Le puzzle reconstitué
par Helena

Chapitre 4

Un ancien drame

Une semaine s’est écoulée depuis la visite à la Maison de Pony… Georges et Candy ont fini par trouver le nom du chantier où se trouve Mr Nelson, proche de la frontière Canadienne, et arrivent devant le bureau de la compagnie.

Candy prend une inspiration et frappe à la porte.

- Qui vient encore me déranger ? Ce n’est pas le moment !

Reconnaissant là le caractère irascible de Mr Nelson elle sourit, adresse un clin d’œil complice à Georges et pousse la porte.

- Je vous ai dit que… Non, c’est vous, Candy ?

- Comme vous voyez… vous m’accueillez toujours de façon charmante !

- Et vous êtes toujours aussi impertinente. Mais qu’avez-vous fait de vos cheveux ? Vous les avez vendus ? Au poids de vos couettes, vous avez du en tirer un bon prix !

Et ils éclatent tous les deux de rire… Georges retrouve alors la petite fille qu’il avait amené chez les André, et l’adolescente accompagnée en Angleterre… tellement réfractaire au protocole, mais si naturelle qu’elle se faisait des amis partout.

- Qui êtes-vous ? L’inconscient qui a épousé cette fille impossible ?

- Non, Monsieur. Je suis un serviteur de la famille André, et j’escorte Melle Candy.

Monsieur Nelson s’assoit alors lourdement et dévisage Candy. Son expression n’est plus la même, elle retrouve alors l’homme hostile des premières semaines.

- Vous êtes une André ? Et vous ne me l’avez jamais dit ? Vous vous étiez en plus présentée sous un faux nom, « Candy Neige » ?

- Mais je suis Candy Neige ! J’ai été adoptée à l’âge de 12 ans, mais mon vrai nom est bien celui que je vous avais donné… j’étais de plus en rupture avec ma famille adoptive quand j’ai travaillé sur votre chantier.

- Je vous crois, Candy… vous n’êtes pas une menteuse… mais le nom des André n’est pas le bienvenu chez moi.

A l‘expression de Mr Nelson., Georges sent effectivement que quelque chose s’est passé… Candy, quand à elle préfère ne pas insister, et se dit qu’elle parlerait de cette aversion avec Monsieur Nelson en privé. En effet, depuis son enfance, elle a pu observer à de nombreuses reprises la fidélité sans faille de Georges à l’égard des André, parfois presque à ses dépends… comme la vie aurait été plus simple si elle avait connu l’identité d’Albert à son arrivée à l’hôpital, amnésique ! Elle aurait pu contacter directement la famille André, qui aurait pris Albert en charge, aurait été plus libre, et se serait sans doute d’avantage défendue pour garder Terry…

Mr Nelson, voyant le visage de Candy s’assombrir, est pris de remords.

- Excusez-moi, Candy ! On ne se refait pas, je suis un ours, toujours bourru, mais vous, je vous estime.

- Oh… Mr Nelson., ne vous inquiétez pas, votre réaction ne m’a pas chagrinée !

- En tout cas, les André ont été intelligents au moins une fois : en vous adoptant.

Cette réponse fait sursauter Georges d’indignation, et Candy de surprise :

- C’est drôle ! Vous n’êtes pas le premier à me le dire !

- Et qui donc était ce « premier »?

- Un de mes patients, qui n’est plus de ce monde… Monsieur William Mac Gregor.

- Mais je l’ai connu ! Il était principal actionnaire pour une compagnie minière pour laquelle j’ai travaillé ! Il n’a pas du vous dire du bien de votre famille adoptive après le drame qui s’était passé. Mais dites-moi, qu’est-ce qui vous amène ?

Candy sort alors la lettre des parents d’Annie, avec le pictogramme, et explique… ce jour où elles avaient été trouvées… son amie d’enfance… la séparation…les retrouvailles… les fiançailles qui doivent en faire des cousines… la volonté de la matriarche de retrouver les parents d’Annie…

- C’est terrible, ces présomptions sur les enfants trouvés. Comme si nous étions tous des criminels en herbe !, rugit Mr Nelson.

- Oui, c’est vrai, vous m’aviez dit vous-même que vous n’aviez plus vos parents… mais je pense que si la vérité est supportable pour Annie, elle sera peut-être contente de retrouver ses racines.

Candy préfère taire le « marché » passé par la Tante Elroy… son intuition lui dit que son interlocuteur ne l’approuverait pas.

- Montrez-moi cette lettre.

