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L'assistant préféré du père Noël
par Dinosaura
CHAPITRE 1
Le petit tortillard suivait son chemin immuable à travers la
campagne enneigée. Un mince filet de fumée
s'échappait parfois de sa grosse cheminée. Il traversait
une forêt de sapins en carton où des ours coiffés
de bonnets rouges hochaient infatigablement la tête en observant
des pingouins qui patinaient sur une jambe sans jamais se reposer.
Debout dans la rue, un jeune homme regardait ce décor de
noël avec un sourire. Grand et bien bâti, son long manteau
noir était coupé à la dernière mode. Une
écharpe bleu ciel égayait sa tenue, accompagnée
d'un feutre noir profondément enfoncé sur les yeux, ou
plutôt sur les lunettes de soleil qu'il portait malgré le
temps gris et couvert de Chicago.
« Je ressemble à un des Blues
Brothers ! » Songea-t-il en voyant son reflet dans la
vitrine du magasin. Amusé par cette idée, son sourire
s’accentua, tandis que des éclats de voix attiraient son
attention.
« Tu es encore en retard, Harold ! Si tu n’étais pas mon beau-frère...
- Si tu ne payais pas si mal, tu ne serais pas obligé de faire appel à moi !
- Je te paye pour ce que tu mérites ! Tu es sensé
être le Père Noël, et tu n’es pas
là ! Les enfant t’attendaient il y a plus d’une
heure.
- Ils attendent depuis onze mois, ils ne sont pas à une petite
heure près, répondit l’autre avec un rire
gras. »
Son interlocuteur s’avança vers lui pour humer son haleine.
« Tu as encore bu ! S’exclama le plus
âgé des deux. Tu ne vas pas recevoir les enfants dans cet
état !
- J’avais besoin de me réchauffer et de me donner du
courage avant d’affronter toute cette marmaille ! Ne joue
pas les pères la vertu, tu as besoin de moi.
- J’ai besoin d’un Père Noël, pas de toi.
N’importe qui pourrait faire mieux que toi ! Rentre chez toi
et ne reparais plus dans mon magasin à moins d’être
sobre ! »
Ce dialogue amusait beaucoup le passant vêtu de noir qui se
serait cru au théâtre. Il aurait volontiers suivi le reste
de la conversation entre les deux hommes si un picotement dans la nuque
ne l’avait mis sur ses gardes. Il avait depuis longtemps appris
à reconnaître ce signe avant coureur et avait
développé une sorte de sixième sens dont il ne
pouvait que se louer.
Il reporta son attention sur les images de la rue
reflétées par la vitrine et n’eut aucune peine
à distinguer les deux adolescentes qui se tenaient sur le
trottoir d’en face. Elle se chuchotaient quelque chose à
l’oreille en faisant des gestes dans sa direction. L’une
des deux prit même son téléphone portable et
composa un numéro avec excitation pendant que l’autre
faisait de grands signes à un groupe de jeunes attablés
dans un café tout proche. Heureusement, ceux-ci ne comprirent
pas ce que leur amie essayait de leur dire et les deux jeunes filles se
précipitèrent dans l’établissement pour
expliquer de vive voix ce qui les surexcitait. Cela laissait quelques
minutes de répit au jeune homme. Habitué aux
décisions rapides, il pénétra dans la boutique de
jouets.
Le vieil homme propriétaire du magasin contemplait l’air
désolé le costume de Père Noël posé
sur le comptoir.
« Excusez-moi, demanda l’homme. Avez-vous une sortie par l’arrière du magasin ? »
Le vieux monsieur se tourna vers lui et le regarda interloqué.
« Il y a une porte pour les livraisons, oui, mais elle donne
dans une impasse. On y accède par la rue principale, là
où donne aussi l’entrée. »
L’inconnu jura entre ses dents. Il ne lui restait plus beaucoup
de temps pour trouver une solution. Son visage s’éclaira
soudain en apercevant le costume rouge.
« Je vous propose un marché, dit-il. Dans deux
minutes, une horde de gamines en furie va se précipiter dans
votre boutique. Dites-leur que je suis sorti par
l’arrière, et je tiens le rôle de votre Père
Noël jusqu’à ce soir ! »
Une lueur de méfiance s’alluma dans les yeux du
commerçant. Cet homme bizarre ne lui inspirait qu’une
confiance très limitée. D’un autre
côté, il se retrouvait à deux jours de Noël
sans le moindre Père Noël alors que des centaines
d’enfants passaient devant son échoppe...
Qu’avait-il à perdre ? Il tendit le costume à
l’homme vêtu de noir qui s’engouffra aussitôt
dans l’arrière boutique pour se changer.
