Tentation
par Helena

 

Chapitre 16 - Les secours s’organisent


Elisa tourne en rond rageusement dans sa chambre, où elle est consignée jusqu’à nouvel ordre, pendant que Louisa est dans une autre.


« Mon plan ne peut pas échouer ! Pas si près du but ! J’allais me débarrasser enfin de Candy, et devenir la lady de la famille ! Oh, mais j’y pense, Niel est à côté ».


Et elle ouvre la porte de communication.


- Que veux-tu Elisa ?

- Il faut récupérer le coup à tout prix, voyons, et tu vas m’aider !

- Qu’est-ce qui te dit que j’en ai envie ? Après tout, tu es la seule impliquée dans la fausse histoire de Louisa, c’est toi qui l’a présentée.

- Mon cher frère, tu as tout intérêt à m’écouter. Sinon, je pourrais parler de tes petites promenades nocturnes à l’étage des bonnes, à la maison, et de cette fille que tu as mise enceinte malgré elle- comment s’appelait-elle, déjà ? Dorothée ?

- Comment ? Que dis-tu ?

- Je t’avais suivi, pendant une nuit, et j’ai tout entendu. Tu criais même le nom de Candy, pauvre imbécile ! Je pense aussi que les autres domestiques savent tout, et qu’ils pourraient témoigner si je leur demandait. Papa aurait tôt fait de te chasser et te déshériter, surtout avec un bâtard dans l’affaire !


Daniel blêmi- encore une fois, sa sœur reprend le dessus. Elle lui apparaît comme terrifiante, prête à tout- « pourvu qu’elle ne découvre pas… »


- Alors écoute-moi : tu vas aller trouver Albert (qui peut quand même être naïf, j’en sais quelque chose), et tu vas lui dire que tu n’étais au courant de rien, et que tu veux les aider à retrouver « les deux orphelines ».

- Mais pourquoi me croirait-il ?

- Tu lui diras que tu es toujours amoureux de sa précieuse Candy, et que tu ne supportes pas de rester à attendre. Ça devrait passer. Oh, on vient !


Et Elisa retourne dans sa chambre. La porte s’ouvre… sur Albert et Archibald.


- Niel, nous avons à te parler. Sais-tu d’autres choses sur le passé de Louisa, et ses fréquentations ?

- Non, je ne sais rien.

- Tu en es sûr ? Depuis que je te connais, tu complotes toujours avec ta sœur (Archibald menace Daniel de son poing)

- Mais oui, je le jure, je ne sais rien : c’est Elisa qui a tout organisé, tu la connais, elle est tellement ambitieuse !

- Je crois que nous perdons notre temps, constate Albert, viens Archibald, allons retrouver les autres.

- Qu’est-ce que vous voulez faire ?

- L’ami de Terry va contacter ses anciennes relations pour essayer de savoir où elles peuvent être… nous hésitons entre appeler la police et agir nous-mêmes.

- Alors, je veux vous aider.

- Pardon ? (Archibald s’étrangle) Nous aider ? Mais en quoi ? Tu n’as toujours été qu’un lâche, caché dans les jupes de ta mère et de ta sœur. Tu es bien incapable de te battre !

- Je veux vous aider parce que j’aime toujours Candy, et que je veux enfin faire quelque chose pour elle.


Albert et Archibald, interloqués, se concertent du regard.


- Oui, je l’aime depuis des années, et ça me donnera des forces et du courage. Et puis peut-être qu’en me voyant la secourir, elle changera d’avis sur moi. Je vous en prie, mon Oncle, laissez-moi venir !

- Après tout, toute bonne volonté est bonne à prendre… tu peux nous suivre.


Dans la chambre voisine, Elisa souri.


« J’avais bien fait de garder « une poire pour la soif » avec Niel… il est parfait ! Et si les choses se passent bien, je pourrai lui donner une consigne de plus : liquider définitivement Candy sous couvert d’un accident… il est tellement terrifié, il n’osera pas me dire non. Finalement, tout ne va pas si mal ! Je pourrais peut-être aussi récupérer Terry, pourquoi pas ? »


Et Melle Legrand s’allonge sur son lit et fait de doux rêves… Candy et les autres (y compris son frère) disparus, elle devenant l’unique héritière de la fortune André, avec un titre de Duchesse et un beau mari célèbre en prime…


- Mr André, l’inspecteur Poter demande à vous voir.

- Faites-le entrer.

- Messieurs, nous avons localisé la résidence de Mr Gold. Il y a eu pas mal d’allers - venues ces derniers temps, et nous avions déjà un doute sur la respectabilité de cet homme, à la fortune suspecte.