A la vue du document, Mr Nelson pâlit… regarde Candy, puis Georges, puis à nouveau Candy…

- C’est la jeune fille qui était venue vous aider quand Margaux a été arrêtée ?

- oui, vous vous souvenez d’elle ?

- comment, oui, comment n’ai-je rien vu ? Auriez-vous une photographie ?

- la voilà,

- Le sourire de Kevin… la grâce de Betty…votre amie est timide, n’est-ce pas ?

- oui… qui est Kevin ?

- mon frère d’adoption. Nous avions grandi ensemble, commencé ensemble l’apprentissage à la mine : c’était un garçon intelligent, mais manquant terriblement de confiance en lui, et d’autorité. A cause de ça, j’ai progressé plus vite que lui, mais il me suivait partout… trop respectueux des conventions pour oser demander de l’avancement, défendre les hommes, mais malgré tout nous nous complétions.

- on croirait entendre parler de Melle Annie et de vous, Melle Candy, remarque Georges

- Kevin avait finalement rencontré une jeune fille, Betty. Pas plus audacieuse que lui ! Ils se sont mariés, faisaient un gentil couple, mais ça s’est mal terminé.

- Que s’est-il passé ?

- Monsieur Mac Gregor s’était exceptionnellement associé avec un André pour une exploitation minière. L’ingénieur qui suivait le chantier n’était autre que son propre fils, Brian. Mais nous avons tous vu très vite que Brian n’avait tout à fait pas la tête à son travail… il était amoureux d’une femme mariée, que je n’ai jamais vue ! Toujours est-il qu’un jour, les André ont refusé de continuer à participer à l’affaire, et d’acheter le matériel de sécurité. Un coup de grisou s’est malheureusement produit… Kévin et 20 autres hommes étaient pris dans la mine… Brian Mac Gregor était un garçon courageux : il a voulu aller les chercher lui-même, surtout Kévin. Nous avons tout fait pour l’en empêcher, mais il est descendu… sans le matériel de sécurité suffisant, la galerie n’a pas tenue, et il est mort comme les autres simples mineurs.

- Mais c’est terrible ! Qu’est devenue Betty, la femme de Kevin ?

- Elle était enceinte… et est partie sans prévenir. Le bruit courait que le jeune Mac Gregor et sa « maîtresse » se retrouvaient par son intermédiaire. Tout ce que je peux vous donner, c’est l’adresse de la mère de Betty… si elle est encore en vie.

La porte se referme sur Georges et Candy… de plus en plus étonnée par ces coïncidences…

Chapitre 5

Amies malgré la naissance

Candy est de retour à Chicago, par un beau matin de mai. Toujours accompagnée de Georges, elle marche dans cette rue d’un quartier commerçant, l’adresse donnée par Mr Nelson à la main. Par superstition, par crainte de créer une fausse joie à Annie, elle ne lui a pas parlé de ses recherches, qui pourraient bien aboutir aujourd’hui. Annie… Annie qui ressemble tellement au portrait fait de son père… Mr Nelson a fait promettre à Candy que si elle apprenait la vérité à Annie, elle la lui enverrait. Lui seul peut encore lui parler de Kévin Baker, son père, qui était orphelin. Il a quand même indiqué à Candy que Kévin avait une sœur, donc la tante d’Annie, Katie, qui avait elle aussi quitté l’orphelinat à 14 ans, en disant qu’elle avait trouvé sa vocation et devait la suivre.

Devant l’adresse indiquée, Candy et Georges marquent un temps d’arrêt et se regardent : une modiste ! Quoi d’étonnant, connaissant la coquetterie et le bon goût d’Annie, que sa famille travaille dans la mode ? Ça n’est jamais qu’une certitude de plus. Georges pousse la porte.

- Bonjour Monsieur, que puis-je pour votre service ?

La commerçante est certes âgée, mais toujours gracieuse… avec retenue. Indéniablement, elle peut être la grand-mère d’Annie. Candy prend la parole

- Bonjour Madame, je m’appelle Candy Neige André. J’ai grandi dans un foyer pour orphelins en même temps qu’une amie très proche, Annie, presque une sœur. Je recherche pour elle ses parents, et je pense que… mais qu’avez-vous ?

En découvrant Candy derrière Georges, la vieille dame est d’abord restée figée, presque effrayée… comme si elle voyait un fantôme. Livide, elle chancelle, et Georges la rattrape de justesse.