Il en était encore à se demander s’il avait eu
raison de faire confiance à cet inconnu, qu’une bande
d’adolescentes fébriles entrait dans sa boutique en
piaillant comme des poussins qui auraient perdu leur mère. Leur
mine défaite exprimait leur déception quand elle
constatèrent qu’il était seul.
« Où est-il ? Demanda l’une d’elle sans préambule.
- Qui cela ?
- L’homme qui vient d’entrer ! Terrence Granchester !
- Je ne sais pas qui c’est. Mais un homme est venu il n’y a
pas une minute. Il est sorti par l’entrée de
service. »
Avec une exclamation de soulagement, les jeunes filles se
précipitèrent vers le comptoir avec la ferme intention de
passer dans la réserve, mais le vieil homme les arrêta.
« Doucement jeunes filles ! Où vous
croyez-vous ? C’est chez moi ici et la réserve du
magasin est interdite au public !
- Vous ne comprenez pas, supplia une petite blonde boulotte. Nous devons le rattraper...
- De toute façon, la sortie arrière débouche sur
une impasse. Votre homme est obligé de repasser par la rue
principale. C’est sans doute ce qu’il a fait pendant que
vous vous précipitiez ici. »
Une clameur désolée s’éleva comme
poussée par une seule voix et les jeunes filles sortirent aussi
vite qu’elles étaient entrées, sans un mot de
remerciement. Le propriétaire du magasin les regarda jeter des
regards en tous sens, à la recherche de leur proie. Très
amusé, il songea que finalement, même s’il
n’avait pas dégoté le meilleur Père
Noël de la ville, il avait sans doute fait une bonne action en
permettant à l’homme d’échapper à ses
admiratrices.
Méconnaissable, celui-ci sortait de l’arrière boutique en ajustant sa fausse barbe.
« Elles sont parties ? Demanda-t-il avec un coup d’oeil autour de lui.
- Oui, comme une volée de moineaux. Ce genre de mésaventures vous arrive souvent ?
- Assez, oui. D’habitude je réussis à m’en
sortir seul, mais aujourd’hui... Je vous dois des remerciements
monsieur... ?
- MacMillan, répondit le vieil homme. Vous êtes
célèbre alors ? Vous êtes une vedette du rock
au quelque chose comme çà ? »
Terrence trouvait plutôt rafraîchissant de rencontrer une
personne qui ne semblait pas le connaître et n’était
pas impressionnée par sa célébrité. Ce
MacMillan lui était de plus en plus sympathique, même
s‘il n‘avait pas l‘air de savoir que le rock
n‘était plus à la mode depuis de nombreuses
années.
« Mon nom est Terrence Granchester. Je suis acteur, corrigea-t-il.
- Ah bon ? Ne soyez pas vexé, mais je ne vais pas au
cinéma et la télévision m’ennuie, alors...
- Je ne vous en veux pas Monsieur MacMillan. Vous m’avez
tiré d’un mauvais pas, à moi de vous rendre la
pareille. Dites-moi ce que doit faire un Père Noël. Nous
sommes à deux jours de Noël, votre magasin de jouets
devrait être plein d’enfants. Où
sont-ils ? »
Le commerçant poussa un soupir et désigna d’un
mouvement de tête résigné le grand magasin de
l’autre côté de la rue.
« Vous n’êtes pas obligé de faire
çà, vous savez. Je n’engage mon beau-frère
Harold que parce qu’il en a besoin. Depuis que cette grande
surface a ouvert, mes affaires sont loin d’être
florissantes. Mais si vous voulez attendre que ces gamines se soient
lassées de vous courir après, je serais ravi que vous me
teniez compagnie.
- Un marché est un marché, Monsieur MacMillan. De toute
façon, je préfère être là
qu’enfermé dans ma chambre
d’hôtel. »
Une étrange connexion s’était établie entre
les deux hommes. Le vieux commerçant désabusé et
la jeune vedette auréolée de succès. Tous deux
restèrent à discuter pendant les heures qui suivirent,
sans considération d’âge ou de statut social,
rarement interrompus par les quelques clients qui
pénétraient dans la boutique, sans doute
égarés.
Seuls trois ou quatre enfants s’approchèrent du nouveau
Père Noël pour lui dévoiler leur désir secret
en matière de cadeaux. Un petit garçon d’à
peine trois ans fut même impressionné au point de
s’oublier sur le magnifique costume rouge, arrachant une grimace
à l’acteur qui sentit son pantalon s’inonder. La
mère se confondit en excuses, mais le mal était fait et
MacMillan arborait un sourire narquois.
« Vous avez été baptisé !