- Avez-vous vu deux jeunes filles ?

- Elles doivent être cachées. Il faut agir avec prudence, et nous ne sommes pas sûrs que ce soit lui qui les ait fait enlever.

- Et qui voulez-vous que ce soit ? Qu’est-ce que vous attendez ? Nous n’allons pas vous attendre !


La dernière intervention est de Terry. Il s’apprête à continuer, mais est sèchement interrompu par Tom.


- Nous devons faire confiance à la police. En plus, je ne vois pas pourquoi vous donnez votre avis. C’est d’abord aux familles et aux fiancés (Archibald et moi) de décider.

- Vous n’êtes qu’une chiffe molle, qui laisse Candy en danger ! Vous auriez mieux fait de rester dans votre ferme, derrière vos vaches !

- Tom et Terry, du calme. Mr l’inspecteur, merci de votre visite, et de nous tenir au courant.


Albert attendit que la voiture de la police disparaisse, puis se tourna vers les présents. La tension était palpable dans la pièce entre Tom et Terry, Niel ne semblait pas à l’aise non plus, quand à Archibald, il bouillonnait… Un bruit de course se fait alors entendre, et Charly déboule dans la pièce.


- ça y est ! Je sais où elles sont !

- Où ça ?

- Dans un entrepôt à l’écart de la ville… j’ai même réussi à me faire engager pour les surveiller.

- Alors tout est parfait. Nous allons te suivre, et faire une « opération coup de poing » pour les libérer.

- Chut, pas si fort… je sais aussi qu’il y a un indicateur dans cette maison, ça doit être un de vos domestiques, mais je n’ai pas son nom.

- Il y a quand même un autre problème, fait remarquer Mr Brighton, également présent.

- Lequel ?

- Votre visage est connu des espions de Gold, Albert.

- Eh bien, je reprendrai mes vêtements et ma barbe de vagabond… j’avais trompé beaucoup de monde comme ça !

- Charly, je pourrais t’accompagner. J’ai l’habitude de jouer la comédie, faire le mauvais garçon, ce sera facile, propose Terry.


Tous se concertent, et décident d’agir sans la police dès la nuit tombée.


« Candy, mon amour, il a fallu que tu sois à nouveau en danger pour que je réalise à quel point je t’aime… mais ton cow-boy aussi tient à toi. Je repartirai à Broadway dès que tu seras en sécurité, et je romprai à la fois avec Suzanne et Karen. Mais je ne t’oublierai jamais »



Chapitre 17 - L’espoir renaît


Les heures passent bien lentement pour Candy et Annie… elles se rendent compte à la luminosité que le soleil doit être haut, et que l’heure de midi arrive. La porte s’ouvre sur un homme avec un plateau.


- Je vous apporte à manger, et ai l’autorisation de vous délier les mains, mais pas les pieds. Je m’appelle Marcello et…


En découvrant le visage d’Annie, il se trouble.


- Vous êtes qui, vous ?

- Je suis Annie Brighton. S’il vous plaît, Monsieur, aidez-nous… mon père vous donnera sûrement une récompense.

- Annie Brighton ? C’est vraiment votre nom ?

- Pourquoi cette question ? Demande Candy.

- Parce que vous me rappelez quelque un, répond le « geôlier », et même beaucoup… mais ce n’était pas un membre de la famille Brighton.

- Candy et moi avons grandi dans un orphelinat, mais Mr et Mme Brighton m’ont adoptée il y a longtemps, et je les aime comme mes vrais parents. Monsieur, vous voulez bien nous aider ?

- Chut, ne dites rien… je vais relâcher vos cordes, mais c’est tout ce que je peux faire.


Avant de repartir, l’homme regarde à nouveau Annie, et murmure pour lui-même


« Adoptée par les Brighton… c’est bien ce qui pouvait arriver de mieux ».

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L’homme de confiance de Philip Gold voit arriver « Charly-de-Brooklyn« , accompagné d’un autre garçon du même âge.


- Salut, Charly, toujours à l’heure ! C’est qui, lui ?

- Graham, un gars que j’ai connu en Europe. Il cherche à se faire de l’argent à bon compte, lui aussi, je me suis dit que vous auriez peut-être besoin d’un autre garde…

- Il sait se battre, au moins ?

- Vous en voulez la preuve ?


Terry lance son poing vers Tony, qui n’a que le temps de l’esquiver.


- Ouais, c’est pas mal… dis donc, ta tête me dit quelque chose, on ne s’est pas déjà croisés ?

