Candy
par Lulu

 

 

Chapitre IV

 

Terry ouvrit d’un coup d’épaule, la grande porte de sa demeure, portant toujours Candy dans ses bras. A la vue du corps frêle et décharné de la jeune fille, les domestiques poussèrent des cris de stupeur.

- Lionel, occupez-vous de mon cheval, s’adressa-t-il à son maître d’hôtel.

Lionel se courba et sortit prestement.

- Camille, apportez des linges propres, de l’eau chaude ainsi que des vêtements secs pour Candy, dit Terry.

- Faut-il que je prépare une chambre pour Mademoiselle ? répondit-elle.

- C’est inutile, je vais lui donner ma chambre. Nous n’avons pas le temps. Et faites venir le docteur le plus vite possible !

- Bien Monsieur, s’écria Camille, en se pressant jusqu’à la chambre de son maître pour lui ouvrir la porte.

Terry s’élança à sa suite dans le grand escalier. Il sentait que Candy partait de plus en plus, à en juger par le relâchement de son corps. Il marcha plus vite, et entra dans sa chambre, Camille devant lui. Alors que cette dernière se dépêchait de rejeter les couvertures, il regarda Candy, toujours inconsciente. Son cœur se serra. Comme elle avait souffert… Ses blessures étaient multiples et elle était couverte de sang. La cape de Terry l’avait un peu réchauffée mais elle était toujours brûlante de fièvre, la sueur coulant de son front. Terry la déposa doucement dans son lit et remonta les couvertures. Il prit un linge humide et entreprit de nettoyer le visage de la jeune fille. Le contact de l’eau tiède la fit tressaillir. Elle tenta d’ouvrir les yeux, mais elle était trop faible. Son visage se crispa sous l’effet de la douleur et entrouvrit les lèvres.

Terry releva avec précaution son corps et lui fit avaler quelques gorgées d’eau.

- Terry… murmura-t-elle dans un souffle.

- Oui Candy, je suis là, répondit-il en lui prenant la main. Courage Candy, le docteur va bientôt arriver…

Le visage ruisselant de sueur, elle tenta de lui répondre mais sa tête s’affaissa de nouveau sur ses oreillers. Elle tenta de remuer les jambes mais elle fut envahie par la douleur et s’évanouit de nouveau. Terry, fou d’inquiétude, se releva et marcha vers la fenêtre.

- Camille, voulez-vous voir si le docteur est arrivé ? Et pouvez-vous envoyer un messager au pensionnat du collège de Saint Paul pour leur dire que Candy est ici ?

La domestique fit une rapide révérence et sortit de la pièce, laissant les deux jeunes gens seuls.

Terry ne supportait plus de voir son amie souffrir. Voyant que de grosses gouttes tombaient de ses vêtements et formaient une mare sur le tapis, il s’avança jusqu’à son armoire et passa rapidement des vêtements propres. Des affaires de nuit pour Candy avaient été posées sur le divan, ainsi que le peignoir qu’Eléonore avait laissé à l’intention de la jeune fille. Terry ne demanda pas à Camille de changer Candy, ne voulant pas toucher la jeune fille tant que le médecin ne l’aurai pas examiné.

Il allait appeler un domestique quand deux coups rapides furent frappés à la porte et Camille entra, suivit du docteur Wellington, un ami de la famille.

- Docteur, venez-vite, elle est ici, pressa Terry.

Le médecin prit une chaise et s’installa auprès de Candy. Il lui prit le pouls et un air grave se dessina sur son visage.

- S’il vous plait Docteur, dites moi que ce n’est pas grave, supplia Terry.

- Je ne peux rien vous dire pour l’instant Monsieur Granchester, répondit le docteur. Il faut que je l’examine. Veuillez sortir s’il vous plait. Je vous appellerai dès que j’aurai terminé. Camille pouvez-vous m’assister ? demanda le médecin à la jeune domestique.

Camille hocha la tête et s’approcha du lit. Terry regarda une dernière fois son amie et sortit silencieusement. Il avança un siège et s’assit devant la porte de sa chambre. Lionel, le maître d’hôtel, vint lui parler.

- Monsieur, ne voulez-vous pas que l’on vous prépare un repas chaud ? Vous êtes encore trempé…

- Non merci Lionel, répondit Terrence, mais je ne pourrai rien avaler tant que je n’aurai pas de nouvelles de Candy. Un messager est-il partit au pensionnat ?

