Suite
par Miss Capucine

Note de l'auteur :

Voici une nouvelle suite de l’histoire de Candy Neige André, elle se situe tout de suite après la fin du volume 9 du manga.


Chapitre 1 : une fin d’après-midi à la maison de Pony.

Mr Albert était reparti à Lakewood et la soirée s’annonçait agréable pour les résidants de la maison de Pony.
Annie faisait découvrir à Archi les lieux et souvenirs de sa toute petite enfance. Tout en racontant, elle se rendit compte à quel point elle se sentait bien, comme soulagée d’un poids qu’elle ne parvenait pas à identifier auparavant. Archi, qui l’écoutait avec ravissement fut attendri par l’émotion que la jeune fille dégageait. Pour la première fois depuis la disparition de son frère, son cœur se sentit léger et il remercia Annie de ce doux moment par un baiser sur sa main délicate.
Pendant ce temps, Patty et Candy discutaient tranquillement devant leurs tasses de thé chaud.
- Les quelques jours qui viennent de s’écouler ont été très éprouvants pour moi, je me sens épuisée, dit Candy.
-Comme je te comprends (dit Patty, tout en étant étonnée que Candy livre ses sentiments, elle qui gardait tout, au fond d’elle-même, tout le temps, afin de se consacrer aux autres) mais voici l’été qui arrive et la colline de Pony qui refleurit, t’aidera à te ressourcer.
- Oh, Patty, et toi, comment te sens-tu ? Comment était ton séjour chez ta grand-mère ?
- Et bien, cela m’a changé les idées, elle ne m’a pas laissé un moment de libre, j’étais toujours occupée et le soir je m’endormais, les yeux posés sur les pantins qu’Alistair a fabriqué lorsqu’il était en Europe. Parfois, je relis notre correspondance et j’ai le sentiment qu’il vit encore mais…
Elle s’arrêta de parler car sa voix commençait à trembler et ses yeux à se brouiller.
- Patty, reprit Candy, ne te tourmente pas comme ça, moi, quand je pense à Alistair, j’imagine qu’il est là-haut, dans le ciel et qu’il est heureux d’y être parce que c’est ce qu’il a toujours voulu, voler.
- Tu as raison… Je parle de moi, mais toi, Candy, comment vis-tu ta situation avec Terry ?
- Les souvenirs de New York sont encore très douloureux pour moi, le temps guérira cela…
Si nous allions aider mademoiselle Pony et sœur Maria à préparer le repas de ce soir.
-Oui, Candy, crois-tu que je pourrais rester ici quelques temps ? J’aimerais beaucoup aider sœur Maria à faire la classe.
- Et bien, allons demander, qu’en dis-tu ? Mais, je ne sais pas si Huly sera acceptée elle aussi, le règlement est stricte ici, comme au collège royal de Saint-Paul…
Candy sourit d’un air taquin et Patty comprit que son amie plaisantait.
Mademoiselle Pony et sœur Maria acceptèrent d’accueillir Patty avec bonheur et la soirée se déroula dans la gaité et l’amusement que procurait Huly, la petite tortue de Patricia, aux enfants du foyer de Pony.



Chapitre 2 : réflexions…

La lumière de la lune éclairait la colline et Candy qui était assise sur une branche de son arbre, sombra dans ses pensés. Elle se demandait ce qu’il faisait à ce moment précis, l’homme qui avait éveillé en elle cette petite flamme. Cette étincelle que de nombreuses personnes malveillantes avaient tenté d’étouffer. Car, quelque chose brulait encore au fond d’elle, quelque chose dont elle n’arrivait pas à se débarrasser.
Une attirance invisible, le désir irrésistible de se retrouver auprès d’une personne afin d’être comblée d’une manière inexplicable…  
Oh, Terry, c’est comme si j’avais pu atteindre ton cœur ce soir-là dans ce petit théâtre de Rockstown. Ta mère a même dit qu’elle pensait que tu avais compris qui tu aimais véritablement.
Est-ce moi que tu aimes Terry ?
Je suis sûre que c’est moi, je le sais. Pourquoi n’avons-nous pas le droit au bonheur ? Pourquoi le destin s’acharne-t-il sur nous ?

Au même instant, à Broadway, Terry se préparait à aller sur scène, c’était la première d’Hamlet. Son état d’esprit n’était pas le même qu’à la dernière première, celle de Roméo et Juliette, il était plus serein. En effet, il avait travaillé sur lui-même pour se débarrasser de l’emprise de l’alcool, ce qui ne fût pas facile. Mais son amour du théâtre avait repris le dessus. Il avait décidé de tout recommencer à zéro. Il avait trouvé sa muse et rien qu’en pensant à elle, il trouvait une énergie incroyable sur scène et arrivait à installer un dialogue invisible avec son public. Toute la magie de son talent se trouvait là. Il se leva et se dit en lui-même : maintenant Candy, je vais jouer pour toi !


Chapitre 3 : arrivée à Chicago.

Dans la grande demeure familiale des André, à Chicago, régnait une atmosphère de renouveau. En effet, la présentation de William Albert André s’était faite non seulement dans la stupéfaction générale mais avait aussi révélé la forte personnalité d’Albert. Le soir des fiançailles de Candy et Daniel était pour lui le moment idéal pour exprimer quelques changements. Tout d’abord, il installait son autorité à toute la famille présente ainsi qu’à la toute la haute société invitée pour l’occasion. Ensuite, de part sa décision de laisser sa fille adoptive choisir son futur époux, il instaurait une vision moderne du mariage qui chamboulait toutes les coutumes oppressantes pour les jeunes gens de cette époque. Lui-même avait fui les convenances et son esprit rebelle (qui lui venait de sa mère) s’était affirmé très tôt. Il put ainsi présenter cet aspect de sa personnalité et montrer dans son discours que même dans le monde des affaires, il saurait faire entendre sa voix. Son allure, sa jeunesse et son charisme firent très bonne impression auprès des jeunes femmes mais laissèrent quelques froncements de sourcils s’exprimer sur les fronts des messieurs.
Tante Elroy était en colère de s’être fait détrôner en public et la famille Legrand, encore sous le choc, était partie dans leur propriété de Floride.
Albert arriva à Chicago dans la matinée et déclara au personnel de la grande demeure qu’il y séjournerait plusieurs jours. Il demanda qu’on informe la grande tante de sa présence et qu’il s’entretiendrait avec elle au déjeuner.  


   
Chapitre 4 : entretien familial.

L’accueil de la grande Tante Elroy fut glacial mais Albert savait à quel tempérament il avait affaire et usa de psychologie.
- Je tiens à vous remercier ma Tante pour tout ce que vous avez fait pour la famille jusqu’à aujourd’hui, commença Albert. Votre travail a été considérable et je suis venu vous soulager de toute cette gestion.
Il est temps pour vous de prendre du repos et de profiter.
- De profiter de quoi ? Penses-tu que je veuille profiter de quoi que ce soit ? J’étais très bien comme ça, à m’occuper des affaires de la famille.  As-tu pensé à me demander mon avis avant d’apparaître en public et de m’humilier ainsi ! répondit-elle sèchement.
- Ma tante, vous m’avez mis, vous-même, dans une situation d’urgence en voulant unir ma fille adoptive avec Daniel. Et ceci, en parlant à ma place, sans me demander mon avis à moi aussi !
En voulez-vous à ce point à Candy d’être devenue une André, pour la considérer si peu ?
-Ah… On en vient à parler de ta petite orpheline protégée qui nous a toujours apporté des ennuis, si tu savais mon pauvre Albert à qui tu avais affaire !
- Que voulez-vous dire par là, ma tante ? Connaissez-vous Candy mieux que je ne le pense ?
- Je…Je dis seulement que depuis qu’elle est entrée dans la famille, elle n’a apporté que du malheur ! dit la grande Tante d’un air troublé.
- Et bien, moi, je la vois autrement et je sais que si elle n’avait pas pris soin de moi pendant mon amnésie, je ne serais peut-être pas là devant vous.
La grande tante Elroy, qui avait un sens élevé de la famille, baissa les yeux à ce moment là et reconnut dans son fort intérieur qu’Albert disait la vérité sur ce sujet.
- Nous en resterons là pour aujourd’hui si tu le veux bien mon neveu, je me sens lasse.
Je vais te donner les clés du bureau et convier Georges à venir te rejoindre pour travailler. Il faudra aussi que nous discutions « affaires » la prochaine fois au lieu de nous perdre dans des propos secondaires.
- Très bien, mais sache, ma tante, que mes priorités touchent au bonheur de ma famille et qu’elles ne sont en rien celles des affaires ! A plus tard.

La tante Elroy était contrariée et découvrait la pugnacité de son neveu. Par ailleurs, elle s’en voulait de s’être laissée emporter au sujet de Candy et craignait qu’Albert ne soupçonne quelque chose car elle avait, l’espace d’un instant, perdu le contrôle d’elle-même.
Albert alla se promener à cheval dans la propriété et repensait à ces paroles égarées qui raisonnaient encore dans sa tête : « Si tu savais, mon pauvre Albert, à qui tu avais affaire ! »
Pourquoi la tante Elroy avait-elle toujours repoussé Candy, sans jamais vouloir mieux la connaître ?
Pourquoi cette rancœur, au point de vouloir la rendre malheureuse en la contraignant dans ce mariage avec Daniel ?