- J’m’en souviendrais.

- ça y est, je sais : tu as des faux airs de cet acteur, Terrence quelque chose… cette femmelette qui joue en collants à Broadway ! Heureusement que tu ne t’habilles pas comme lui, je ne prendrais sûrement pas une chochotte de cette espèce ! Bon, vous me suivez ?


Tous les trois s’enfoncent dans l’entrepôt sombre, entre les rangées de caisses. Arrivés au fond, ils croisent un autre homme avec un plateau vide.


- Tu les as fait manger ?

- Oui, c’est bon. Elles se tiennent tranquilles à l’intérieur. Dis, Tony, j’ai une course à faire…

- Ah bon ? C’était pas prévu. Où vas-tu ?

- Je dois aller voir ma famille, la Mama ne va pas bien.

- Si c’est la Mama, c’est sacré. Vas-y, et les nouvelles recrues vont monter la garde.

- Je pense revenir vite.

Tony entrouvre la porte pour les garçons.


- Voilà « la marchandise » à surveiller. Une jolie prise, pas vraie ?

- Tu peux le dire, renchéri habilement Charly, on en mangerait…

- Mais pas touche ! La blonde est prévue pour un « club » du patron, et il s’est réservé la brune pour son usage personnel. Il faut les garder « intactes », compris ? D’ailleurs, je vais fermer la porte à clé, vous ne serez pas tentés.


Et il ricane lourdement en s’éloignant. Il n’a pas vu « Graham » serrer les poings de rage, ni Marcello blêmir.

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A l’intérieur, Candy et Annie retrouvent l’attente longue et angoissante… elles ont entendu la conversation entre « Tony » et les nouveaux gardes, et s’inquiètent de leur avenir. Comment est-ce que leur destin a pu basculer en si peu de temps ? Candy sent la révolte monter, et s’agite.


- Annie, regarde, j’ai réussi à défaire le nœud des mains.

- C’est vrai ? Tu en es sûre ?

- Oui, et si on arrive à se détacher, on pourrait sortir. Voyons…


Candy considère la pièce à nouveau.


- Nous ne serons pas de taille pour affronter les gardes (elle n’a pas idée de leur identité). Tu sais, c’est drôle, la voix de l’un d’eux me dit quelque chose… bon, revenons à un moyen de sortir. Il n’y en a qu’un.


Les deux amies lèvent les yeux vers le soupirail.


- Tu veux qu’on passe par là, Candy ?

- C’est la hauteur qui t’inquiète ?

- Non, je t’ai déjà suivie au Collège. Ce serait plutôt la largeur, et ce qu’on va trouver de l’autre côté.

- De toutes façons, nous n’avons pas le choix. Je n’ose pas imaginer ce qu’ils attendent de nous, mais ça n’a pas l’air plaisant…


Annie opine du chef, et observe son amie qui continue à se tortiller pour défaire ses liens…

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- Monsieur Brighton, vous avez un visiteur qui s’est présenté par l’arrière de la maison.

- Qui est-ce ?

- Je ne le connais pas, mais il veut vous voir pour vous parler de Melle Annie.

- Faites le entrer, s’exclame Mme Brighton, qu’attendez vous ?


L’homme est habillé d’un costume rayé… Mr Brighton se souvient de l’hypothèse de la Police. Est-il venu demander une rançon de la part de la mafia ? Curieusement, il a quelque chose de familier…


- Bonjour Monsieur, bonjour Madame. Vous avez bien une fille qui s’appelle Annie ?

- Oui, vous savez où elle est ?

- Je suis venu vous le dire, et aussi vous conseiller d’être très prudents pour la retrouver saine et sauve… celui qui l’a fait enlever avec son amie est quelque un de très influent, avec beaucoup de moyens.


Rapidement, l’homme explique où se trouve « la cache », et fait un croquis de l’entrepôt avec ses différents accès.


- Je m’en vais, maintenant… est-ce que je peux ressortir par votre entrée de service ?

- Oui, bien sûr. Merci Monsieur (Jane Brighton lui serre les mains), merci si nous sauvons notre petite fille, ce sera grâce à vous.

- De… de rien Madame. Je lui dois bien ça.


Et Marcello s’en retourne, rattrapé par Mr Brighton en quelques enjambées.


- Pourquoi faîtes-vous ça ? C’est risqué, non ?

- Parce que je n’aime pas cette opération du Patron. Revendre de l’alcool, ou des armes, c’est une chose, mais ces deux filles n’ont rien demandé.