- Qui êtes vous ? Ce n’est pas possible, Betty ne délirait donc pas, elle a dit la vérité ! Et elle vous a confiée en même temps que ma petite Annie… ce n’est pas possible, non pas possible… et pourtant, ces yeux, ce visage et ce nom… êtes vous mariée à un André pour porter ce nom ?

- Non, j’ai été adoptée par l’un d’eux… mais dîtes-moi à qui je ressemble ? Madame, Madame ?

Devant la perte de connaissance de la grand-mère d’Annie (car ça ne peut être qu’elle !), Candy est affolée. Elle retrouve ses réflexes professionnels d’infirmière quand Georges l’interpelle.

- Mademoiselle Candy ! Il faut l’allonger, appeler un docteur !

- Laissez-moi faire, c’est mon métier, après tout.

Quelques minutes plus tard, la vieille dame retrouve ses esprits. Elle considère Candy, et lui dit

- Ce n’est pas par hasard qu’on vous a envoyée faire ces recherches. Qui vous l’a demandé ?

- La doyenne de la famille André,

- Madame Elroy? Madame Elroy elle-même ?

- Vous la connaissez donc ?

- Mais oui, c’était une de mes anciennes clientes… et c’est par elle que Rosemary et Betty se sont connues.

Madame Gordon, car tel est son nom, raconte alors à Candy l’histoire de sa fille. Georges, en retrait, écoute et trouve enfin des explications à des évènements inexpliqués

- J’avais depuis de nombreuses années Mme Elroy dans ma clientèle. J’étais veuve, et avais commencé à faire travailler Betty, ma fille unique alors adolescente, avec moi. Un jour, Mme Elroy est venue avec une toute jeune fille du même âge que Betty, qu’elle m’a présentée comme sa nièce, Rosemary André. Bien qu’étant de milieux totalement différents, Betty et Rosemary ont sympathisé : chacune avait reconnu chez l’autre la solitude de l’orpheline, la réserve, le bon cœur. Rosemary était un peu solitaire : sa sœur était mariée depuis un an, en voyage constamment, et, malgré le souhait de sa Tante Elroy, elle ne parvenait pas à s’entendre avec sa cousine, apparemment coquette, versatile, et jalouse de la position de Rosemary, plus fortunée qu’elle. Rosemary a donc proposé à Betty de devenir sa demoiselle de compagnie… Mme Elroy avait tout de suite accepté, jugeant que ma fille « saurait rester à sa place ». Les choses se sont compliquées au bout de cinq ans…

- Que s’est-il passé ?

- La sœur et la cousine de Rosemary étaient mariées. Sa tante s’est alors inquiétée de l’avenir de cette jeune orpheline qui ne vivait que pour ses roses, ne s’intéressait pas aux mondanités, bref, ne prenait pas la voie classique pour devenir une « Lady ». Craignant qu’elle ne soit la victime d’un coureur de dot, elle lui a présenté un jour un armateur de ses relations, Mr Brown. Elle lui a alors mis le marché en main : accepter le mariage avec ce Mr Brown, ce qui lui donnerait une position « acceptable » dans le grand monde, tout en lui permettant de garder une certaine liberté pendant les voyages de son mari, ou alors être séparée de son jeune frère.

- Vous voulez dire Mr William Albert ?, s’exclama Georges, sortant de sa réserve habituelle

- Oui, elle l’aurait envoyé en pension, en Angleterre je crois, pour en faire un homme d’affaires, bien différent de la voie qu’il prenait… Betty me racontait qu’Albert adorait les animaux et la nature.

- Il n’a pas changé… mais a fini par grandir séparé de toute la famille, dans l’ombre.

- Toujours est-il que Rosemary a accepté. Son fiancé n’était d’ailleurs pas un mauvais homme, très amoureux de sa femme, mais quand même plus âgé et constamment en voyage. Ils se sont mariés, ont eu un petit garçon, mais un jour…

Mme Gordon s’interrompt, la gorge nouée.

- Je vais finir l’histoire, mais sachez que ça risque de vous faire du mal… à vous comme à Annie…

- Vous êtes allée trop loin dans le récit… j’ai le droit de savoir.

- Réfléchissez, Melle Candy !

- Je suis prête à entendre la fin.