Maintenant vous êtes un vrai Père
Noël ! »
La nuit tombait et le dénommé Granchester
commençait à avoir sérieusement chaud sous son
costume. Il observait l’air absent le mouvement de la rue. Son
esprit était ailleurs, auprès de celle qu’il allait
bientôt retrouver. Malgré son assurance de façade,
il ne pouvait empêcher son coeur de battre la chamade en songeant
à l’entrevue qui l’attendait. Obsédante, la
même question le taraudait depuis des jours : Et si elle le
repoussait ? Et si elle n’éprouvait plus pour lui les
sentiments d’autrefois ?
Des tiraillements sur sa veste le tirèrent de ses
réflexions et il baissa les yeux vers une petite fille
d’à peine cinq ans qui le fixait de ses immenses yeux
couleur de saphir. Se rappelant pourquoi il était là, il
se pencha vers elle.
« Bonjour petite, dit-il de sa voix la plus grave. Tu veux me demander quelque chose ?
- Est-ce que tu es le vrai Père Noël ? »
Le jeune acteur sourit mais en observant la mine sérieuse et les
sourcils froncés de l’enfant il devina que la question
cachait plus de choses qu’elle n’en révélait.
Il entraîna la petite fille vers le grand fauteuil doré
qui était sensé lui servir de siège au milieu du
magasin, de manière à être bien visible de la rue.
« En voilà une curieuse question pour une aussi jolie petite fille. Pourquoi demandes-tu cela ?
- Parce que d’habitude c’est Monsieur Harold qui se
déguise avec ce costume. Mais je sais bien que c’est
lui : Il sent toujours le whisky. Toi tu sens bon, mais
quelqu’un a fait pipi sur ton pantalon. »
Terrence réprima un éclat de rire et chercha parmi les
rares clients présents lequel pouvait bien être le
père ou la mère de cette enfant à la langue bien
pendue. Aucun des adultes ne faisait attention à eux.
« Tu n’es pas obligée de t’asseoir sur
mes genoux si tu ne veux pas, affirma-t-il. Dis-moi plutôt ton
nom et ce que tu voudrais que je t’apporte comme
cadeau. »
La gamine hésita puis se hissa sur la jambe sèche en prenant bien soin de ne pas toucher l’autre.
« Je m’appelle Tess et je sais déjà que
j’aurai un vélo. Pourquoi tu ne veux pas me
répondre ?
- Tu poses la même question chaque fois que tu rencontres le Père Noël ?
- Non, seulement à toi. Dans le magasin en face il y aussi un
Père Noël, mais je n’ai pas pu lui parler parce que
les enfants des employés ne doivent pas le déranger. Il
est là pour les clients, expliqua l’enfant comme si elle
récitait une leçon bien apprise. Çà
m’est égal parce que ce n’est pas le vrai, de toute
façon. »
La fillette avait l’air résolue. Elle secoua ses longs
cheveux bruns et le regarda dans les yeux, déterminée
à obtenir sa réponse. Sans conteste, elle avait du
caractère !
« Très bien, concéda le jeune homme
amusé. Tu as l’air d’une petite fille très
intelligente, alors je ne vais pas te mentir. Le Père Noël
est trop occupé en cette période pour rester toute la
journée assis dans un magasin à écouter des
enfants lui dire ce qu’il sait déjà. C’est
pourquoi il envoie des assistants et moi, je suis son assistant
préféré. »
La gamine penchait la tête de côté, visiblement déçue, et un profond soupir lui échappa.
« Tant pis, dit-elle en essayant de descendre du genou où elle était assise.
- Hé, une minute ! Tu ne me crois pas ? Je vais te
prouver que je dis la vérité. Je sais que tu auras un
vélo pour Noël, mais je sais aussi que tu voulais autre
chose, sinon tu ne chercherais pas à rencontrer le Père
Noël. »
La fillette ouvrait de grands yeux et ne bougeait plus. Terrence
comprit qu’il avait visé juste. Très
impressionnée par cet « assistant » qui
savait ce qu’elle n’avait jamais dit à personne, la
petite avoua :
« A l’école, les autres filles ont un papa pour
leur apprendre à faire du vélo. Moi je n’en ai pas,
alors, qui est-ce qui va me montrer ? Tu n’as
qu’à dire au Père Noël que s’il
m’apporte un vélo, il doit aussi apporter un fiancé
pour ma maman. »
La logique enfantine sidérait le jeune homme, mais
l’amusait aussi. Pourtant il sentait qu’il était en
train d’aller trop loin en donnant de faux espoir à la
petite fille. Elle n’était pas la première à
avoir des parents séparés, et il était bien
placé pour savoir qu’un beau-père ou une
belle-mère n’était pas toujours ce qu’on
pouvait trouver de mieux. La seconde femme de son père
l’avait détesté dès le premier regard et lui
avait fait vivre l’enfer pendant toute son enfance.
« Tu sais Tess, c’est à ta maman de
décider si elle veut se remarier ou pas. Personne ne peut la
forcer, ni toi, ni moi, ni même le Père Noël.