- Il y a une autre raison. Pourquoi devez-vous quelque chose à Annie ?

- Elle me rappelle ma jeune sœur… Luccia avait déjà attiré l’attention du Patron, mais elle était fiancée avec un garçon et ils se sont enfuis. Philip Gold les a fait poursuivre pendant des mois, puis retrouver et tuer le mari de Luccia. Elle s’est retrouvée toute seule avec son enfant, et nous, sa famille, avions interdiction de la revoir ou de l’aider.

- Et cet enfant était…

- Une fille. Et Luccia l’avait appelée Anna, mais je crois qu’elle a changé son prénom pour brouiller les pistes et faire plus américain… je m’en suis toujours voulu de ne pas l’avoir aidée. Il y a très peu de chances que votre fille soit la petite « Anna », mais je préfère ne pas laisser faire Gold une nouvelle fois.


Au moment de refermer la porte, Marcello se ravise, et ajoute :


- Une autre chose, Mr Brighton. Il y a un traître dans votre clan, qui a intercepté des courriers, et donné des indications sur les habitudes de la famille André.

- Nous le savons, mais connaissez-vous son identité ?

- Non. Je peux juste vous dire que c’est un garçon élégant, mais pas bien courageux… il ne voulait pas agir en plein jour avec les hommes pour l’enlèvement. Et aussi, il aurait déjà demandé à Philip Gold « de profiter au moins une fois de la blonde » en paiement des renseignements. Vous voyez qui c’est ?

- J’ai mon idée.

Chapitre 18 - L’affrontement


- Annie, ça y est, j’y arrive !

- Est-ce que tu vois quelque chose dehors ?

- Non, rien… la nuit tombe, et ce n’est pas éclairé.


Candy se hisse le long du soupirail, et tourne la poignée : Annie et elle ont finit par se détacher, empiler des caisses, nouer leurs cordes bout à bout. L’ancien garçon manqué a ensuite fait jouer du lasso pour attraper une étagère, espérant qu’elle soit solide, pour grimper. Elle aperçoit avec soulagement d’autres caisses à l’extérieur de l’entrepôt qui leur permettront de descendre… Annie la regarde passer à travers l’étroite fenêtre de justesse et empoigne résolument la corde .


- A mon tour !

- Tu es sûre d’y arriver ? Tu veux que je tire ?

- Crois-moi, je n’ai aucune envie de « tenir compagnie » à ce sale bonhomme, ça me donnera suffisamment de forces !

- Vas-y… et ne fais pas de bruit… oh, Annie, tu entends ?

- Oui, on dirait un harmonica ?


L’air est tout de suite familier à Candy… Terry ! Non, ce n’est pas possible, que ferait-il ici ? Elle ne sait pas qu’il est de l’autre côté de la porte cadenassée, proche des hommes de Gold qui viennent prendre de la marchandise, et que c’est le seul moyen qu’il trouve pour essayer de lui faire comprendre qu’il est là. Elle refixe son attention à Annie, qui passe elle aussi par le soupirail- plus aisément, car plus mince que son amie !

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Pendant ce temps, un groupe d’hommes se retrouve à l’entrée secondaire de l’entrepôt. Albert, qui a retrouvé ses habits de voyageurs et sa barbe, se retourne vers les autres.


- Donc vous avez compris ? Tom et moi faisons diversion pendant qu’Archibald et Niels, vous allez retrouver Terry et Charly pour les aider à libérer les filles.

- Entendu !


Et le petit groupe se disperse. Archibald précède Niels, qui a insisté auprès d’Albert pour s’assurer du sort de Candy.


« En réalité, je ne lui fais aucune confiance… les Legrand sont nés malfaisants et le resteront, mieux vaut que je le surveille », pense Archi.


« Depuis le temps qu’il me met des bâtons dans les roues, ce Conwel…c’est le jour où jamais, surtout qu’il pourrait me découvrir ! »


Profitant qu’Archibald observe le passage et de l’obscurité, Daniel avise un gourdin sur le sol, s’en saisit et assomme son cousin. S’en plus se soucier de lui, il l’abandonne pour continuer sa route, s’assurant au passage avoir toujours sur lui l’arme fournie par Elisa.

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- Candy, es-tu sûre que nous devions passer par là ?

- A vrai dire je n’en sais rien… mais il me semble que le mur de clôture est plus bas, par là.


Les deux amies continuent à pas de loup, elles ne savent pas que la voiture de Philip Gold vient d’être arrêtée par la police à l’entrée de la propriété. L’inspecteur Potter s’avance


- Monsieur Gold, j’ai une commission pour fouiller votre entrepôt.

