie de la voir et Eliza et sa mère jubilaient. C'était un moyen pour elle de ne plus voir et de ne plus entendre parler de cette " peste de Candy ". Il faut dire qu'Albert ne tarissait pas d'éloges à son sujet devant la famille, ce qui avait le don d'agacer les Legrand…sauf Niel. 

En effet, ce dernier était toujours aussi amoureux de Candy. Comme l'Oncle William avait refusé de lui accorder sa main, il avait essayé de l'oublier mais en vain. La nouvelle du départ de Candy pour la France lui fit l'effet d'un coup de poignard. Sa mère et sa sœur étaient désespérées de le voir s'attacher à " la pensionnaire de Pony ". Elles avaient essayé tant bien que mal de lui faire oublier Candy mais il n'y avait rien à faire. Ni les voyages, ni les prétendantes potentielles n'y parvenaient. Il alla voir Albert, car il savait pertinemment que Candy refuserait de lui parler. Il voulait que ce dernier la dissuade de partir mais c'était peine perdue. 

Finalement le jour J arriva.

A Sainte Joanna, le Dr Leonard reçut Candy dans son bureau. Pendant la réunion qui précédait, Candy lui avait fait part de son intention de partir pour la France. Elle et d'autres collègues volontaires reçurent des cours de français intensifs. En quelques jours, ils étaient tous capable de tenir une conversation.

- Candy, vous savez qu'une infirmière au front n'a pas une minute de répit. Il n'est pas question ici de vous décourager mais je voudrais juste que vous preniez conscience de ce qui vous attendra là-bas. De plus, les Allemands ont commencé à utiliser des gaz asphyxiants. Les effets sont dévastateurs. N'oubliez pas de vous protéger et de protéger les blessés.
- Ne vous inquiétez pas Docteur, je ferais tout ce qui m'a été conseillé ici. Les cours intensifs n'étaient pas de trop.
- Je ne remets pas en cause vos qualités Candy. Je suis sûre que vous ferez en sorte que les médecins et les autres infirmières dépêchés sur place soient satisfaits de vous. Je vous souhaite beaucoup de courage et de ténacité.
- Merci Docteur, j'en aurais bien besoin. La renommée de notre hôpital ne va pas souffrir à cause de moi car je compte bien faire tout mon possible pour soigner et protéger ces pauvres soldats.
- J'aime vous voir parler ainsi Candy !

Après son entretien avec le Docteur Leonard, Candy rentra chez elle. Le départ était pour le dimanche suivant. Elle avait prévenu toutes les personnes qu'elle connaissait. " Mes amis, je ne sais pas quand nous nous reverrons mais quelque chose me dit que ce sera plus vite que je ne le crois ! "

Elle eut une pensée pour Terry. " Si nos destins avaient pu s'unir, tu ne m'aurais sûrement pas laissé partir et peut-être que j'aurais beaucoup hésité à le faire…Maintenant, rien ne me retient vraiment. Mon destin est tout tracé. "

Le lendemain, il y avait une séance de photographies à l'hôpital. En effet, un journal très connu souhaitait faire un article sur les volontaires civils, en particulier le personnel des hôpitaux. Le Docteur Leonard qui trouvait cela de mauvais goût se laissa convaincre que c'était pour rendre hommage au courage du personnel médical envoyé au front. Candy n'était pas la seule à partir. Il y avait quelques médecins auxiliaires et des aides-soignants volontaires.

Le jour du départ était là. Nous étions à la fin de l'été et Candy partait l'après-midi. Après les " au revoir " au personnel de l'hôpital et les embrassades avec Albert et Archibald, qui avait quand même tenu à venir à l'insu d'Annie, Candy prit la route de la gare. Archibald lui avait caché qu'Annie avait un peu de fièvre le matin, car il ne voulait pas qu'elle s'inquiète.

Brinqueballée dans la calèche, elle se posait beaucoup de questions sur ce qu'elle allait voir en France. " Peut-être que Flanny sera là et le docteur Franck aussi, ce jeune médecin qui avait été invité chez les Legrand à Chicago et qui l'avait aidé à se sortir d'un piège tendue par Niel et Eliza.