- Oui Monsieur, il y a quelques minutes à peine.

- Bien. Pourrez-vous me prévenir de son retour ?

- Mais naturellement Monsieur.

Lionel s’effaça, sentant que son jeune maître voulait rester seul.

Après une attente interminable, la porte de la chambre s’ouvrit enfin. Terry se précipita à l’intérieur. Un linge humide sur le front, Candy paraissait plus calme. Le médecin avait rejeté les couvertures et achevait de bander les jambes de la jeune fille. Elle portait à présent une légère chemise de nuit bleu vif, qui accentuait la pâleur de son visage.

Terry s’approcha et attendit quelques instants pour parler au médecin . La gorge nouée, il parvint à articuler quelques mots :

- Docteur, quelles sont les nouvelles ?

Mr Wellington prit un air grave et lui pria de s’asseoir.

- Alors les nouvelles ne sont pas très bonnes Monsieur Granchester. Mais d’abord, pouvez-vous m’expliquer comment a-t-elle été blessée de la sorte ?

- Je crains qu’elle ne soit tombée de la falaise, répondit le jeune homme en baissant la tête.

- Je comprends mieux la gravité de ses blessures, murmura le médecin.

En entendant ses mots, Terry se redressa vivement et regarda le docteur d’un air inquiet.

- Oui, Monsieur Granchester, son état est critique. La forte fièvre dont elle souffre est sûrement due à son long séjour dans l’océan, et cette tempête n’a du rien arrangé. Je lui ai fait une piqûre, espérons qu’elle réagira bien. De plus, les blessures causées par sa chute sont profondes. Ses membres supérieurs ont été globalement épargnés, à part de grosses coupures. En revanche, ses membres inférieurs sont durement touchés…

- Docteur, dites-moi la vérité…

- La nuit sera décisive Monsieur Granchester. Si la fièvre tombe, nous pourrons peut-être avoir une chance de la sauver. Mais même dans le meilleur des cas, je crains qu’elle ne puisse plus jamais retrouver l’usage de ses jambes…

Terry était abattu par le choc. Il était perdu dans ses pensées. Après quelques minutes, le médecin se leva et se dirigea vers la sortie.

- Je repasserai demain matin. Je ferai mieux de rentrer, la tempête se lève de nouveau et les routes deviendront bientôt impraticables.

Terry ne répondit pas. Le médecin s’avança vers lui, et lui mit une main sur l’épaule.

- Terrence, ne perdez pas courage. Si elle est encore en vie c’est grâce à vous. Restez fort, pour elle… murmura-t-il.

Le jeune homme le regarda, retenant ses larmes. Il balbutia des remerciements et prit son visage dans ses mains. Il n’entendit pas la porte se fermer doucement et se retrouva de nouveau seul.

Après quelques instants, il se ressaisit. Oui, Mr Wellington avait raison, il devait être fort, pour elle. Il prit place à ses côtés, et la regarda d’un air bouleversé.

- Candy, Candy… Je sais que tu m’entends… Tu dois te battre car je ne veux pas que tu meures. Tu comprends ? Je ne veux pas… Tu ne peux pas me laisser seul. Qui m’apprendrai à grimper aux arbres mieux que toi ? Et qui m’accompagnerai dans mes promenades, sinon toi ? Alors je t’en supplie, Mademoiselle Tâches de son, reviens… Penses à tous tes amis… Annie, Archibald, Alistair et Patricia ! Tu dois te battre pour nous Candy ! murmura-t-il, en prenant sa main bandée dans la sienne. Je t’en supplie, ne me laisses pas…

Il changea le linge de son front et contempla son beau visage. Une vague d’amour l’envahit. Il ne pouvait la perdre…

Toute la nuit, il resta à son chevet, lui parlant sans cesse et guettant le moindre de ses gestes. Les domestiques se succédèrent pour tenter de faire prendre à leur maître un peu de repos mais Terry refusait à chaque fois, ne voulant pas quitter son amie.

Ce n’est qu’au petit jour qu’il s’endormit près d’elle, lui tenant toujours la main. La tempête avait fait rage toute la nuit, et Lionel ne l’avait pas prévenu du retour du messager partit au pensionnat. Il avait du passer la nuit chez les sœurs, à cause du mauvais temps.

Les premiers rayons du soleil percèrent la noirceur du ciel, laissant présager une lueur d’espoir…

© Lulu Mai 2004