- Et à quel titre, je vous prie ? Faites attention, j’ai des relations haut placées…

- Nous avons un témoignage fiable comme quoi vous détiendriez des jeunes filles de bonnes familles contre leur gré. Et nous avons des preuves de vos trafics de stupéfiants et d’armes.


Le Chef de bande blêmit malgré lui- Qui a pu le trahir ? Décidemment, la chance l’abandonne depuis qu’il a perdu Lola… Un hululement de chouette se fait alors entendre à quelques mètres, signal d’alarme convenu et aussitôt transmis jusqu’au cœur de la « réserve ».


- Le signal ! Barrons-nous !

- Que se passe-t-il ? interroge Terry

- Le patron a été trahi, lui réponds Charly, viens, filons !


Comprenant la ruse, il suit son ami qui contourne un îlot pour laisser courir les hommes de main… au bout de quelques minutes, ils reviennent vers la pièce où sont détenues les captives.


- Regarde, j’ai les clés !

- Comment as-tu fait ?

- Tu n’es pas resté suffisamment longtemps, mon vieux Terry… sinon, tu aurais aussi des talents de pickpocket ! Tiens, à toi l’honneur.


Terry ouvre la porte… la pièce est vide ! Charly repère aussitôt le soupirail.


- Quand je te disais que ce n’était pas une fille comme les autres ! Comment l’appelais-tu, déjà ? « Tarzan » ? En tout cas, il faut vite les retrouver, ça ne va pas être joli, dehors…

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- Candy, attention, crie Annie


Elles ont juste le temps de se plaquer contre un mur… les balles sifflent, traverser le terre-plein entre la sortie de l’entrepôt et la clôture est trop risqué. Que se passe-t-il ? Candy sent alors une main l’agripper par le poignet, et la tirer sans ménagement.


- Viens vite, suis-moi !

- Daniel ? Mais que fais-tu ici ? Attends, Annie est avec moi…

- Archibald s’occupe d’elle, cours !


Candy n’a pas le temps de réfléchir, elle le suit, le laissant l’entraîner dans un autre recoin de la réserve d’armes… profitant de la confusion et du bruit, il la plaque contre une porte.


- N’aie pas peur Candy, on va attendre ici que ça se calme.

- Et Annie et Archibald ? Ils vont nous retrouver ?

- C’est chacun pour soit, mais on les reverra… viens, maintenant, on est tranquilles, tous les deux.


Elle réalise alors avec horreur qu’il l’embrasse, fait glisser ses mains le long de sa robe, et le repousse.


- Mais tu es fou ! Nous sommes en pleine bataille, et je ne te permets pas…

- Permettre quoi ? Je viens de te sauver, petite peste, tu me dois bien ça…

- Laisse-moi, tu me répugne !

- Tu n’as pas été aussi farouche, avec l’Anglais… Quand Elisa vous avait trouvés dans son château en Écosse, tu ne portais qu’un peignoir ! C’est à mon tour maintenant !

- Ne me touche pas, Niel ! Tu ne me feras pas la même chose qu’à Dorothée !


Candy finit par se dégager et court entre les rangées de containers. Elle entend alors Daniel la poursuivre, et crier


- Arrête-toi ! Arrête-toi et reviens !

- Jamais !

- Arrête-toi ou je tire !


Il prend son arme, dégage alors le cran de sécurité, s’arrête et vise… le coup est parti !


Mais c’est une autre personne qui est touchée et s’effondre- Terry, qui a assisté à la poursuite et s’est jeté sur Candy pour la protéger. Elle est envoyée contre le sol et perd connaissance.


Daniel lâche son arme. Il vient de se rendre compte qu’il y a plusieurs témoins : Charly à sa droite, Albert, Annie et Tom, qui épaule Archibald, ainsi que l’inspecteur Potter. Le silence tombe peu à peu dans le hall, mais les regards en disent long.

Chapitre 19 - Les couloirs de l’hôpital


Le professeur Léonard, aussitôt averti d’une multiple hospitalisation en urgence à la demande de Mr André, accourt à la rencontre des personnes qui accompagnent les blessés. Il reconnaît en premier Annie, qui s’affaire avec un jeune homme à la tête bandée.


- Melle Brighton ? Que s’est-il passé ?

- Oh mon Dieu, Professeur… Candy et moi-même avons été enlevées par des personnes peu fréquentables, et certains de nos sauveteurs ont été blessés. Candy a aussi perdu conscience, mais je crois qu’elle devrait bientôt revenir à elle.