- Alors, la voilà. Par la force des choses, Rosemary voyait de temps en temps sa fameuse cousine, qui avait un fils du même âge que le sien. Un jour, le mari de cette cousine a dû aller voir une exploitation minière dans laquelle il avait investi. Sa femme s’était mis en tête de l’accompagner, et, ne pouvant pas être la seule épouse, a « sollicité » la présence de Rosemary. Rosemary et Betty sont donc parties en voyage périlleux, et ça a changé leur vie. Arrivée à la mine, Betty a rencontré un gentil garçon, Kévin Baker, et m’a écrit peu de temps après. Ils s’étaient revus, voulaient se marier, et elle quittait sa place de demoiselle de compagnie dans la Famille André pour devenir cuisinière dans l’exploitation… connaissant sa nature fragile, j’ai tenté de l’en dissuader, lui suggérant plutôt que Kévin entre lui aussi au service des André. Elle m’a répondu que ce « n’était pas possible », que Rosemary « avait besoin de sa présence sur les lieux de la mine ».

Georges réfléchi alors à haute voix

- Je me souviens… c’était une période où Mme Rosemary faisait fréquemment des voyages, en principe pour les intérêts de la famille… c’était surprenant, car elle ne s’était jamais impliquée auparavant, ce n’était ni son rôle d’épouse, ni dans sa nature, plutôt désintéressée. Ou alors pour revoir votre fille.

- Ma petite Betty est revenue un an après son mariage… veuve, avec un bébé, et malade. Un domestique de la famille André l’accompagnait, et a proposé d’amener la petite fille chez la sœur de Kevin, dont il avait apparemment l’adresse. J’ai accepté, je me sentais trop âgée pour bien m’occuper de cette petite fille… comme j’ai regretté depuis ! J’ai écris pour savoir où retrouver ma petite fille, et n’ai jamais eu de réponse… peut-être parce que Betty parlait dans ses derniers jours de « l’autre bébé », celui de Rosemary, enlevé avec le sien… dont je ne connais pas le nom du père.

Chapitre 6

La page déchirée

Candy et Georges sont revenus à Lakewood. La Tante Elroy est en voyage pour quelques jours, avec Annie et Archibald, pour préparer leur mariage.

Dans un sens, Candy est soulagée de leur absence : ainsi, elle peut poursuivre son enquête, sans avoir à faire de révélations incomplètes à Annie, sans avoir à subir le regard inquisiteur de la Tante. Elle commence par ce rendre à la bibliothèque de la demeure familiale avec Georges.

- Où est-il… mais où peut-il être ?

- Que cherchez vous, Melle ?

- Quand j’ai été adoptée par Albert, Mme Elroy m’avait donné un livre : c’était toute la liste de la famille André, avec les arbres généalogiques et les dates de naissance. Elle m’avait alors ordonné de l’apprendre par cœur, ce que je n’ai pas eu le temps de faire, puise qu’Anthony est mort peu de temps après. Il faut dire aussi que ça ne me passionnait pas, à 12 ans !

Candy fait une grimace à cette pensée, et un clin d’œil complice. Georges est soulagée de la voir garder le sourire, et admire une fois de plus sa force de caractère : d’autres auraient été effondrées à sa place ! Apprendre qu’elle était peut-être vraiment une André, et que son premier amour était peut-être son frère… mais il est vrai que Candy sait faire face, elle le prouve une fois de plus.

- Le voilà ! Recherchons d’abord la « fameuse » cousine qui avait à peu près l’âge de Rosemary. Quelque chose me dit qu’elle pourrait nous dire beaucoup de choses, et j’ai déjà une petite idée sur son identité.

Candy feuillette le livre, arrivant rapidement aux années qui l’intéresse.

- Voilà ! La sœur de Rosemary était mariée à Mr CONWELL… c’est donc la mère d’Archibald et d’Alistair, nous la verrons peut-être enfin au mariage… voici Rosemary, mère d’Anthony… Albert William … nous arrivons aux cousins, la branche « moins riche » de la famille… en cousine « à peu près du même âge », il y a Sarah, c’est-à-dire…

- Mme Legrand ! Celle qui vous avait engagée à l’âge de 10 ans.

- Ce n’est pas tout à fait ça… Mr Legrand m’avait fait chercher chez Melle Pony, et elle, a tout fait pour me faire repartir. Je croyais à l’époque que c’était juste par aveuglement vis-à-vis de ses enfants, surtout cette affreuse Elisa, mais il y avait peut-être autre chose…

- Vous pensez donc être « cet autre bébé », celui de Mme Rosemary ? Il est vrai que vous lui ressemblez

- Je n’en suis pas sûre… dans un sens, je préfèrerais être à la place d’Annie, être née parce que mes parents avaient désiré ma venue. Là, j’ai l’impression d’être un accident, et même un fâcheux accident.