Chapitre 5 : vocations.

Ce matin là, Patty s’était levée très tôt afin de préparer une surprise aux enfants. Elle avait préparé de quoi construire une cage pour Huly, elle avait gardé, dès la veille, des restes d’épluchures de légumes, mis de côté des livres sur les tortues et préparé feuilles, pinceaux et peintures.
Sœur Maria entra la première dans la salle de classe et fût enthousiasmée par cette idée. Bientôt,  les enfants arrivèrent et furent accueillis par Huly, elle-même, se promenant sur l’une des tables des élèves.
Patty avait ainsi fait entrer dans la classe une sorte de nouvelle pédagogie pratique où les enfants devenaient acteurs de leurs apprentissages !
Sœur Maria comprit ce jour-là, le métier que Patty devait faire et elle s’empressa de lui en parler. La jeune fille se rendit compte que sa destinée professionnelle se dessinait sous ses yeux, elle en fût toute émue et partie de suite en parler à ses amis.
Lorsqu’elle entra dans la grande salle à manger, Candy, Annie et Archi étaient en train de discuter, elle leur annonça la nouvelle et se fût plein d’éclats de joie et de félicitations qui envahirent les lieux jusque là si calmes.
Candy raconta à son tour comment elle s’était rendu compte qu’elle aimait soigner les gens et leur redonner le moral pour qu’ils se sentent mieux. Mais elle ne préféra pas trop parler de ses études d’infirmière à l’hôpital Saint-Joseph car ses débuts furent difficiles, elle ne voulait pas décourager Patty.
Annie regardait ses deux amies avec envie, elle aurait bien voulu être comme elles et savoir à quoi elle se destinait…
Archi, voyant la détresse dans le regard d’Annie, profita de ce moment pour changer de conversation et annoncer leur prochain départ.
 Où partez-vous donc ? Questionna Candy.
-Eh bien, nous voulons retourner à Chicago rejoindre la grande Tante Elroy, répondit le jeune homme. Albert m’a demandé de venir l’aider dans ses affaires, il voudrait me former dans ce domaine et cela m’intéresse.
Malgré ses efforts pour aider Annie, il venait de commettre la maladresse de révéler que lui aussi avait peut-être trouvé sa voie.
Annie se leva brusquement et partit en courant vers la porte les larmes aux yeux.
Melle Pony entra à ce moment là par la porte de la cuisine et vit tout le monde  la regarder d’un drôle d’air.
 -Que se passe-t-il ? fit-elle d’un air gêné. Suis-je si peu présentable qu’il faille que j’appelle Annie pour me conseiller sur ma tenue ?
Les trois amis se regardèrent et pensèrent en même temps la même chose, Annie excellerait dans le domaine de la mode, il fallait immédiatement lui en faire part.
Melle Pony fût toute étourdie du passage si rapide des trois jeunes gens tel une mini-tornade, elle resta immobile à regarder son accoutrement tout en se questionnant encore…



Chapitre 6 : entre mère et fils.

C’était la septième fois qu’Eléonore voyait la pièce et comme à chaque représentation, elle était éblouie par le talent de son fils.
Il fallait qu’elle le voie et qu’elle lui parle, elle voulait tisser de nouveaux liens qui, à défaut de n’avoir pu être des liens entre mère et fils, pouvaient tout à coup, prendre la forme d’une complicité entre comédiens de grand talent.
Elle arriva devant sa loge et frappa.
- Entrez ! dit le jeune homme, la voix roque.
Terry ne vit pas tout de suite que sa mère était là, il se démaquillait et son regard se perdait à travers le miroir.
Après un court moment, il entendit une voix douce lui dire :
- Bonjour Terry, cela me fait tellement plaisir de pouvoir venir te féliciter pour ta très grande interprétation.
Le jeune homme se tourna vers sa mère qu’il avait reconnue par son timbre de voix unique et la regarda avec une grande fierté, il était si heureux du compliment que venait de lui faire cette si grande actrice.
Il se leva et se jeta dans ses bras pour la première fois depuis tellement, tellement longtemps.
Eléonore sentit son affection et dans le même temps, tout le réconfort qu’il venait puiser dans ses bras.
Terry était fatigué de s’être livré à son public durant cette longue soirée, mais il était si las, aussi, du fardeau de sa vie qu’il portait à bout de force… Comme si il avait déjà vécu cent ans !
C’est à ce moment précis qu’une idée germa dans l’esprit d’Eléonore. C’était décidé, elle écrirait une lettre à Candy, lui enverrait une invitation et ferait même envoyer une voiture la chercher s’il fallait !
Terry proposa à sa mère de venir chez lui quelques jours afin de prendre le temps de parler ou de simplement être ensemble au coin d’un bon feu de cheminée comme en Ecosse.
L’image de Candy lui apparut dans les yeux, c’était grâce à elle qu’il avait retrouvé sa mère et il ne l’oublierait jamais.
- Mère, il faut que je te dise aussi que Susana et moi, logeons sous le même toit pour que je puisse m’occuper d’elle dès que j’ai un moment de libre entre mes répétitions et mes représentations.
Elle aime aussi me donner la réplique lorsque je revois mes textes. Cela lui rappelle sa vie d’avant et lui permet de garder la foi en la vie.
Elle est douce et souriante, tu apprécieras sa compagnie.
Tout à coup, la mère vit le regard de son fils se perdre à nouveau.
Elle accepta sa proposition.
Dès le lendemain, elle enverrai son courrier à l’adresse du dernier hôpital où Candy avait travaillé. Elle voulait tenter d’agir car elle souffrait de voir Terry ainsi, elle ne reconnaissait pas son fils.



Chapitre 7 : cachette secrète.

Après le dîner, Albert s’était retiré dans le bureau de son père. Il n’y était jamais entré et découvrit pour la première fois ce décor imprégné de la personnalité du patriarche. Le décor était sobre mais prestigieux. Le mobilier, fait de bois précieux et de cuir, était fort bien entretenu. Il y régnait une atmosphère à la fois chaleureuse et rigoureuse, des odeurs de cigares persistaient malgré les années écoulées. Il s’assit dans le fauteuil et se mit à observé attentivement les lieux et objets. Un secrétaire de style anglais attira son attention, il était composé d’une partie basse à tiroirs et d’une partie haute vitrée. Une tablette centrale pouvait s’abaisser et ainsi devenir un mini-bureau où l’on pouvait y écrire quelques courriers. Albert se leva et tourna la petite clé permettant d’ouvrir la tablette, il l’abaissa délicatement et la déposa sur deux petits supports en bois qu’il avait tirés de chaque côté du meuble. Il découvrit alors de nombreux petits tiroirs et petits casiers tous remplis de lettres, d’accessoires d’écriture, de papiers, de boîtes…
Il prit une des boîtes, la plus joliment décorée de toutes et  lut les inscriptions écrites en Français : Papillotes de Lyon, made in France. Il entreprit de l’ouvrir. Le couvercle sauta d’un coup et plein de bonbons en papillotes s’éparpillèrent sur la tablette. Un souvenir lui revint à l’esprit spontanément, il vit sa grande sœur, Rosemary en train de manger avec gourmandise un de ces bonbons.
Et lorsqu’il voulut remettre la boîte en place, il heurta une sorte de bouton en forme de rose qu’il pensait être une décoration supplémentaire. A cet instant précis, un système se déclencha, ouvrant ainsi un tiroir secret.
Ce tiroir contenait un paquet de lettres entouré d’un ruban.



Chapitre 8 : correspondances.

C’est ainsi qu’Albert s’apprêta à lire la correspondance qui avait existée entre sa sœur, Rosemary et Georges qu’il ne connaissait pas intimement.
A peine avait-il lu les premières lignes qu’il ne put continuer, cela ne lui ressemblait pas !
Il remit, méticuleusement, en place le paquet de lettres à l’endroit où il l’avait trouvé et referma le secrétaire.
Il se dit qu’il en parlerait directement à Georges, il était son bras droit, son homme de confiance après tout. Leurs liens pourraient certainement se resserrer.