- Alors je préfèrerais une poupée Jennifer, mais Maman a dit que c’était trop cher.
- Je peux en parler avec ta maman, où est-elle, demanda Terrence en regardant autour de lui.
- Elle travaille. Aujourd’hui je suis avec ma tata parce que la nounou est malade.
- Et où est ta tante ? »
L’enfant eut un geste vague qui désignait la rue et l’acteur fronça les sourcils.
« Ta tante sait que tu es ici ? »
Dépassé par le événements, il imaginait
déjà la femme affolée qui devait chercher
l’enfant partout. Peut-être avait-elle alerté les
agents qui risquaient de débarquer d’un instant à
l’autre. Il préférait pourtant cela
qu’imaginer la petite fille perdue.
A l’instant où il songeait à ce qu’il
pourrait faire, une femme hagarde se rua dans la boutique et se
précipita vers eux en criant.
« Tess ! Mais pourquoi es-tu partie, ma
chérie ? Tu devais rester à la garderie du magasin
jusqu’à ce que j’ai fini mon travail !
- Je voulais voir le Père Noël tante Annie. »
La dénommée Annie s’intéressa alors à
cet inconnu qui tenait sa nièce sur ses genoux, et posa sur lui
un regard méfiant. Il ressemblait à tous les autres
intérimaires qui peuplaient les rues de leurs costumes rouges en
cette période de fête, mis à part ses yeux. Ils
étaient d’un bleu profond, une couleur rare qu’elle
n’avait pas vue souvent, sauf chez Tess et...
Terrence Granchester de son côté était heureux que
l’épaisse barbe de coton dissimule son visage. Annie ne
pouvait pas voir la stupéfaction qui marquait ses traits. Lui
l’avait parfaitement reconnue. Elle avait changé de
coiffure, mais sa beauté tranquille n’était pas de
celles qu’on oublie. Il ouvrit la bouche pour lui parler puis se
ravisa. Déjà la jeune femme prenait Tess dans ses bras et
s’éloignait. Elle se retourna pourtant vers lui,
hésita... Finalement elle secoua la tête comme pour
chasser une idée importune et sortit. Terrence la vit traverser
la rue et entrer dans le grand magasin sur le trottoir d’en face,
celui qui faisait tant de tord au brave MacMillan, pendant que
l’enfant lui faisait au revoir de la main.
« Et bien, mon jeune ami, dit le vieil homme en
s’approchant, vous avez l’air bien songeur. On dirait que
vous avez vu un fantôme.
- En quelque sorte...
- Quelqu’un d’aussi célèbre que vous a
sûrement autre chose à faire que de tenir compagnie
à un vieil homme. Je vais vous appeler un taxi.
- J’avais des projets, oui, marmonna l’acteur. J’ai
bien l’impression qu’ils viennent de voler en
éclat... »
MacMillan le regarda disparaître dans l’arrière
boutique sans comprendre ce qu’il voulait dire, mais
n’insista pas.
Préoccupé, Terrence Granchester retira son costume de
Père Noël d’un jour pour revêtir ses habits de
ville. Les paroles de la petite fille ne cessaient de tourner dans sa
tête. Sa Tante ? Elle avait dit qu’elle était
en compagnie de sa tante... Mais Annie était orpheline, comme...
Elle n’avait ni frère ni soeur et la personne qui se
rapprochait le plus d’une soeur pour elle était...
Candy ! Non c’était impossible ! Candy
n’avait pas d’enfant...
Et pourquoi pas ? Parce qu’il l’avait trouvée
dans l’annuaire sous son nom de jeune fille ? Elle pouvait
très bien vivre avec un homme sans être mariée, ou
alors avoir divorcé. Tant de choses peuvent se passer en six
ans...
Il sortit de la réserve comme le taxi arrivait et klaxonnait
pour signaler sa présence. Terrence serra chaleureusement la
main de MacMillan en le remerciant encore pour son aide. Avant de le
quitter il demanda :
« Dites-moi, Monsieur MacMillan, qu’est ce qu’une poupée Jennifer ? »
Le commerçant émit un grognement de mépris et
désigna d’un mouvement de tête le mur qui se
trouvait derrière lui où étaient exposées
des dizaines de boites de taille et de couleur différentes.
« Si vous voulez mon avis, c’est un pur produit
commercial créé de toute pièces pour vendre de la
cochonnerie ! »
Comme le jeune homme n’avait pas l’air de comprendre où il voulait en venir, il expliqua :
« Au départ, c’est juste une poupée qui
parle. Qui chante plutôt. Mais là où
çà devient grave, c’est qu’il faut des
accessoires. Et là, croyez-moi, les parents peuvent pleurer. Il
y a les amis de Jennifer, les animaux de Jennifer, la maison de
Jennifer, la voiture de Jennifer, sans parler des costumes et des...