Elle se donnait du courage car elle ne pouvait pas se permettre de montrer sa peine à tous ces soldats qui se retrouvaient coupés de leur famille et qui risquaient de mourir à tout moment.

Il y a quelques heures de voyage entre Chicago et New York en train. C'est là qu'elle devait prendre le bateau en partance pour la France. La dernière fois qu'elle avait fait le trajet vers New York, c'était sur l'invitation de Terry, pour la première de " Roméo et Juliette ". Terry….Décidément, tout la ramenait à lui.


Ch 6 : Brève rencontre



Au même moment, à New York, la troupe Strasford où jouait Terry était en répétition pour la pièce " Hamlet " de Shakespeare. Bien sûr, Terry avait le rôle principal. Sa popularité allait en grandissant. C'était la star du moment. Partout, il y avait des articles élogieux sur lui, si bien qu'il ne pouvait pas se promener dans la rue sans un déguisement. Pendant une pause, l'un des membres de sa troupe lisait le journal et faisait des commentaires.

- Eh les gars, vous avez vu ? On va encore envoyer du personnel médical pour le front en France !
- Décidément, cette guerre ne finira jamais ! Combien de temps encore avant que les Etats-Unis s'en mêlent ? grogna un autre.
- Il y a des médecins, des aides-soignants et des infirmières. Tiens, il y en a une qui a l'air plutôt jolie !
- Montre moi…mouais, s'il n'y avait pas toutes ces tâches de rousseur !

A ces mots, Terry qui était à l'écart de la bande, sursauta. Il s'approcha des autres acteurs.

- Donne moi ce journal !

Et il arracha le journal des mains de son collègue.

- Mais pour qui il se prend celui-là ?
- Terry ne changera jamais, toujours aussi grossier !

Terry courut jusqu'au toit du théâtre. " Mon Dieu, pourvu que ce ne soit pas elle ! "

Une fois arrivé, il déplia le journal et constata avec stupeur que c'était bien Candy.
" Non, ce n'est pas possible ! Candy, pourquoi ?! Volontaire ! Elle part demain! Elle embarquera à bord d'un paquebot à New York, je pourrais donc la voir ! Et peut-être l'empêcher de partir ! Albert doit être aussi retourné que moi. Est-ce que je réussirais à la convaincre ? "

D'un côté, il comprenait qu'elle ne puisse rester insensible à ce qui se passe en France, il y pensait souvent lui-même. Mais elle serait en danger à chaque minute et cette idée lui était insupportable.

" Candy…demain je te reverrais…après tous ces mois…. "

Terry se demanda comment allait se passer leur rencontre, lequel des deux aller parler le premier ? Cette nuit-là, il ne ferma pas l'œil, il était heureux de pouvoir revoir Candy mais en même temps, il redoutait ce qu'elle allait lui dire, surtout si ce n'est pas ce qu'il espérait…

Le lendemain, à l'aube, le train de Candy qui avait pris du retard au départ, arriva enfin à New York, après avoir stationné pendant plusieurs heures en gare de Chicago. Elle n'avait pas beaucoup dormi et appréhendait ce qui l'attendait en France. Il faisait quand même frais sur le port en cette fin d'été. Malgré l'heure, il y avait beaucoup de monde sur le quai, des touristes pour la plupart, des gens venus souhaiter un bon voyage à des membres de leur famille. Ce qui était bien, c'est que Candy et les autres pouvait se fondre dans la foule. Ils n'avaient pas leurs uniformes de travail et étaient difficilement repérables. Cela leur évitait des commentaires de gens qui auraient eu de la pitié pour eux ou les auraient soutenus, les larmes aux yeux. Cela aurait été pénible.

Soudain, une silhouette se détacha de la foule. La brume de l'aube ne permettait pas de distinguer la personne mais au fur et à mesure qu'elle se rapprochait de Candy, elle devenait familière.

- Bonjour Candy…

Le cœur de Candy fit un bond. C'était Terry, emmitouflé jusqu'aux yeux (il avait enlevé son déguisement pour la saluer) qui se tenait devant elle.