Au même instant, à Broadway, un autre secrétaire s’ouvrait, Eléonore s’apprêtait à écrire à Candy. Elle savait au fond d’elle-même où était le cœur de son fils. Il fallait absolument qu’elle tente quelque chose pour qu’ils se rencontrent, qu’ils se parlent. Elle savait qu’ils souffraient tous les deux, chacun de leur côté sans rien pouvoir partager.
Dans une des chambres du foyer de Pony, Patty ouvrit à nouveau une des lettres d’Alistair, avant de s’endormir le papier à la main.
Et ce même soir, encore une fois, Candy lutta de toutes ses forces pour ne pas ouvrir et lire une des lettres de Terry.
Pour l’instant, le temps ne faisait aucun effet sur sa douleur, il n’y avait pas une journée qui passait sans qu’elle ne pensa à Terry, à Terry et Susana, Susana, Susana, Susana…
Chapitre 9 : Susana.
Elle était assise dans son fauteuil roulant dans l’une des plus prestigieuses loges du théâtre, elle ne décrochait pas son regard de ce jeune et talentueux acteur dont elle était éperdument tombée amoureuse. Son cœur était rempli de lui, elle ne voyait que par lui et se consacrait à lui.
Elle regardait attentivement comment il faisait don de sa personne au public. Il était passionné, il vivait son personnage avec tant de vérité qu’elle ne croyait plus le connaître. Où trouvait-il cette énergie, cette générosité ?
Dans l’intimité, elle connaissait un garçon très mystérieux, introverti, déterminé et si calme. Il écoutait mais ne parlait que très peu. On aurait pu dire qu’il réfléchissait tout le temps.
Finalement, c’était comme si il avait une double personnalité.
Susana se dit que ce n’était pas si rare chez un comédien et elle refusa de s’inquiéter plus que nécessaire.
Elle aussi était deux personnes à la fois. D’un côté, elle était une douce et jolie jeune fille et d’un autre côté, elle était capable du pire pour avoir ce qu’elle désirait. Sa mère l’avait beaucoup gâtée dans son enfance. Petite fille, elle avait toujours réussi à obtenir ce qu’elle avait décidé de posséder.
Elle connaissait son côté machiavélique et avait choisi de faire du théâtre pour pouvoir, ne serait-ce qu’un instant devenir une bonne personne aux yeux de tous. Oui, il n’y avait que sur scène qu’elle parvenait à être quelqu’un de bien. C’est ainsi que le public s’était laissé charmer.
Sa bonté sur scène avait été si grande qu’elle s’était sacrifiée pour sauver Terry d’un terrible accident.


Chapitre 10 : projet.

Annie et Archi étaient heureux de profiter de la grande demeure de la famille André à Chicago. Archi avait commencé a travaillé avec Albert et le déploiement des différentes activités avait attiré son attention. Il s’était surpris à rêver d’une entreprise de confection de vêtements de haute couture qu’il pourrait peut-être un jour diriger avec Annie à ses côtés.
Annie se sentait beaucoup mieux depuis que tous ses amis lui avaient révélé qu’elle possédait un don pour l’esthétique dans le domaine de la mode. Elisa, elle-même, lui avait dit un jour qu’elle était une connaisseuse. Mr Brighton l’avait inscrite dans une grande école de confection et de couture malgré les réticences de sa femme. Mais Annie le voulait tellement que sa mère avait finalement accepté. En effet, elle savait que sa fille était faite pour cela, nombreux de ses ouvrages étaient splendides et soignés, elle les avait tous gardés.
Tout souriait au petit couple, Archi et Annie commençaient à imaginer leur avenir ensemble. Il allait bientôt en parler au grand oncle William qui était toujours à leurs yeux le Mr Albert qu’ils avaient connu aux côtés de Candy. Les conseils de ce vieil ami seraient les bienvenus.
Un soir, auprès du feu de cheminée, ils s’amusèrent à chercher des noms à leur entreprise de mode. Après en avoir énuméré un grand nombre, ils en trouvèrent un : « Archiannie & frère ».
Frère au singulier car un seul frère était dans leur cœur et avec eux dans ce projet : Alistair.



Chapitre 11 : Georges.

Georges était le fils adoptif du père d’Albert. Celui-ci avait pris ce petit orphelin français sous sa protection dès son plus jeune âge et en fit, quelques temps plus tard, son bras droit.
Lorsque William André connut Priscilla, il  décida d’agrandir sa famille en ayant des enfants issus de leur union : Rosemary et Albert. Rosemary était plus âgée de quelques années, elle appelait donc affectueusement son petit frère : petit Albert.
Lorsqu’Albert a perdu ses parents, Rosemary et la tante Elroy sont devenues sa seule famille. Rosemary s’est marié contre l’avis de sa tante avec un marin nommé Brown et elle a eu Anthony avec lui. Heureusement, la tante Elroy s’est prise d’affection pour Anthony, il lui rappelait tellement son frère William.
Dès son adolescence, Albert a montré son côté rebelle et son esprit d’indépendance. Il a fallu confier à Georges la gestion des affaires de William en attendant qu’un jour Albert décide de prendre le relais. La grande tante était chargée d’assurer les intérêts d’Albert, futur héritier de la fortune familiale. Le conseil des anciens avait décidé de garder secrète l’attitude d’Albert qui préférait s’occuper d’ animaux et vivre comme un vagabond, comble de déshonneur pour cette famille de grande renommée.
Rosemary était quand à elle, de plus en plus souvent seule et elle se disputait souvent avec sa tante qui lui reprochait d’avoir mal choisi son époux.
Georges devint le confident de Rosemary, ils se rapprochèrent et quand Georges partait lui aussi en déplacement pour les affaires, ils ne cessaient pas de s’écrire.
Un jour, la tante remarqua cette correspondance qui ne lui plaisait guère, elle décida d’interdire cette relation à sa nièce, la menaçant de tout dévoiler à son mari lors d’un prochain retour.
C’est ainsi que Rosemary se plia au bon vouloir de sa tante.
Sa santé commença à se dégrader à ce moment là.
De son côté, Georges ne comprit pas l’arrêt brutal de cette relation qui était devenue très importante pour lui. En effet, il était tombé amoureux de Rosemary et ne supportait pas l’idée de ne plus la revoir ni lui parler.
Alors qu’il revint d’un voyage en France, dans une ville nommée Lyon, il prétexta vouloir offrir une boîte de bonbons à Rosemary pour pouvoir la rencontrer. La tante accepta mais elle ne fut pas tendre avec lui et le pria de ne plus importuner Rosemary par la suite.
Lorsqu’ il put enfin la voir, ce fut un soulagement pour tous les deux. Ils purent ainsi s’avouer leurs sentiments. Georges raconta alors à Rosemary l’histoire de ces bonbons en papillotes.
Mr Papillot était confiseur et il surprit un jour son commis en train d’envelopper ses bonbons dans des billets doux écrits pour son amoureuse et ensuite les dérober pour pouvoir lui offrir.
Bien sûr le commis fut mis à la porte, mais Mr Papillot qui était un homme astucieux, se mit lui-même à confectionner des papillotes en y glissant des billets humoristiques. Ce qui explique le grand succès de ces bonbons français.  
En racontant cette histoire, Georges eut l’idée d’utiliser les bonbons pour communiquer avec sa bien-aimée. Elle était d’accord, il passerait par les jardins pour lui porter.
La roseraie devint un lieu de rendez-vous romantique.


Chapitre 12 : une lettre qui fend le cœur.

Ce matin là, les enfants de Pony virent de loin arriver le facteur alors qu’ils étaient en train de s’amuser à monter sur les arbres.
Ce fut Candy, elle-même, qui gronda les enfants craignant qu’ils ne se fassent mal, elle ne voulait pas avoir à soigner un bras cassé. Elle ne se reconnut pas elle-même dans cette colère, elle qui pouvait comprendre mieux que personne cette envie de vouloir grimper ou faire l’acrobate dans les arbres. Mais lorsqu’elle regretta de s’être emportée, il était trop tard. Dan, un petit garçon de six ans un peu revanchard, avait déjà dérobé une lettre adressée à Candy parmi le courrier qu’il était chargé de porter à Melle Pony. Il la cacha à l’intérieur de son casier de pupitre sous un livre de tortue que Patty lui avait prêté.
Elle sentait bon cette lettre, il aimait la sortir de sa cachette et la montrer aux copains. Malheureusement, un jour, il fut pris « la main dans le sac » par Patty qui avait remarqué qu’il n’était pas très attentif et elle lui confisqua son trésor.
Bien évidemment, Patty s’empressa d’apporter la missive à sa destinataire et la laissa seule un moment.
Candy fut surprise et troublée quand elle lut au dos du courrier le nom d’Eléonore Baker. Son sang ne fit qu’un tour, elle avait peur qu’il ne soit arrivé quelque chose à Terry !
Un ticket d’invitation glissa lorsqu’elle ouvrit l’enveloppe.  Eléonore la conviait à une représentation d’Hamlet, pièce dans laquelle jouait Terry actuellement. Elle priait Candy de venir voir son fils qui avait retrouvé le goût du théâtre grâce à la jeune fille blonde aux tâches de rousseur à laquelle il pensait toujours. En effet, elle expliquait dans sa lettre que Terry trouvait la force de monter sur scène car c’était pour cette jeune fille qu’il jouait.
Candy sentit sa gorge se serrer et des larmes lui coulèrent le long des joues. Cette lettre lui fendait le cœur, elle aurait voulu tout quitter pour aller rejoindre son Terry et se jeter dans ses bras. Mais d’un autre côté, elle savait que cela ferait énormément souffrir une personne qui ne  le méritait pas. Une personne si bonne qu’elle s’était sacrifiée pour sauver celui qu’elle aimait.
Si Terry et Susana parvenaient à être heureux, il fallait qu’elle aussi elle le soit. Et même si elle n’y parvenait pas, il fallait mieux qu’une seule personne souffre plutôt que deux.
Oui, elle se dit que cela devait devenir sa devise : une seule personne malheureuse plutôt que deux.
Elle ne savait rien des relations que pouvaient entretenir Terry et Susana, elle supposa que tout allait bien et se dit qu’elle refuserait d’y aller.
Dans sa lettre, elle fut sincère avec Eléonore. Elle la remercia de tout son cœur et ne put s’empêcher de lui dire la vérité. Elle ne pouvait pas aller voir Terry car si elle y allait, elle voudrait le voir, lui parler et … Les souvenirs de New York étaient encore trop douloureux.
 Elle lui dit aussi qu’elle ne pouvait pas sourire en disant que cela avait changé.