- Effectivement, Mademoiselle. Elle est toujours inconsciente, mais j’ai bon espoir, dit l’infirmière en chef

- Pourrait-elle répondre à nos questions à son réveil ?

- Monsieur l’inspecteur, mieux vaudrait attendre, ça risque de la perturber.

- Je peux peut-être déjà vous aider.


C’est Annie qui est intervenue. Albert l’observe, et remarque qu’elle semble maîtresse d’elle-même, et que dans son couple avec Archibald, le rapport est inversé : c’est elle qui semble le soutenir et le protéger ! Doit-on lui apprendre que c’est sans doute son « oncle » qui l’a sauvée, et qui est allé trouver la police pour dénoncer tous les méfaits de Philip Gold, au risque d’être poursuivi pendant des années ? Mr Brighton a estimé que c’était prématuré, mieux vaut attendre.


Albert s’adosse à son siège, et laisse aller son regard sur ses compagnons


- Annie et Archibald, dont l’amour mutuel ressort tellement qu’il se demande comment il a pu en douter. Le fiancé a perdu de son élégance habituelle, avec son bandage, mais comme il est soulagé qu’il n’ait rien de grave et qu’il ait survécu ! C’est lui qui les a trouvés, en déambulant cahin-caha pour les avertir de la traîtrise de Daniel Legrand. Jamais les Conwel n’auraient supporté de perdre leur autre fils…


- Charly, terriblement inquiet pour son ami Terry, qu’il a vu tomber sous les balles de son rival… parce qu’en plus, il en avait tiré plusieurs.


- Tom, qui tourne son chapeau de cow-boy entre ses mains, le visage baissé… assis à ses côtés, son père, Mr Steve, le regarde avec anxiété. Quelles peuvent être ses pensées ? Est-ce par haine ou par jalousie excessive que Daniel Legrand a tenté de supprimer Candy ? Et surtout - chacun a pu comprendre la force de l’amour que Terry porte encore à son premier amour, qu’en est-il de Candy, en principe bientôt heureuse mariée ?


Il se pose évidemment aussi beaucoup de questions sur ses « fiançailles », en principe toujours en cours, quand Georges apparaît, accompagné de quatre femmes. Trois d’entre elles ont des visages connus : Karen Blix, Suzanna Marlowe et Eleonore Baker ! La quatrième pousse le fauteuil de Suzanna, ce doit être sa mère… Charly se lève immédiatement, et se précipite vers Eléonore.


- Vous êtes là ! Vous avez reçu mon télégramme ?

- Mais bien sûr, Charly… merci de m’avoir prévenue. Où est-il ?

- En salle d’opération. Vous savez, j’ai vu beaucoup de fusillades et de blessés à la guerre, mais là sur Terry c’était pire que tout.

- Comment est-ce arrivé ? demande Karen

- Candy et moi avions été enlevées par la mafia, intervient Annie, nos amis sont venus nous secourir, mais il y avait un traître parmi eux, et il lui a tiré dessus. Terry a voulu la protéger, et a été touché à sa place.

- Il a voulu protéger Candy ? Et elle savait qu’il était là ?

- Non, elle l’ignorait totalement, tout comme moi. Elle n’a pas encore repris conscience…en fait, nous attendons des nouvelles de l’un et de l’autre.


La porte s’ouvre alors sur le chirurgien, le visage fermé. Eleonore est la première à accourir vers lui.


- Docteur, je suis la mère de Terrence. (Archibald sursaute, n’en croyant pas ses oreilles) Dites-moi comment il va. Est-ce qu’il…

- Il est vivant, Madame. Il devrait survivre, ses organes vitaux n’ont pas été touchés. Par contre, il aura bien besoin de votre aide.

- De mon aide ?

- J’ai tenté l’impossible, mais je crains qu’il ne se réveille aveugle.


Le cri d’horreur est unanime. Terry aveugle ! Personne ne peut se le représenter ainsi, lui qui a un regard justement tellement expressif… Suzanna s’évanouit dans son fauteuil, Karen s’assoit, livide, Annie s’effondre en larmes sur l’épaule d’Archibald, seule Eleonore répond au médecin.


- Vous vous trompez. Il se réveillera, et il reverra la femme de sa vie, je le sais. Un seul regard et ils se retrouveront.