- Terry….c'est toi, je ne rêve pas ?
- Non, c'est bien moi. Candy, je suis heureux de te revoir…
- Moi aussi Terry…

Les mots s'étranglaient dans sa gorge. Elle était émue de le voir après tout ce temps, elle essayait de contenir ses larmes. Il lui fit signe de le rejoindre un peu à l'abri des regards.

- Candy, je sais pourquoi tu es ici. J'ai vu l'article dans le journal et j'aimerais te parler à ce sujet.
- Terry, je…
- Candy, as-tu bien réfléchi ? Est-ce que tu veux vraiment partir si loin, dans un pays à feu et à sang, où tu peux risquer de mourir à chaque instant ?! Je ne comprends pas comment tu peux partir comme ça…
- Terry, je t'en prie, j'ai pris ma décision, elle n'a pas été facile tu sais mais j'ai fait ce que m'a dicté mon cœur.

Terry la regarda d'un air désespéré.

- Candy, je sais que je n'ai pas le droit de te demander cela mais je voudrais que tu restes…
- Terry…
- Je t'en prie Candy, je ne voudrais pas qu'il t'arrive quelque chose.
- Ne t'inquiète pas Terry, je ferais attention. Ce ne sont pas quelques obus qui vont me faire peur, tu me connais !

Candy essayait de plaisanter, malgré sa tristesse.

- Candy, je ne plaisante pas, tu sais. J'aimerais que tu restes…

Le regard de Terry s'assombrit. Il s'approcha encore plus près d'elle, si bien que Candy pouvait sentir son souffle. Il lui prit la main et la serra.

- Terry, arrête, tu rends mon départ plus difficile !
- Justement Candy, tu ne peux pas partir comme ça…si j'ai accepté de vivre loin de toi, ce n'est pas pour te perdre à jamais !
- Terry, ne dis pas ça… 

Cette fois-ci, les larmes coulaient sur les joues de Candy et Terry n'était pas loin de pleurer lui aussi. Il ressortait tout ce qui était enfoui au plus profond de son cœur, il ne cachait plus ses sentiments à celle qu'il aime et qu'il aimera toujours.

Il la prit dans ses bras et l'embrassa. Candy était merveilleusement bien dans ses bras. La dernière fois qu'il l'avait embrassé, c'était il y a une éternité, au collège Royal de Saint-Paul. A l'époque, ses sentiments pour lui étaient confus mais maintenant c'était différent. Elle avait essayé de l'oublier mais elle n'y était pas arrivée. Elle l'aimait toujours. Et dire que ce bonheur lui avait été volé par une autre ! Terry n'était plus à elle, elle en avait conscience mais tous les deux s'aimaient encore. Le moment où elle quitta les bras de Terry fut douloureux mais elle ne pouvait revenir en arrière. Elle se ressaisit.

- Terry…je ne peux pas rester. Il faut que j'y aille, essaie de comprendre…

Candy vit la douleur qui voilait le visage de Terry. Il tenait encore la main de Candy puis la lâcha.

- Très bien Candy, je vois que je ne pourrais pas te faire changer d'avis mais promets moi de faire attention, de bien prendre soin de toi. Ecris moi si tu le peux.
- Je te le promets Terry…

Il reprit sa main comme s'il voulait encore la retenir.

- Je t'aime Candy…ne l'oublie pas…

Candy n'eut pas la force de lui répondre alors que son cœur brûlait d'envie de le faire. Elle prit le chemin de la passerelle sans se retourner, de peur de croiser le regard de Terry et de ne plus avoir envie de partir.

Terry la regarda monter dans le bateau qui la mènerait droit vers les cris, la souffrance, le sang, les armes à feu…

- Je n'ai rien pu faire pour te retenir mais je prierai pour qu'il ne t'arrive rien mon amour…

Une larme s'échappa malgré lui du coin de l'œil et s'écrasa par terre. 

" Pourvu que cette guerre se termine très vite, Candy reviens moi ! "


Fin chapitres 3 à 6

© Nanou 2006