Patty vit tellement de tristesse, ce soir là, dans les yeux de son amie qu’elle n’osa pas lui annoncer son prochain départ pour aller apprendre son futur métier à Chicago.
Elle lui glissa un petit mot sous la porte de sa chambre, juste avant son départ, le lendemain matin.


Chapitre 13 : investigation.

Albert était bien décidé à parler à Georges. Il ne cessait de penser à cette correspondance entre Georges et sa sœur. Il profita d’un trajet en voiture où ils furent ensemble pour évoquer le souvenir de Rosemary dégustant les bonbons en papillotes comme ceux qu’il avait trouvé dans le bureau de son père.
À l’évocation de ces fameux bonbons, Georges rougit et fut absent quelques secondes en repensant à ces doux souvenirs. Rosemary était si belle, il l’aimait tellement et elle lui manquait terriblement. Il regrettait de n’avoir put être présent durant les derniers mois de sa vie. En effet, la grande tante Elroy l’avait envoyé en voyage d’affaire alors que Rosemary était au plus mal et que sa maladie devenait de plus en plus envahissante. Il n’avait pas supporté l’annonce du décès de sa bien aimée sans avoir put lui parler une dernière fois, il avait mit de nombreux mois à s’en remettre. S’occuper d’Albert avait été pour lui le moyen de survivre à cette épreuve difficile.
Soudainement Georges dut reprendre le contrôle de sa voiture afin d’éviter un terrible accident. Albert mesura l’impact de ses paroles.
-Que se passe-t-il Georges ? demanda Albert déboussolé.
-Et bien, évoquer le souvenir de Rosemary est douloureux pour moi, nous avons été très proches pendant une longue période.
- Ces papillotes de Lyon te disent-t-elles quelque chose ? Je les ai trouvées dans le secrétaire anglais de William.
-Oui, c’est moi qui les ai ramenées d’un voyage en France. J’en ai offert à la tante Elroy et à Rosemary.
-Pourquoi cela t’a tellement troublé tout à l’heure ? reprit Albert.
-Albert, il faut que je t’avoue que les relations que j’ai eues avec ta grande sœur ont été plus qu’amicales. Nous nous sommes vraiment aimés profondément. Lorsqu’elle a commencé à se confier à moi, elle souffrait beaucoup de la solitude car Mr Brown s’absentait de longs mois. Quand il revenait, c’était pour de brefs passages où il s’adonnait à de multiples rencontres familiales ou professionnelles, il en oubliait sa femme et son fils.
Oh ! Pourras-tu me pardonner un jour d’avoir compromis le mariage de ta sœur ? Depuis le jour où j’ai appris son décès, je me consacre au travail et à ta famille pour compenser le mal que j’ai pu faire. La tante Elroy ne me porte pas dans son cœur, je crois même qu’elle me déteste. Je pense qu’elle n’a jamais accepté le fait que son frère adopte un petit orphelin comme moi. De plus, elle était au courant de mon idylle avec sa nièce et cela l’horrifiait puisque j’étais le frère de Rosemary par adoption.
Albert ne put s’empêcher de faire le parallèle entre l’aversion pour Candy qu’avait la tante Elroy et ce rejet du fils adoptif de William. Il paraissait évidant que sa tante n’aimait guère les enfants adoptés comme si elle considérait que leur sang était impure et que cela pourrait nuire à sa famille. Albert bouillait de colère en son fort intérieur. C’était toute cette mentalité là qui le révoltait, c’est pourquoi le monde des animaux et l’harmonie de la nature l’avaient attiré. La société animale avait bien souvent, à ses yeux plus de valeur que la société humaine.
Après avoir réglé un certain nombre d’affaires, il retournerait en voyage, il était déterminé, sa vie ne se trouvait pas ici, il le savait.
Pour le moment, il était dans l’obligation de rester depuis son apparition à la tête de la famille, il désirait changer certaines choses avant de repartir et surtout il voulait s’assurer que sa fille adoptive Candy soit heureuse. Il ferait tout pour cela.
-Georges, je tiens à te rassurer, je serai à tes côtés pour t’épauler. Tu m’as toujours soutenu et en retour, je ferai de même.
Tu as eu raison d’être auprès de ma sœur lorsqu’elle en avait besoin, tu as eu raison de l’aimer. J’aurai voulu être là, moi aussi, mais j’étais trop jeune et j’ai été mis à l’écart.
Je voudrais te demander ton avis sur un point.
-Je t’écoute Albert et je te remercie de nous avoir compris Rosemary et moi.
-Lors d’un entretien que j’ai eu avec la tante Elroy, elle a tenu des propos désobligeants envers Candy. Elle m’a même dit : « Albert, si tu savais à qui tu as affaire. » Qu’en penses-tu ?
-Je n’en ai aucune idée mais j’ai toujours été choqué de sa haine envers Candy. Je trouve qu’elle est allée trop loin avec cette histoire de fiançailles entre Daniel et Candy. C’est pourquoi j’ai transgressé pour la première fois les recommandations que tu m’avais faites au sujet du secret sur ton identité auprès de Candy. Je ne supportais pas l’idée que Melle Candy soit malheureuse après tout ce qu’elle a traversé comme épreuves dans sa vie, c’était plus fort que moi.
-Tu as très bien fait Georges, je te remercie encore pour elle. De toute façon, il aurait fallu que ce moment arrive un jour ou l’autre, ne t’inquiète pas.
Je trouve que nous formons une belle équipe toi et moi, allons maintenant affronter ensemble notre réunion de conseil d’administration.
J’ai quelques annonces à faire en ce qui concerne le déploiement des activités dans de nouveaux domaines qui risquent de déplaire à certains membres !


Chapitre 14 : révélations.