- Melle Candy, j’ai bien connu Mme Rosemary. C’était la bonté incarnée, et une excellente mère… si elle a du se séparer de vous, c’est qu’elle y a été vraiment obligée. Elle avait perdu presque toute joie de vivre pendant les dernières années de sa vie, à part en présence d’Anthony.

- Je ne suis pas encore mère, et ne peux pas tout à fait la juger. Mais j’ai connu quelque un d’autre, qui avait été séparée de son enfant pour des raisons de convenances. Et elle était venue le retrouver, malgré tout !

Le souvenir de l’été en Écosse, et d’Eléonore Baker est resté vivace pour Candy. C’était la première fois qu’elle s’était dit que l’amour d’une mère était irremplaçable, et qu’elle regrettait de ne pas l’avoir connu. Mais qui dit Eléonore dit aussi Terry… Elle préfère donc rejeter ce souvenir, et revenir au présent, cette investigation l’empêchant de trop penser à lui. Une idée lui vient.

- Comment est créée un biographie dans l’histoire des André, Georges ?

- C’est la mère, ou le père de l’enfant qui ouvre la page. Il inscrit le prénom, le nom, la date de naissance de son enfant, et le chef de famille continue à tenir à jour l’histoire de la famille au fur et à mesure des évènements : mariage, enfants, veuvage, décès…

- Voyons donc mon année de naissance !

1896... Anthony, Alistair, et Daniel

1897... Elisa (« on aurait pu s’en passer ! » pense Candy) et Archibald

1898... Une page déchirée.

Georges et Candy en sont glacés. Quelqu’un avait commencé à inscrire un enfant… la page était déchirée…

- Un enfant mort-né, peut-être ?

- Oh non, Melle. La famille André est très croyante, les enfants mort-nés sont enterrés religieusement, dans le livre, ils sont représentés par une seule ligne, qui résume leur naissance et leur mort.

- Donc, quelque un a voulu cacher la naissance d’un bébé… il est quand même possible que ce soit moi… La Tante Elroy?

- Elle est très respectueuse des traditions… ce livre est presque sacré pour la famille… l’abîmer, ce serait détruire l’esprit de famille.

- Donc, c’est quelque un d’autre. Allons chez les Legrand.

Au moment où Candy referme le livre, et s’apprête à le prendre avec elle, Georges ose pour la première fois l’arrêter.

- Et le père ?

- Quel père ?

- Qui selon vous pouvait être cet homme avec qui Mme Rosemary aurait eu une liaison ?

- Mais enfin, Georges, vous ne vous souvenez pas de l’histoire racontée par Mr Nelson ? C’est pourtant clair. L’ingénieur de la mine vivait un amour impossible avec une femme mariée, ils se seraient retrouvés chez Betty… qui connaissait Rosemary, et qui devait rester à la mine pour elle. Pourquoi cet ingénieur aurait-il sacrifié sa vie pour Kévin s’il ne leur avait pas du quelque chose, à lui et à sa femme ?

- Vous pensez donc comme moi que Brian Mac Gregor était votre père ?

- Tout concorde… quand j’ai rencontré Mr William Mac Gregor, peut-être mon grand-père, je croyais que c’était l’oncle William. Il avait commencé par entrer dans une colère noire à cette éventualité, visiblement, il ne portait pas la famille André dans son cœur !

- Il y a quand même quelque chose de curieux… le divorce avait déjà cours dans le milieu, les familles étant de rang et de fortunes équivalentes, Mme Rosemary aurait pu divorcer, se marier avec Mr Brian et ils vous auraient gardée.

- Je préfère voir ça plus tard. Pour l’instant, allons voir Mme Legrand.

Candy tient toujours le livre, sa main tremble… avoir été ainsi trahie dès sa petite enfance ! Et savoir qu’Annie elle aussi avait été trahie, puisqu’elle aurait pu grandir auprès d’une grand-mère aimante ! Quel était ce destin qui s’acharnait contre elles ? Pourquoi ses parents n’avaient-ils pas eu le courage de leurs actes ?

Elle trouve quand même du réconfort à une pensée. Le souvenir qu’elle a gardé de Mr William Mac Gregor est ému : il y avait une complicité qui s’était créée entre eux… le même humour, le même caractère impétueux… cette volonté qu’avait eue Mr Mac Gregor de garder Mina, sa chienne, envers et contre tous lui avait rappelé la maison Legrand et le collège de St Paul, quand elle dissimulait Capucin. Oui, si Mr Mac Gregor avait été son grand-père, même à son insu, elle en était fière. Plus fière que de la lâcheté présumée de ses parents

A suivre...

© Helena 2006