Albert se retourne vers elle, surpris. Il a eu la même image, une évidence, au moment des paroles du médecin. Il les connaît lui aussi tellement bien : c’est sans doute pour ça qu’ils ont la même certitude. Le médecin hausse les épaules


- Un miracle, peut-être. Il n’y aurait que ça…


La journée, puis la nuit avancent. Ils ont convenu de faire un tour de garde dans les couloirs, pour attendre les nouvelles. Les médecins sont tout autant surpris de ne pas voir Candy revenir à elle que par la récupération inattendue de Terry. Melle Pony et Sœur Maria sont arrivées elles aussi, elles saluent la Tante Elroy qui les rencontre pour la première fois, et vont retrouver Albert dans la chapelle de l’hôpital. La profondeur de sa prière les impressionne…


Chacun des protagonistes est arrivé à un point de réflexion crucial, quand au petit matin, Nathalie, une infirmière qui connaissait bien Candy, sort de sa chambre en courant.


- Elle s’est réveillée ! Docteur, elle s’est réveillée, et elle veut se lever !

- Empêchez-la, voyons !


Trop tard ! Candy est apparue sur le seuil de sa chambre… elle est en chemise d’hôpital, le visage égratigné par la chute, les cheveux défaits, mais curieusement belle et lumineuse. Elle éclipse totalement Karen et Suzanne, pourtant des actrices reconnues. Elroy est saisie pour la première fois par cette ressemblance avec Rosemary.


- Albert, où est Terry ?

- Dans la chambre 13, en réanimation.


Et elle part, d’une démarche assurée… Eleonore la suit immédiatement, ainsi qu’Albert, puis les autres.


Candy entre dans la chambre, écarte les rideaux du lit et prend la main du blessé.


- Terry… Terry, je suis là.

- Candy ? Tu es bien vivante, Mademoiselle tâches de son ?


Il ouvre les yeux, et chacun peut voir les regards se croiser et ne plus se quitter. Le médecin et le Professeur Léonard, arrivés sur les entrefaits, s’immobilisent, incrédules.


- Je n’arrive pas à y croire…

- Je vous avais dit, Candy est incroyable avec les malades. Mais quand même !


Tous les visages des témoins ou presque expriment joie et soulagement.


Chapitre 20 - Les voies du destin


Un mois est passé depuis le double réveil… sur l’insistance des médecins, Candy et Terry ont accepté de rester en convalescence, chacun a reçu des visites qui lui ont permis de suivre les conséquences des derniers évènements.


Aujourd’hui, c’est Albert qui vient les chercher pour leur sortie. Le mariage d’Archibald et d’Annie a été décalé pour qu’ils puissent y assister, en les trouvant main dans la main, contemplant le parc, il sourit et se dit qu’une autre célébration ne saurait tarder.


- Eh bien, les amoureux ? Vous arriverez à quitter l’hôpital sans trop de regrets ?

- Albert, je ne vous avais pas vu ! D’où venez-vous ?

- Du tribunal… le jugement a été rendu contre Philip Gold, condamné, évidemment, pour ses diverses malversations, chantages, et enlèvements- dont le vôtre, à Annie et à toi.

- Est-ce qu’il y a eu le témoignage de Marcello ?

- Il a même été fondamental, mais communiqué sous couvert d’anonymat. Espérons qu’il arrivera à mener une vie à peu près normale, sans trop de poursuites…il a préféré par contre que nous gardions tous le silence sur l’histoire de sa sœur et de sa fille disparue, Anna. Il estime que ce sera une protection de plus pour Annie, si tant est qu’elle est sa nièce…

- Et pour Daniel ? Interroge Terry (Candy détourne le regard)

- 5 ans de prison pour complicité d’enlèvement et 15 autres pour tentative d’assassinat. Mais il aura des visiteuses.

- Sa mère et sa sœur, sans doute. Je crois que la Tante Leroy fini par comprendre !

- Oui, et aussi Louisa.

- Louisa ? s’écrient Candy et Terry


Albert éclate de rire devant leurs visages ébahis.


- Eh oui, Louisa. Quand je lui ai signifié la fin des fiançailles, j’ai pris la précaution de le faire en présence de témoins, pour éviter toute nouvelle situation compromettante. Elisa en faisait partie, et a tenté de « rattraper » son scénario avec « mon héritier »… auquel je n’ai jamais cru.

- Alors ?

- Alors, sa mère était là, et l’a enjointe de se taire et « d’oublier cette fille de rien » en parlant de Louisa… qui s’est emportée en lui disant « Je serais vous, je ne dirais pas ça, Belle-maman ».

- Pourquoi Belle-maman, demande Candy. Elle est devenue folle ?