Quand Eléonore reçut la réponse de Candy, elle fut profondément déçue. Elle réfléchit longtemps à ce qu’elle pouvait faire encore pour tenter d’arranger les choses. Elle décida de parler à Terry, mais pour cela, il fallait attendre que Susana sorte pour ses examens médicaux mensuels qui lui demandaient de rester plusieurs jours à l’hôpital.
Ce jour là arriva plus tôt qu’elle ne pensait. Heureusement, car elle n’en pouvait plus de garder au fond d’elle le secret du malheur de Candy.
Elle profita d’une fin de soirée au coin du feu de cheminée. Terry affectionnait particulièrement ces moments d’intimités avec sa mère, elle lui avait tellement manqué dans son enfance.
-Terry, je voudrais t’avouer quelque chose que j’ai fait sans te demander ton avis. Je t’en pris, ne te mets pas en colère, mes intentions sont celles d’une mère qui veut le bonheur de son fils.
-Je t’écoute, dit Terry, d’un air inquiet.
-J’ai écrit à Candy pour l’inviter à une de tes représentations d’Hamlet, pour qu’elle réalise que sa présence au petit théâtre ambulant de Rockstown n’avait pas été inutile et que tu avais retrouvé ta passion dans l’interprétation de tes rôles.
-Quoi, qu’est-ce que tu racontes, Candy était là, elle m’a vu et toi aussi sans que jamais je ne l’ai su ! Pourquoi as-tu attendu si longtemps avant de m’en parler ? dit Terry en haussant le ton.
-Je craignais que tu te mettes en colère, je ne peux pas supporter de me disputer avec toi. Si tu ne te calmes pas, arrêtons là cette conversation, dit Eléonore qui testait son fils afin de savoir s’il tenait à en savoir plus sur Candy.
-Continue, dit Terry qui avait réussit à retrouver le contrôle de lui-même en un instant.
-Je lui ai envoyé un ticket d’invitation, je lui ai même proposé qu’une voiture vienne la chercher. Elle a fermement refusé en s’excusant d’être si impolie.
-A-t-elle expliqué pourquoi, demanda Terry avec grand intérêt.
-C’est là où je voulais en venir, elle m’a révélé que les souvenirs de New York étaient encore trop douloureux pour elle et qu’elle ne pouvait pas sourire en disant que ça avait changé. Terry, elle souffre de votre séparation et je sais que toi aussi, même si tu ne veux pas l’admettre.
Terry s’assit tout à coup sur un fauteuil, lui qui était resté debout circulant de façon nerveuse dans la pièce depuis le début de la discussion. Il s’effondra la tête dans les mains, il voulait dissimuler ses larmes à sa mère.
-Elle m’avait promis d’être heureuse, elle me l’avait promis… se répéta-t-il plusieurs fois de manière presque inaudible. Je ne supporte pas d’entendre que tu es malheureuse, Candy, je ne peux pas le supporter, jamais je ne pourrais l’accepter. Pour moi aussi c’est si douloureux !
Voyant la réaction de son fils, Eléonore comprit qu’elle ne s’était pas trompée, son instinct de mère ne lui mentait pas. Elle savait depuis l’Ecosse ce qui se passait entre Terry et Candy, cet amour passionnel, elle l’avait connu, elle aussi, avec le duc de Granchester. Mais elle ne désirait pas que l’histoire se termine de la même façon pour son unique enfant.
Elle s’approcha de Terry et lui caressa les cheveux en lui disant : -Pleure mon fils, pleure… Si cela te soulage, mais il faudra tôt ou tard que tu prennes une décision en accord avec ce que te dicte ton cœur, c’est le seul moyen de vivre en harmonie avec toi-même.
Cette nuit là, il ne parvint pas à dormir. Son cœur lui criait qu’il devait choisir Candy maintenant. Il le savait au fond de lui-même depuis toujours mais sa peine pour Susana l’avait occulté. Au moment de l’accident, il n’imaginait pas vivre son amour avec Candy en ignorant le reste. Il n’était pas comme ça. Il considérait les personnes de son entourage, il appréciait Susana, il ne pouvait pas la laisser tomber à ce moment là. Elle était si fragile, il culpabilisait tellement. Candy avait compris cela, elle l’avait aidé à prendre sa décision.
Mais aujourd’hui, les choses avaient changées, les promesses qu’ils s’étaient échangées n’ont pu être tenues. Il ne parviendrait pas à être heureux avec Susana et il avait essayé une seconde fois pourtant.
Sa décision fut prise lorsqu’il repensa à leur rencontre sur le bateau, il gardait de ce moment un souvenir inoubliable, l’image d’un ange venu du ciel pour le réconforter alors qu’il en avait tellement besoin. Ses tâches de rousseurs dont il s’était moqué l’avaient en réalité, tout de suite, charmé. Au collège, il ne pouvait plus se passer de sa présence, il était en éternelle recherche de sa rencontre. Il était fou amoureux d’elle et cette flamme ne s’était jamais éteinte, elle s’embrasait tout à coup, c’était incontrôlable.
Il serait sincère avec Susana, il lui expliquerait, il ne la laisserait jamais tomber, il l’aiderait à surmonter ses difficultés comme un frère le ferait pour sa petite sœur. Sa sœur de scène, il parviendrait à la protéger. Il le lui dirait lorsqu’elle rentrerait.
-Merci, maman, se dit-il et le sommeil vint au petit matin.
A la maison de Pony, c’est Candy, cette fois qui alla à la rencontre du facteur, elle ne voulait pas qu’un quelconque courrier  se retrouve chipé comme la dernière fois avec Dan.
Parmi les lettres, il y en avait une qui s’adressait à elle. Elle venait de Broadway, Candy l’ouvrit avec hâte et en découvrit l’auteur. Il s’agissait de Susana, elle lui disait qu’elle regrettait la façon dont Candy avait du quitter New York, qu’elle savait où se trouvait le cœur de Terry et qu’elle attendrait toujours auprès de lui afin qu’il l’aime un jour, qu’il l’aime un jour, qu’il l’aime un jour…
Ces mots résonnèrent dans la tête de Candy qui reçut un choc. Elle courut vers la colline et se dirigea vers son arbre pour se retrouver seule. Elle pleurait, ses larmes coulaient sur ses joues empourprées, son cœur battait si vite qu’elle eut du mal à monter se nicher sur une branche.
Terry n’aimait pas Susana, elle avait raison de penser que c’était elle qu’il aimait. Elle l’avait toujours senti au plus profond d’elle-même. Il ne devait donc pas être heureux sans amour, qui pouvait l’être se dit-elle.
Elle repensa soudain à sa devise : une seule personne malheureuse plutôt que deux. Ce n’était plus le cas, deux personnes étaient malheureuses et une seule heureuse. Et l’était-elle vraiment heureuse ? Susana arrivait-elle à se contenter d’attendre un amour qui ne viendrait peut-être jamais ? Pourquoi lui écrivait-elle cela, était-ce un appel au secours ?
Malgré tout, Candy persistait à penser que c’était à Terry de prendre une décision, elle n’interviendrait pas.
Cependant, lorsqu’elle redescendit de l’arbre, elle se sentait bien, une lueur d’espoir scintillait à nouveau dans ses yeux.


Chapitre 15 : projet.

-Melle Pony, je voudrais aménager une infirmerie dans la petite grange sur le côté de la maison, vous voulez bien ? demanda Candy, pleine d’enthousiasme.
 Elle avait repéré depuis un moment que cette partie de la maison était laissée à l’abandon et elle manquait de place dans le bureau de Melle Pony et sœur Maria. Elle ne pouvait pas entreposer son matériel ni installer un lit pour allonger ses petits patients.
-Je n’y vois pas d’inconvénient, répondit Melle Pony, je vais en parler à sœur Maria et nous en discuterons ce soir au dîner. Ah, au fait, tu as une visite, tiens toi prête pour 18h !
-Qui peut-il bien venir me voir ? Questionna-t-elle.
-Je n’ai pas le droit de te le dire, c’est une surprise. En attendant, je veux bien que tu dépoussières un peu la petite grange, ça mettra un coup de propre, je vais t’envoyer quelques enfants pour t’aider.
Candy passa son après-midi à nettoyer dans la bonne humeur. Elle chantait à tue-tête avec les enfants quand elle s’aperçut qu’il était temps de se préparer.
Vers 18h, une calèche arriva et la silhouette d’un jeune homme très distingué en descendit. Elle courut car elle était curieuse de savoir qui se cachait sous cette cape et ce chapeau.
Quand elle reconnut Albert, elle fut heureuse d’aller à sa rencontre et de lui demander comment il se portait.
Il était tellement content de revoir sa petite protégée, sa fille adoptive qu’il admirait tant. Elle le rendait toujours de bonne humeur et il la rassurait.


Chapitre 16 : délivrance.