- C’est bon j’ai compris, dit Terrence en riant. N’en
jetez plus ! J’espère que nous aurons
l’occasion de nous revoir...
- Moi aussi. Vous êtes très sympathique pour une vedette.
Si vous voulez un conseil, achetez plutôt un vrai jouet : Un
train, un vélo...
- Peut-être un jour... Quand j’aurai des enfants... Au
fait, MacMillan, qui vous a appris à faire du vélo ?
- Mon père, bien sûr. Et vous ?
- Moi aussi, mais je crois bien que je l’avais oublié... »
L’acteur monta dans le taxi qui l’attendait puis disparut
après un dernier signe de la main et le commerçant
retourna à ses affaires, très content de sa
journée, même si ce jeune homme n’avait pas
l’étoffe pour faire un bon Père Noël. Il se
laissait trop facilement démonter par les enfants !
CHAPITRE 2
Une demi heure plus tard le taxi s’arrêtait devant un
immeuble modeste de la banlieue de Chicago mais personne n’en
descendit. Il resta là tous feux éteints à
attendre.
Le chauffeur tenta d’alimenter la conversation avec son client,
mais celui-ci lui fit comprendre d’un ton sec qu’il ne
souhaitait pas être dérangé. Comme le compteur
continuait à tourner et que son étrange passager lui
avait promis de le payer au double du tarif habituel, le conducteur
n’insista pas et se perdit lui aussi dans ses pensées.
Au bout d’une longue attente, un autobus stoppa à
l’arrêt tout proche et déchargea son lot habituel de
passagers qui rentraient chez eux après leur journée de
travail. Parmi eux se trouvait une jeune femme blonde, les bras
chargés d’un énorme sac de provisions, suivie par
une petite fille qui s’amusait à sauter dans les tas de
neige qui bordaient le trottoir. La femme passa près d’eux
sans leur prêter attention. Soudain l’enfant glissa sur une
plaque de verglas et tomba lourdement sur les fesses. Elle appela sa
mère en pleurant. Celle-ci posa ses courses et releva la petite.
Elle épousseta son manteau couvert de neige et la consola
d’un baiser. Un réverbère tout proche
éclairait la scène et Terrence enregistrait chaque
détail. Puis la jeune femme reprit son sac de provisions et
regagna son immeuble en tenant sa fille par la main. Quelques minutes
plus tard une lumière s’alluma dans un appartement du
cinquième étage.
Alors seulement le taxi redémarra et l’acteur se fit
conduire à son hôtel où il s’enferma dans sa
chambre. Il appela le service d’étage pour commander
à dîner mais toucha à peine à ce qu’on
lui apporta. L’esprit tourmenté, il se laissa submerger
par ses souvenirs.
Sa mémoire l’entraîna bien des années plus
tôt, vers une période de sa vie qu’il maudissait
à l’époque et que pourtant il regrettait
aujourd’hui. En ce temps-là, il traînait son
adolescence sans avoir d’autre but que d’atteindre sa
majorité et se libérer enfin de l’autorité
de son père, l’intraitable Duc de Granchester.
Cette année-là il avait fait en cachette un voyage
éclair à New York pour voir sa mère. Mais la
grande actrice Eléonore Baker l’avait renvoyé vers
l’Angleterre et sa misérable existence. Furieux,
déçu, il avait repris le premier avion pour Londres, et
était retourné dans ce collège sinistre où
son père l’avait enfermé depuis des années.
Occupé à se lamenter sur son sort, il n’avait
prêté aucune attention à la date et était
arrivé en plein milieu de la triste fête que donnait
chaque année le collège à l’occasion de la
Saint Sylvestre pour les rares pensionnaires qui ne rentraient pas chez
eux pour les fêtes de fin d’année.
Une surveillance constante des professeurs, pas de slows, pas de
lumière tamisée et bien sûr, pas d’alcool.
Bref, la soirée la plus ennuyeuse qu’il puisse imaginer.
Déboussolé, il était sorti sur la terrasse pour
rassembler ses idées et c’est alors qu’il
l’avait rencontrée.
Il ne savait pas comment elle était arrivée sur cette
terrasse mais elle apparut soudain dans sa vie, emmitouflée dans
un châle trop léger pour l’hiver britannique. Elle
avait l’air si fragile mais il comprit vite qu’elle
n’était pas fille à se laisser impressionner. Il
s’était moqué d’elle et elle lui avait
répondu du tac au tac. Il détestait l’idée
qu’elle ait pu le voir à un moment où il se sentait
aussi vulnérable, mais il était trop tard. Elle
était entrée dans son existence et tout avait
été différent.