- Non… simplement, depuis son entrée dans la demeure des André, elle avait entamé une liaison avec Daniel, « par sécurité«  d’où sa grossesse ! Ça explique l’absence de souvenir que j’avais de nos « relations », ainsi que la morosité de Daniel vis-à-vis de sa sœur. Il aurait certainement préféré qu’on nous élimine, Archibald et moi, pour qu’il se retrouve Chef de Famille, avec Candy comme femme et Louisa comme maîtresse (ou vice-versa). Mais ses plans n’ont pas pu plus aboutir que ceux de sa sœur… à propos, vous avez raté un beau « crêpage de chignons » entre Elisa et sa « chère amie » quand cette dernière a demandé que les Legrand lui verse une rente conséquente comme « porteuse de leur petit-fils » ! Pour une fois, Elisa est tombée sur plus calculatrice et machiavélique qu’elle, et elle n’aura pas gain de cause.


Terry et Albert éclatent à nouveau de rire, mais Candy garde un regard sombre… elle n’a pas oublié la tentative d’agression de Daniel, et craint qu’il ne s’en prenne à d’autres. Par association d’idée, elle se souvient alors de la lettre reçue ce matin…


- Attendez, j’ai reçu une lettre de Dorothée… oh, ça alors !

- Que se passe-t-il ?

- Sandra a eu des jumelles qu’elle a choisi d’appeler Candice et Anna, sur le conseil de Melle Pony !

- Sans doute vos vrais prénoms- c’est une délicate attention, apprécie Albert. Et puis ?

- Et puis, Tom a demandé à Dorothée de rester au Ranch avec son fils, Arthur. En principe, c’est pour continuer à s’occuper de Mr Steve, mais je me demande…

- S’il n’a pas fini par trouver « sa famille » tant espérée ? Il faut leur laisser le temps, remarque Terry.

- Sage remarque, Terry. Et à propos de fiancées, où en es-tu avec les tiennes ?

- Suzanne et Karen m’ont écrit chacune quasiment la même lettre : apparemment, Candy a été tellement « spectaculaire » à son réveil qu’elles ont réalisé la profondeur de notre relation. Suzanne a fini par accepter l’idée d’une prothèse pour remonter sur scène, et Karen préfère finalement se tourner vers ce nouvel art qui monte : le cinéma.

- L’une et l’autre vont donc essayer de t’oublier dans leur art… souhaitons leur d’y arriver.


Albert se tourne alors vers les arbres du parc, puis se retourne vers le jeune couple.


- Maintenant, il faut que je vous dise que je vais repartir, et que vous ne me verrez sans doute plus pendant plusieurs mois.

- Plusieurs mois ?

- J’ai décidé de suivre l’appel que j’ai entendu depuis bien des années. Quand ma sœur est décédée, j’ai écouté les supplications de la Tante Elroy pour ne pas prendre de décision définitive, j’ai accepté ensuite de reprendre ma place dans la famille pour ne pas lui causer de chagrin supplémentaire après la mort d’Alistaire, mais maintenant, je sais que mon destin n’est pas là.

- Mais où partez-vous ? En Afrique, encore ?

- Pas tout à fait. Candy, Terry, je vais vivre en ermite, mais en ermite religieux. Je veux me consacrer à la nature, aux bien des autres, et je sais maintenant que je ne suis pas fait pour une vie d’homme ordinaire. Je n’entrerai pas dans un monastère, mais mes vœux de pauvreté, humilité et chasteté me conviennent tout à fait, tout comme la vie au grand air .

- Si c’est à cause de Louisa, n’en croyez rien, Albert, s’écrie Terry- vous pouvez très bien rencontrer celle qui partage vos idéaux et qui n’aura rien à voir avec elle !

- Tu ne vas pas aimer ce que je vais te dire, mais si cette femme avait du exister pour moi, c’aurait été Candy… mais nous n’avons jamais éprouvé d’attirance, n’est-ce pas Candy ? Pour moi, le moment est venu de partir à l’épreuve, loin des vanités et tentations de ce monde pendant un an, mais je vous demanderai juste une chose à tous les deux…

- Laquelle ?

- Attendez mon retour pour votre mariage- voyons, Candy, arrête de pleurer ! Tu sais bien que tu es « bien plus jolie


… quand tu ris que quand tu pleures » complète Candy dans sa tête. Oui, Albert, je vous attendrai. Vous serez là pour mon mariage avec Terry, m’accompagnant à l’autel ou alors célébrant la cérémonie. Nous ne vous oublierons jamais, moi surtout : vous avez toujours été mon ange gardien. »



FIN



© Héléna 2008-2009