Une ambulance ramena Susana vers 17h, Terry avait fait bouillir de l’eau pour le thé. Dès qu’elle entra, il s’empressa de lui venir en aide pour la débarrasser de son manteau.
Elle avait une petite mine et voyant le dévouement de Terry, elle en rajouta un peu.
-As-tu préparé du thé, j’en prendrais bien une tasse, s’il te plaît !
-Oui, j’en ai fait, prends tes béquilles et rejoins moi au salon.
-Non Terry, je ne peux plus les prendre, le médecin me l’a interdit.
-Ah bon, pourquoi ?
-Amène-moi mon fauteuil roulant s’il te plaît. Je vais t’expliquer tout ça au salon.
Ils s’installèrent au salon près d’une petite table basse où étaient déjà disposées deux tasses à thé et une assiette de petits gâteaux pâtissiers. Toutes ces attentions surprirent Susana d’autant qu’elles semblaient vraiment sincères, « que se passe-t-il ? » se dit-elle intérieurement.
-Eh bien, reprit Terry, raconte moi ton séjour à l’hôpital et quelles recommandations t’ont été données.
-Mon séjour s’est bien passé, le personnel était très gentil avec moi et les examens que j’ai subis n’ont pas été trop douloureux. Seulement ce matin, le docteur m’a apporté les résultats et ils n’étaient pas bons. Je suis diabétique, ma mère l’est aussi, c’est héréditaire. Depuis l’accident, je suis devenue sédentaire et cela a aggravé ma maladie. Tu as, sans doute, remarqué que j’avais tout le temps soif, que je suis souvent fatiguée, que j’ai maigri et que je suis fréquemment malade. Cela fait quelques semaines que je n’ai plus de sensibilité au niveau de mon pied, il y a un gros risque d’ulcère. Dans le pire des cas, si mon hyperglycémie ne baisse pas, je risque une seconde amputation.
Cette dernière nouvelle tomba sur Terry comme un coup de massue. Susana chercha une parole réconfortante à dire.
-C’est très gentil à toi d’avoir préparé toutes ces bonnes choses à manger mais je ne peux pas en prendre, c’est trop sucré. Je suis agréablement surprise d’ailleurs, que me vaut cet honneur ?
-Euh…C’est que… Terry reprit gêné.
-Oui, dit Susana avec insistance afin qu’il continue.
Terry ne trouvait pas le moment adéquat pour parler de sa décision, mais il savait que s’il ne parlait pas maintenant, il ne le ferait jamais. Malgré tout ce qui l’accablait, Susana semblait faire face à ses problèmes de santé. Il se lança.
-Susana, je dois te faire part d’une décision que j’ai prise. Elle concerne trois personnes : Candy, toi et moi.
Susana se raidit, elle n’aurait aimé entendre que la fin de la phrase : « toi et moi ». Mais le prénom de sa rivale augurait d’un mauvais présage. Son humeur changea d’un coup.
 -Candy !  S’esclaffa-t- elle. L’as-tu rencontré pendant mon absence, lui as-tu parlé ?
-Non, rien de tout cela, je n’ai pas eu de nouvelles directes d’elle depuis notre séparation, elle respecte notre couple, du moins si on peut appeler notre relation comme ça.
-Explique-toi, Terry, comment définis-tu notre relation ? Car, pour moi, elle est très claire, je t’aime plus que tout au monde.  
Je serai toujours à tes côtés pour prendre soin de toi comme me l’a demandé Candy, elle-même.
-Moi, je suis prêt à prendre soin de toi aussi, mais pas comme tu l’espérais. Je ne t’abandonnerai jamais mais je ne t’épouserai pas car je t’aime comme si tu étais ma petite sœur. Je t’aime tendrement, je te protègerais toujours et je ne cesserais jamais de t’être reconnaissant de m’avoir sauvé.
-Mais tu te marieras avec Candy, n’est-ce pas ?
-Eh bien, depuis que ma mère m’a révélé qu’elle souffrait encore de notre séparation, je ne le supporte pas, je ne dors plus. Susana, j’ai essayé une seconde fois de nous donner une chance d’être heureux ensemble, la vérité est que je n’y arrive pas, je suis malheureux. Est-ce que c’est cela que tu veux, est-ce que tu veux que je sois malheureux ?
-Non, Terry, bien sûr que non ! Mais as-tu pensé à moi, crois-tu que je trouverai la force de me battre contre la maladie sans toi. Je n’ai plus qu’à m’éteindre à petits feux afin de vous laisser tranquille Candy et toi.
Susana tentait une dernière fois de faire culpabiliser Terry de l’abandonner. Mais le jeune homme se mit en colère.
-Crois-tu que je veuille que tu meurs, est-ce ça que tu veux dire ? dit-il d’un air blessé. Tu me connais mal finalement car je ne peux pas faire une chose pareille ! Et Candy non plus d’ailleurs, tu le sais puisqu’elle t’a sauvé la vie. Nous serons tous les deux là, présents pour toi, sois-en sûre.
Susana se mit à pleurer, elle avait mal dans son cœur et dans son corps. Elle sentait au fond d’elle que la décision de Terry était irréversible. Elle lui demanda de l’emmener dans sa chambre, elle désirait se reposer et réfléchir.
Sa bonté sur scène avait été si grande qu’elle s’était sacrifiée pour lui. Et maintenant, il lui demandait de se sacrifier une deuxième fois. L’aimait-elle vraiment au point de vouloir qu’il soit heureux sans elle à ses côtés ?   
Elle savait que Terry avait été sincère. Pour la première fois, il s’était confié à elle et elle appréciait. Elle ressentait une profonde détresse et en même temps la naissance d’un amour fraternel authentique qui lui redonnait espoir. Elle comprenait d’où lui venait son énergie sur scène, il n’avait pas oublié Candy. C’était elle qui l’inspirait et c’est pour elle qu’il jouait. Jamais elle n’obtiendrait ça de lui, elle ferait des caprices en vain. L’amour ne se commande pas, elle l’avait lu maintes fois dans les pièces de théâtre qu’elle avait interprétée. Elle avait confondu la scène et la réalité. Elle ne voulait plus que sa mère se mêle de sa vie. Sa mère qui avait gâché son éducation à trop la gâter. Elle réalisa que sa maladie, ses rencontres l’avaient fait évoluer en quelques mois plus que sa mère en plusieurs années.
Susana avait changée, elle s’était enrichie de sentiments humains et de générosité. Elle allait en faire profiter Terry et Candy. Elle se regarda dans le miroir et elle vit un visage fatigué mais elle se voyait vraiment, elle ne portait plus de masque diabolique, la comédie était finie. Elle tira les rideaux de sa fenêtre à la manière d’une tombée de rideaux théâtrale.  
Le lendemain, lorsqu’elle fit part à Terry de toutes ses réflexions nocturnes et qu’elle le délivra de ses chaines, il s’effondra et la pris dans ses bras. Il ne l’avait jamais étreint de cette façon. Elle en fut si heureuse qu’elle lui murmura à l’oreille : « Pars tranquille, tu viens de me combler. Reviens me voir bientôt avec Candy. Je vous attends. »



Chapitre 17 : soulagement.

Terry avait quelques jours de relâche devant lui. Il demanda à Eléonore de veiller sur Susana, il tenait à ce qu’elle se sente entourée. Il avait même pris sur lui d’informer Mme Marlow des derniers évènements qui avaient affectés sa fille, aussi bien du point de vue de sa santé que du point de vue de sa vie privée. Susana lui avait demandé de l’aider car elle ne désirait pas affronter sa mère, du moins pas tout de suite.
Il partit par le train du matin, la gare était pleine de monde. Cette image lui rappela la fois où il avait attrapé la main de Candy pour la tirer sur quelques mètres et s’arrêter tellement elle se défendait et criait. Ce fut un moment si intense ensuite, ils ne s’étaient pas vus pendant plusieurs mois. Ils n’avaient pas eu besoin de se toucher pour sentir mille frissons traverser tout leurs corps. Rien n’avait changé, il était toujours aussi fou d’elle. Il prévoyait de ne pas la brusquer comme il l’avait déjà fait lorsqu’ils étaient plus jeunes. Il lui demanderait d’aller discuter au pied de son arbre sur la colline.

Le temps était magnifique sur la colline ce jour là. Candy faisait des colliers de fleurs avec les enfants. Elle se souvenait que toutes petites, Annie et elle en fabriquaient pour offrir à leurs deux mamans. Heureusement, ses relations avec Dan s’étaient arrangées depuis qu’ils avaient grimpé ensemble sur l’arbre de la colline. Tom était présent, lui aussi, il rendait de temps en temps une petite visite amicale à Candy. Il lui racontait les histoires qui concernaient les fermiers de la région et elle demandait toujours des nouvelles de Mr Cartwright. Il se mit à aider Candy et les enfants et lorsqu’il eut fini son collier, il demanda à son amie s’il pouvait lui passer autour du cou. Elle accepta volontiers en repensant à leur enfance qui avait été si joyeuse. En effet, ils avaient faits les 400 coups ensemble et avaient de nombreuses fois mis en colère Melle Pony et sœur Maria. Il passa le collier autour de la tête de Candy et lui fit un baiser sur le front en lui disant : « Je suis très heureux de passer un moment à la maison de Pony. Si tu veux je t’inviterai à venir faire du cheval avec moi lorsque je déplacerai le troupeau, tu verras, c’est fabuleux à voir.» Candy lui répondit d’un sourire et approuva cette idée avec enthousiasme.
Au moment où il arriva, Terry assista à ce tendre échange entre Tom et Candy. Son cœur se mit à battre dans sa poitrine et il ressentit de la jalousie, la même que celle qu’il avait éprouvé lorsque Candy parlait tout le temps d’Anthony au collège. Il parvint à se contrôler mais difficilement. Il accéléra le pas afin de ne pas laisser trop de temps s’écouler et donc une nouvelle chance de baiser pour celui qu’il pensait être le nouveau prétendant de Candy. Il refusait de penser que son rêve ne pourrait peut-être pas se réaliser.
C’est Tom qui le vit en premier, il demanda à Candy si elle attendait quelqu’un. Elle répondit que non et tourna son regard dans la même direction que Tom. C’est alors qu’elle le vit s’avancer vers elle. Il marchait rapidement, elle se questionna sur la raison de sa venue mais elle était déjà troublée de le revoir. Tom remarqua le changement d’attitude de Candy et lui demanda si tout allait bien. Elle lui répondit que oui et lui confia les enfants. Terry avait choisi d’ignorer le jeune homme qui était au côté de Candy.
Ils s’approchèrent l’un de l’autre et c’était comme si le monde autour d’eux avait disparu. Il prit ses mains dans les siennes et dit : « Candy, tu m’avais promis d’être heureuse et j’ai appris par ma mère que tu ne l’étais pas. Cela m’a rendu fou et il faut que tu saches que moi aussi je suis malheureux d’être séparé de toi. Ces derniers mois ont durés des années. Ma force de jouer à nouveau, je l’ai retrouvée grâce à toi. A chaque fois que je monte sur la scène, c’est pour toi. Pour te dire tout l’amour que je te porte. » Il n’avait pas pu attendre, il n’avait pas su se retenir, lui qui avait pourtant tout répété dans sa tête pendant le voyage.
Candy pensait qu’elle rêvait quand, tout à coup, l’image de Susana lui vint à l’esprit. Elle s’empressa de questionner Terry à son sujet. Se rappelant de son scénario de départ, il lui demanda de monter sur la colline, près de son arbre et là, il lui raconterait les dernières nouvelles. Elle lui accorda cette entrevue et ils gravirent ensemble la colline, main dans la main.
Elle savourait ce moment tant espéré. Ils étaient là, assis, l’un à côté de l’autre en pleine nature. Le paysage était superbe, elle se souvint de leurs moments d’intimité en Ecosse quand Terry lui avait dit que tout lui paraissait beau parce qu’il était là, auprès d’elle. Il avait raison, elle le ressentait encore aujourd’hui.
Tout ce qu’elle apprit à propos de la santé de Susana l’inquiéta beaucoup. Quant à son attitude et la décision qu’elle avait prise, elle en fut soulagée. Susana est une si gentille personne, pensa-t-elle. Elle est si courageuse.
-Bien sûr que nous serons là Terry, nous serons présents auprès de Susana, nous ne la laisserons jamais seule.
Le bras de Terry vint se poser délicatement sur les épaules de Candy, ils se rapprochèrent un peu l’un de l’autre. Il était moins empressé que lors de son arrivée, il avait compris qu’il était le seul et l’unique dans le cœur de Candy. Le jeune homme de tout à l’heure ne devait être qu’un ami. Un ami, témoin de leur bonheur désormais.