Candice Neige André... Elle lui jetait son nom au visage avec
obstination tandis qu’il faisait mine de ne pas s’en
souvenir et l’affublait des surnoms les plus ridicules
qu’il pouvait trouver. Comment avait-elle fait pour prendre
autant de place dans sa vie en si peu de temps ? Terrence
Granchester ne le saurait jamais, mais il ne pouvait plus se passer de
ce petit bout de femme à la langue bien pendue qui prenait un
malin plaisir à se mêler de tout, surtout de ce qui ne la
concernait pas.
Elle semblait insensible aux tentatives de séduction du jeune
homme, trop occupée qu’elle était à pleurer
un ancien soupirant disparu dans des circonstances tragiques. Elle ne
voyait en lui qu’un ami jusqu’à ce qu’il
l’embrasse...
Alors tout s’était accéléré. Leurs
sentiments s’étaient révélés avec une
force à laquelle ils ne s’attendaient ni l’un ni
l’autre. Toutes les occasions leur étaient bonnes pour se
retrouver, s’embrasser, se cajoler... Jusqu’à ce
qu’ils se fassent surprendre dans l’écurie. Candy
était menacée de renvoi et pour lui éviter cette
humiliation, Terrence avait quitté le collège et
était parti pour les Etats Unis, bien décidé
à revenir chercher celle qu’il aimait dès
qu’il aurait réalisé son rêve : devenir
comédien.
Mais le destin en avait décidé autrement. Contre
l’avis de sa famille, Candy était rentrée en
Amérique par ses propres moyens et un an plus tard ils se
retrouvaient par hasard à New York. La jeune femme
s’était inscrite en faculté de médecine et
Terry suivait les cours d’une école d’art dramatique
tout en courant le cachet pour trouver de petits rôles et
subvenir à ses besoins puisque son père lui avait
coupé les vivres.
Ce furent des mois de bonheur parfait et de folle passion. Les deux
amoureux ne se quittaient plus et ne vivaient que l’un pour
l’autre. Jusqu’à ce que le jeune homme
décroche enfin son premier grand rôle. Il était fou
de joie et Candy avec lui mais cela impliquait de longs mois de
séparation puisque le film devait se tourner au Canada et que
Candy, retenue par ses partiels, ne pouvait l’accompagner.
Ils se téléphonaient et s’écrivaient tous
les jours mais la distance était là. Terry se jeta
à corps perdu dans le travail. Il était jeune et le
succès frappait à sa porte. Même si son coeur
appartenait à Candy, il trouvait bien agréable
l’attention dont tous les membres féminins de
l’équipe l’entouraient, y compris sa partenaire,
Susanna Marlowe.
Le réalisateur était content de son travail et le jeune
homme prenait de plus en plus d’assurance. Trop sans doute et ce
fut ce qui le poussa à vouloir réaliser lui-même
une cascade particulièrement difficile. Susanna qui le suivait
en tout abonda dans son sens et persuada le metteur en scène que
leur présence à tous deux ne ferait qu’ajouter au
réalisme de la scène.
Personne n’aurait pu prévoir que le filin de
sécurité qui devait assurer les deux comédiens se
romprait, et ce fut le drame.
Terry essaya de toutes ses forces de retenir sa partenaire, mais elle
ne cessait de hurler et de s’agiter. La sueur de l’effort
trempait sa main et il sentit les doigts de Susanna glisser
inexorablement, puis ce fut la chute. Tout le reste se déroula
comme dans un rêve, ou plutôt un cauchemar. La jeune
actrice fut transportée à l’hôpital de toute
urgence. On parlait de l’amputer d’une jambe. Le
réalisateur ne décolérait pas. Les assurances
prétendaient ne pas verser d’indemnité sous
prétexte qu’il n’avait jamais été
question dans le contrat que les deux acteurs principaux prennent de
tels risques. Susanna s’accrochait à lui comme à
une planche de salut et le suppliait de ne pas l’abandonner. Sa
famille le rendait responsable de l’accident et menaçait
de le traîner en justice car leur fille en pleurs leur avait
avoué qu’il avait passé la nuit
précédente à boire en sa compagnie et que tous
deux étaient trop ivres pour se livrer à des acrobaties
ce jour là. Selon elle, c’était Terry qui avait
insisté pour travailler quand même.
Terrence était perdu et c’est dans ce contexte dramatique
que Candy put enfin le rejoindre. Il avait
désespérément besoin d’elle, de sa douceur,
de son sourire... Pourtant il n’osa pas lui dire ce qui le
bouleversait et Candy elle-même semblait lointaine et
préoccupée.
Bien entendu, il se trouva vite une âme charitable pour informer
la jeune fille du drame survenu peu avant et elle se précipita
à l’hôpital où elle trouva Susanna en pleurs
dans les bras de Terry alors que celui-ci lui avait dit être
retenu sur le plateau.