Chapitre 18 : origines.

 Candy et Terry étaient repartis à Broadway, ils avaient passés trois jours extraordinaires à la maison de Pony. D’abord parce qu’ils s’étaient retrouvés, ensuite parce que tout leur entourage étaient heureux de leur bonheur. Tom avait fait la connaissance de Terry, ils vivaient dans deux milieux opposés mais s’étaient trouvé des points communs dans les valeurs qui avaient de l’importance à leurs yeux. Albert les rejoignait de temps à autre. Ils avaient fait de grandes promenades à cheval et Candy les avait accompagnés. Elle appréciait de remonter à cheval sans appréhension. Melle Pony et sœur Maria avaient versé quelques larmes au moment du départ mais elle reverrait bientôt Candy qui n’avait pas l’intention de laisser tomber son projet d’infirmerie. Albert avait promis de continuer la rénovation de la petite grange en parallèle à ses nouvelles occupations d’homme d’affaires.
Tout était tranquille ce matin là au foyer de Pony. Sœur Maria faisait la classe, Melle Pony travaillait au jardin potager et Albert entrepris de déblayer tout le bazar accumulé dans un grand placard servant de débarras. C’est Melle Pony qui avait confié la clé à Albert en lui disant que parmi les affaires contenues à l’intérieur, certaines appartenaient aux bébés abandonnés qu’elle avait recueillis avec sœur Maria. Ces propos avaient aiguisé la curiosité d’Albert qui espérait trouver des affaires appartenant à Candy. Il commença à trier ce qui était à jeter et ce qui était à réparer ou garder. Il trouva des ours en peluches, des poupées de chiffons et autres doudous ainsi que des berceaux et des couffins de toutes sortes. Deux couffins faits d’osier attirèrent son attention. Ils étaient tressés différemment mais se ressemblaient. L’un des deux était sur l’étagère du haut et lorsqu’il réussit à le saisir, il lui échappa des mains et tomba à ses pieds laissant rouler au sol plein de petits bonbons en papillotes. Quand Albert les ramassa, une image lui revint tout de suite à l’esprit : celle de la boîte de papillotes de Lyon que Georges avait ramené de France à sa sœur. Ces fameux petits bonbons que les deux amoureux avaient utilisés pour s’envoyer des mots doux.
Albert était très troublé de sa découverte, il fit tout de suite le lien entre Rosemary et Candy. Se pouvait-il qu’il soit l’oncle de Candy et Georges son véritable père ? Melle Pony et sœur Maria avaient toujours laissé tels quels, les objets des petits orphelins recueillis. Personne n’avait jamais mangé les bonbons, Albert en ramassa un et tira de chaque côté de la papillote. Un papier avec des inscriptions était à l’intérieur, il le déplia et lut : « Je t’aime si fort ma petite fille, ma petite Candy. » Il ouvrit avec empressement une autre papillote comme s’il était sur le point de découvrir un secret. Et en effet, le secret des origines de Candy lui fut révélé par un autre message : « Ton papa se nomme Georges et moi, ta maman, je m’appelle Rosemary », puis un autre : « Sache que tu es née d’un amour intense entre tes parents qui n’ont pas pu te garder auprès d’eux, c’était impossible. » Albert s’assit sur une chaise d’enfant sortie du placard et il ne réalisait pas ce qu’il venait d’apprendre. La grande tante Elroy connaissait ce secret, voilà à quoi elle faisait allusion en disant : « Si tu savais à qui tu as affaire… »
Pour elle, Candy était l’enfant du déshonneur.
 Albert était désormais déterminé à savoir ce que la grande Tante cachait, c’est pourquoi, dés le lendemain, il quitta le foyer de Pony en prétextant une affaire urgente à régler. Ce qui n’était pas faux. Les deux femmes interrogèrent l’oncle William sur le rangement du débarras et il répondit qu’il préférait s’en occuper avec Candy quand elle reviendrait y travailler.
-A quel endroit, pourrons- nous vous joindre si Candy nous le demande ? dit Melle Pony.
-A la propriété de Chicago. Au revoir et prenez soin de vous et des enfants.
-Au revoir ! répondirent-elles ensemble.
 
Dés son arrivée à Chicago, Albert fit prévenir la grande tante qu’il désirait lui parler au plus vite. Au déjeuner, tante Elroy dit à son neveu qu’ils pourraient discuter ensemble au moment où ils prendraient leur café dans le jardin d’hiver. Elle avait senti qu’il s’agissait d’une discussion confidentielle et la tension ambiante du repas confirma ce qu’elle pressentait.
La tante Elroy était maintenant, en train de remuer le sucre dans son café et la cuillère retentissait comme pour avertir du début de la conversation.
-Je connais le secret de la naissance de Candy, je comprends à quoi vous faisiez allusion en me disant l’autre jour : « Si tu savais à qui tu as affaire… »
-Ah oui ! Et qu’as-tu appris mon cher Albert ? demanda-t-elle d’un ton dédaigneux ne craignant en rien les propos de son neveu.
-Je suis au courant que vous n’avez pas approuvé la liaison entre Rosemary et Georges et que vous avez tout fait pour les séparer.
-Quel est donc ta source Albert, le journal des potins de Lakewood tenu par le personnel de maison ?
-Non, ma tante, je tiens cela de Georges lui-même.
-Et tu es donc prêt à croire n’importe quel mensonge ?
-Ce n’est pas un mensonge puisque j’ai pu vérifier qu’il s’agissait de la vérité en consultant des archives.
-De quelles archives parles-tu, il n’en n’existe aucune. Dit la tante Elroy d’un ton sûr.
-Ce sont des archives un peu inhabituelles puisque se sont des bonbons en papillotes.
La grande tante fut tout à coup confuse et gênée de la tournure que prenait la conversation. Elle se souvenait très bien de ces bonbons de Lyon qu’avait ramené Georges d’un voyage en France. Il lui en avait offert une boîte et elle n’y avait jamais touchée, elle l’avait rangée dans le secrétaire anglais du bureau de William avec le paquet de lettres qu’elle avait confisqué à sa nièce. Albert y avait fourré son nez  pensa-t-elle.
-Je ne vois pas comment des bonbons peuvent témoigner de quoi que ce soit ! dit-elle, se croyant toujours à l’abri du grand secret.
-Je vais t’expliquer ma tante. Je viens de passer plusieurs jours à l’orphelinat de Melle Pony. Là-bas j’ai retrouvé le couffin de naissance de Candy, il contenait ces bonbons en papillotes. J’ai immédiatement fait le lien avec Georges et Rosemary.
-Ce ne sont pas de misérables petites friandises qui vont constituer une preuve. Peut-être que cela peut expliquer le prénom de Candy mais c’est bien la seule chose. Déclara-t-elle énervée.
-Sauf que les papillotes contenaient des messages écrits de la main même de Rosemary, elles n’avaient jamais été ouvertes jusqu’à ce que je le fasse hier.
-Que disaient ces messages Albert ?
-Ils disaient que Candy est la fille de Georges et Rosemary.
La grande tante Elroy savait que lutter ne servirait plus à rien, elle acquiesça et son visage devint livide.
-Maintenant, reprit Albert, ne laissant aucun répit à sa tante, raconte moi tout ce que tu sais, cela vaut mieux car je ne cesserai pas de te harceler jusqu’à ce que tu m’aies tout révélé.
Tante Elroy but une gorgée de son café et commença son récit.
C’est ainsi qu’Albert apprit que sa sœur avait été conduite au couvent pour y rester le temps de sa grossesse et de son accouchement, il était convenu qu’elle devrait abandonner son enfant pour sauver l’honneur des André. La famille avait expliqué l’absence de Rosemary déjà malade par un repos prolongé et des soins prodigués par les sœurs du couvent.

Dans l’après-midi, Albert se rendit au couvent du lac. La mère supérieure le reçut avec beaucoup de gentillesse et écouta attentivement l’histoire de son hôte. Elle lut ensuite le courrier de la tante Elroy qui disait qu’elle pouvait confier tout ce qu’elle savait sur Rosemary et Candy.  Il apprit la présence d’une autre jeune fille pauvre qui était enceinte elle aussi et qui ne pourrait par la suite élever son enfant. Cette jeune fille était devenue une amie de Rosemary, elle avait eu une petite fille nommée Annie.
C’était la mère supérieure, elle-même, qui avait déposé à la maison de Pony les deux couffins tressés par les deux jeunes mamans qui avaient minutieusement préparé le départ de leur enfant. La mère supérieure connaissait bien le foyer de Melle Pony puisqu’elle y avait vu partir une de ses sœurs qui se nommait Maria. Elle avait assuré à Rosemary et son amie que leurs petites filles y seraient choyées.
Les deux petites filles eurent effectivement une enfance heureuse.


Chapitre 19 : retrouvailles.

Melle Pony reçut une lettre de Candy qui disait que tout se passait bien à Broadway. Elle s’était installé dans un petit appartement avec Terry, pas loin de celui qu’habitait Susana. Ils passaient souvent  la voir, Candy la conseillait sur ses soins et son régime alimentaire et Terry s’entrainait à dire des tirades. Susana lui disait la réplique et retrouvait le goût d’interpréter. Candy travaillerait à nouveau dans un grand hôpital mais à mi-temps pour le moment. Elle annonçait dans sa lettre sa prochaine visite et demandait à Melle Pony de prévenir Albert.  
Heureusement qu’elle savait où le joindre, elle envoya donc un courrier pour le prévenir et lorsqu’il reçut le message, il se rendit aussitôt à la maison de Pony.
Melle Pony reçut une lettre d’Annie qui annonçait sa prochaine visite elle aussi. Elle en reçut encore une de la part de Patty qui disait la même chose que les deux autres. Lorsqu’elle mit au courant sœur Maria, elles éclatèrent de rire.
 Candy et Terry arrivèrent juste après Albert qui avait tenu informées Melle Pony et sœur Maria de ses découvertes sur sa fille adoptive. Puis se fut Annie et Archi qui s’étonnèrent de voir Candy accompagnée de Terry. Après quelques explications, ils félicitèrent les deux amoureux. Enfin, ce fut Patty qui entra dans la maison, elle était en vacances et venait retrouver Candy mais elle s’aperçut qu’il y avait plus de monde que prévu et en fut très heureuse.
Albert guettait le moment adéquat pour parler à Candy. Lorsqu’il vit sa fille et son compagnon se vêtir pour une promenade au clair de lune, il sauta sur l’occasion. Il les suivit et leur demanda s’il voulait bien les suivre dans la petite grange. Candy n’y voyait pas d’inconvénient, elle pourrait parler de son projet à Terry.
Melle Pony et sœur Maria n’étaient pas entrées dans la grange depuis qu’Albert avait entrepris son rangement, tout était resté tel quel. Les couffins d’osier attirèrent le regard de la jeune femme, elle les trouvait jolis et avait l’impression de les connaître.
-Tu as vu, Candy, j’ai bien rangé pendant ton absence ! Dit Albert sur le ton de la plaisanterie.
Terry et Candy rirent de bon cœur.
-Eh bien, Albert, j’admire ton efficacité ! rétorqua Terry.
-En fait, j’ai été contraint de m’arrêter et de partir dans la précipitation.
-Ah, pourquoi ? demanda Candy intriguée.
-Parce que ces couffins sont les vôtres, à toi et Annie et que j’ai découvert la vérité sur ta naissance à l’intérieur de ces petits bonbons que tu vois là. Es-tu prête Candy à entendre le secret de tes origines ?
Candy fut très troublée, elle ne s’attendait pas à ce genre de révélation, elle interrogea Terry du regard. Celui-ci acquiesça et s’approcha d’elle en signe de soutien.
-Je t’écoute Albert. Fit-elle convaincue.
-Ces papillotes déposées dans ton couffin sont restées comme cela jusqu’à aujourd’hui. J’ai eu l’idée de les ouvrir grâce à une anecdote que m’a racontée Georges. J’y ai trouvé une série de petits messages écrits de la main de ta maman.
-Continue, je t’écoute.
-Ta mère s’appelle Rosemary et il s’agit de ma grande sœur. Je suis ton oncle Candy.
-Tu parles de la mère d’Anthony dont j’ai vu le portrait au domaine de Lakewood ! Je suis la sœur d’Anthony… Candy ne put continuer de parler, elle resta sans voix, stupéfaite, il fallut qu’elle s’asseye et elle se retrouva sur la petite chaise d’enfant qu’avait utilisé Albert lorsqu’il avait, lui aussi, appris cette nouvelle. Elle se sentit redevenir une toute petite fille qui ne put retenir ses larmes. Terry la laissa évacuer son chagrin, il savait qu’il lui faudrait du temps.
-Candy, ce n’est pas tout, reprit Albert. Ton père, tu le connais aussi, il s’agit de Georges. Ta mère dit qu’ils se sont aimés intensément et que tu es née de cet amour. Candy, ta mère t’aimait profondément, elle a été contrainte de t’abandonner. Quant à ton père, il ne sait pas que tu existes, il va falloir que nous allions lui dire ensemble. Enfin, tu dois savoir que la tante Elroy était au courant de tout depuis le début.
-Georges, chuchota Candy qui ne parvenait pas à réaliser ce qui se passait. Etait-ce la réalité ou rêvait-elle ? Son regard se brouillât et elle s’évanouie.
Ce fut Terry qui la ramena dans son lit et qui s’occupa d’elle durant la nuit. Elle eut un sommeil très agité.   
Le lendemain, Albert put terminer l’histoire en la complétant avec celle d’Annie. Candy était encore sous le choc mais elle était courageuse et Terry était à ses côtés pour l’aider à affronter cette épreuve. Elle fut heureuse d’apprendre que sa mère et celle d’Annie étaient amies, elle se dit que l’amitié entre ces deux femmes se prolongeait d’une amitié entre leurs filles, elle trouvait cela émouvant. Elle aiderait son amie lorsqu’elle saurait tout ça. Elles tourneraient leur regard vers l’avenir tout en ayant compris d’où elles venaient, leurs mamans de cœur seraient toujours Melle Pony et sœur Maria.
La rencontre entre Georges et Candy eut lieu quelques jours après à la propriété de Chicago. Georges et Candy furent tellement émus qu’ils  ne se quittèrent pas jusqu’à ce qu’ils se soient raconté leur vie. Georges connaissait plus sa fille qu’elle ne le connaissait. Elle ne cessa de le questionner sur son passé, son enfance d’orphelin, comme elle, puis son amour pour Rosemary. Elle écouta avec attention l’histoire des papillotes de Lyon et pensa que Mr Papillot était bien astucieux.
La France était un pays qui l’intéressait beaucoup, elle pensa que ce serait peut-être le lieu idéal pour un voyage de noces ou même, deux voyages de noces !
Georges décida qu’Albert pouvait rester le père adoptif de Candy, pour préserver l’honneur de la famille André. Il pensait à l’avenir de sa fille.
Annie ne demanda pas plus de détails sur son passé ce qui étonna Candy car petite, elle réclamait fréquemment ses vrais parents. Il faut croire que la jeune femme avait muri et qu’elle affectionnait beaucoup ses parents adoptifs en évitant de les froisser. De plus, elle se tournait vraiment vers l’avenir maintenant qu’elle était officiellement fiancée avec Archi.
Une grande réception familiale fut organisée pour les fiançailles de Candy et Terry. Cette fois, toute la haute société conviée n’assista pas à un échec doublé d’une surprise de choc.
Non, ils assistèrent au bonheur d’un couple hors du commun : une très belle jeune femme issue d’une riche famille américaine ayant un fort tempérament et un jeune comédien talentueux au charme irrésistible doté d’un immense charisme.
La grande tante Elroy, soulagée qu’il n’y ait eu aucun scandale, fut subjuguée par l’aura du jeune couple.


Chapitre 20 : mariages.

Les mariages d’Annie et Archi et de Candy et Terry furent organisés pour être célébrés le même jour et aux mêmes endroits. Candy et Annie y tenait particulièrement. La cérémonie religieuse aurait lieu au couvent du lac, là où leurs mamans avaient prié pour leur bonheur à toutes les deux 17 ans auparavant. Seraient présents leurs parents proches, Melle Pony et sœur Maria, leurs amis dont Susana, Patty et Tom. Puis, la fête se déroulerait dans la roseraie du domaine de Lakewood pour que tous les enfants du foyer de Pony puissent venir.
Une autre réception aurait lieu à la propriété de Chicago pour toute la haute société ainsi que la famille éloignée.
Il était prévu qu’Eléonore Baker soit accompagnée par le duc de Granchester, venu spécialement de Londres. La grand-mère de Patty et la famille Legrand viendraient de Floride.
Ce fut Annie qui dessina et fit réaliser les robes et costumes des mariés, ils étaient magnifiques et dénotaient d’une grande originalité pour l’époque.
Albert et Georges étaient fiers et particulièrement émus, ils se comprenaient sans avoir besoin de se parler.
Au moment où Candy et Annie jetèrent leur bouquet, ce fut Patty qui les reçut tous les deux. Elle rougit en croisant le regard de Tom qui fut lui-même troublé. Elle pensa qu’il y avait un bouquet pour Alistair et un autre pour Tom et que tous deux étaient réunis dans ses pensées désormais. L’un représentant le passé et l’autre l’avenir.
Ceci n’échappa pas aux deux couples de jeunes mariés qui s’échangèrent des regards espiègles.




Notes de l’auteur :
Je tiens à dire qu’il me tenait à cœur de réunir ce couple mythique qui représente pour moi l’idéal amoureux.
Deux êtres qui s’aiment et qui peuvent s’épanouir chacun de leur côté d’une manière totalement libre et respectueuse.
Je vois leur vie riche d’amour et d’évènements et je n’exclus pas de continuer à écrire. Mais j’attends de voir si mon histoire a plu car c’est la première fois que j’écris.
Je remercie Patty, l’auteur de ce dessin. Je l’ai trouvé sur le site de Sophie et je l’aime beaucoup.

 


© Miss Capucine 2009