Jamais le jeune acteur ne s’était senti aussi
misérable que ce jour-là en découvrant la
déception sur le visage de Candy. Il n’aurait pas dû
lui mentir et c’est avec soulagement qu’il accueillit la
demande de Susanna de les laisser seules. Il arpenta le couloir pendant
de longues minutes et bien qu’aucun son n’ait filtré
à travers la porte close, il sut à l’instant
où Candy sortit que sa vie allait prendre un tour tout
différent de ce qu’il avait imaginé.
Elle lui annonça son départ d’un air
détaché, comme si cela avait toujours fait partie de ses
plans. Il aurait voulu la retenir, mais aucun mot ne sortait de ses
lèvres. Après une dernière étreinte il la
laissa sortir de sa vie, aussi brusquement qu’elle y était
entrée, certain que tout était fini.
Ce n’est que plus tard qu’il comprit son erreur. Les
médecins réussirent à sauver la jambe de Susanna.
Même si elle boitait, elle marchait ! Le film put être
terminé moyennant quelques aménagements dans le
scénario et remporta un franc succès. La carrière
de Terry était lancée.
Il s’installa bientôt à Los Angeles avec Susanna. La
presse les désignait comme le couple le plus glamour
d’Hollywood. Pourtant tout cela n’était qu’une
façade. La jeune femme se révéla vite la femme la
plus exigeante et la plus capricieuse que la terre ait jamais
porté. Elle n’était heureuse que lorsque
l’univers tournait autour de sa petite personne. L’amour
qu’elle disait éprouver pour Terry s’apparentait
plus à la fierté qu’on éprouve en exhibant
un trophée conquis de haute lutte.
Indifférent à tout, Terry laissait faire. Chaque jour qui
passait la douleur d’avoir perdu Candy se faisait plus
insistante. Il se noya un temps dans l’alcool, collectionna les
conquêtes féminines autant que les films à
succès. Seul l’amour de son métier le sauva. Il
renonça à l’alcool et se consacra
entièrement au cinéma. Il enchaînait film sur film
avec une préférence pour ceux qui
l’éloigneraient de chez lui le plus longtemps possible.
Lasse de ses absences et de ses infidélités, Susanna
devint de plus en plus acariâtre, jusqu’à ce
qu’elle finisse par l’accuser de l’avoir
frappée. La presse en fit ses choux gras quelques semaines,
attirant à la jeune femme la sympathie de nombreux admirateurs
dont l’un finit par retenir son attention. Un jour en rentrant
d’un tournage éprouvant, Terry se trouva face à une
Susanna déterminée qui lui annonça de but en blanc
qu’elle voulait le quitter. Sans hésitation il reprit la
valise qu’il n’avait même pas défaite et
partit s’installer à l’hôtel où il
dormit pendant trois jours d’affilé du meilleur sommeil
qu’il ait eu depuis des années.
A son réveil, une seule pensée occupait son esprit :
Libre ! Il était libre de faire enfin ce qu’il
voulait de sa vie et ce qu’il voulait c’était
retrouver celle qui hantait ses rêves depuis toujours. Celle
qu’il avait cherché en vain dans toutes les femmes qui
passaient dans son existence ou dans son lit, la seule qui ait fait
battre son coeur : Candy ! Il était prêt
à tout pour la retrouver et la reconquérir.
Quel imbécile il avait été ! Alors que lui se
morfondait chaque jour un peu plus de l’avoir perdue, la belle
n’avait pas été aussi bête ! Elle
était loin d’éprouver les mêmes tourments
puisqu’elle l’avait vite remplacé et qu’elle
avait eu un enfant. Peut-être était-ce ce qu’elle
avait eu tant de mal à lui dire quand elle était venue le
rejoindre sur le tournage : Qu’elle avait rencontré
quelqu’un d’autre ?
Elle lui avait déjà laissé entendre à
plusieurs reprises qu’elle ne se sentait pas à
l’aise parmi les gens du spectacle qu’il
fréquentait. Sans doute préférait-elle un homme
qui aurait les même centres d’intérêt
qu’elle, un médecin peut-être ?
Terry se traita d’idiot. Il avait été si heureux en
trouvant l’adresse et le numéro de téléphone
de Candy sous son nom de jeune fille ! Qu’avait-il
imaginé au juste ? Qu’elle avait arrêté
sa vie au moment de leur séparation ? Qu’il lui
suffirait de sonner à sa porte pour qu’elle lui tombe dans
les bras ? Quelle folie ! Il aurait pourtant bien dû se
douter que rien ne se déroulait jamais comme il le souhaitait.
Depuis toujours il n’avait jamais rien obtenu de ce qu’il
avait désiré, à part sa carrière
d’acteur, et il s’était battu pour cela. Cette fois
le coup était trop dur et Terry ne savait plus où il en
était.
Quand il l’avait vue tout à l’heure, son coeur avait
bondi comme autrefois. Malgré l’enfant, malgré sa
nouvelle vie sans lui, il n’avait pas pu s’empêcher
de sourire, comme autrefois chaque fois qu’elle apparaissait. Et
elle était encore plus belle que dans son souvenir !
Non ! Il n’avait pas fait le voyage jusqu’à
Chicago pour repartir la tête basse comme un chien battu. Il
était venu pour parler à Candy et il lui parlerait !
Et puis il avait une petite fille qui croyait au Père Noël
et il ne pouvait pas la décevoir.
Le vieux MacMillan venait à peine d’ouvrir son magasin en
ce matin du 24 décembre quand il vit entrer son nouvel ami.
« Tiens ! S’exclama-t-il. Vous avez pris goût au métier de Père Noël ?
- Non, pas vraiment, répondit l’acteur en souriant. Je
suis venu vous acheter une de ces fameuses poupées Jennifer et
tous les accessoires que vous pourrez me proposer.
- Vous voulez sauver mon chiffre d’affaire à vous tout
seul ? Si c’est pour me remercier de vous avoir rendu
service hier, je vous assure que ce n’est pas la peine.
- Vous n’y êtes pas, Monsieur MacMillan. Je veux juste
faire un cadeau à une petite fille qui n’a pas de papa
pour lui apprendre à faire du vélo. »
Le commerçant pencha la tête et observa son interlocuteur avec attention.
« Pourquoi ne lui apprenez-vous pas, vous ?
- Je ne suis pas son père... »
Le jeune homme ne finit pas sa phrase et resta figé un court
instant. La couleur se retira de son visage et ses mains se mirent
à trembler. Puis il reprit ses esprits et griffonna nerveusement
l’adresse de son hôtel sur une carte qu’il tendit
à MacMillan.
« Je compte sur vous pour faire livrer tout cela à
mon hôtel. Je laisserai des instructions pour que vous soyez
réglé. Je dois m’en aller... J’ai quelque
chose à vérifier... »
Aussi vite qu’il était entré, Terrence Granchester
sortit de la boutique et s’engouffra dans le taxi qui
l’attendait pour se faire conduire à la
bibliothèque municipale. Là il éplucha les
archives des journaux locaux jusqu’à ce que
l’employé vienne lui faire remarquer que
l’établissement allait fermer plus tôt en cette
veille de Noël. Peu importait à Terry; il avait
trouvé ce qu’il cherchait et commençait à se
faire une idée assez précise de ce qui
c’était passé.
Il trouva sa chambre d’hôtel encombrée d’un
énorme tas de paquets soigneusement emballés. Sur le
dessus trônait une poupée de chiffons sur laquelle
MacMillan avait épinglé un mot :
« Cà c’est une vraie poupée !
C’est un cadeau de ma part pour la petite fille à laquelle
vous pensez. Bonne chance et Joyeux Noël. »
CHAPITRE 3
Comme tous les enfants du monde, Tess se réveilla très
tôt ce matin-là. Elle se précipita dans le salon
pour vérifier si le Père Noël avait laissé sa
moisson de cadeaux au pied du sapin avant d’aller secouer sa
mère en poussant des cris de joie.
Avec un sourire attendri, Candy observa sa fille déballer les
nombreux paquets. Des livres, des DVD, des jeux de
société et bien sûr le fameux vélo rouge
agrémenté de deux petites roues supplémentaires
pour l’empêcher de verser. Plus elle grandissait et plus
elle ressemblait à son père. La couleur des yeux, des
cheveux... Mais Candy avait tiré un trait sur le passé.
Désormais son seul univers se limitait à sa fille et
à son travail. Elle prépara le petit déjeuner
auquel l’enfant toucha à peine, trop impatiente de
retrouver ses nouveaux jouets. Dès qu’elle fut
lavée et habillée, Tess retourna dans le salon pour
s’amuser pendant que sa mère se préparait à
son tour. Aujourd’hui était son seul jour de congé
et elle devait reprendre son service à l’hôpital
dès le lendemain. Jour ne Noël ou pas, Candy était
bien décidée à mettre son appartement en ordre.
Occupée à remplir une machine à laver elle
n’entendit pas la sonnette de la porte d’entrée.
Ce fut Tess qui alla ouvrir. Elle se trouva devant un homme qui lui
souriait et le plus gros tas de cadeaux qu’elle ait jamais vu.
Attirée autant par l’un que par l’autre, son regard
allait de l’étranger aux paquets sans qu’elle sache
quoi dire.
« Bonjour Tess, dit gentiment l’inconnu en se penchant
vers elle. Je m’appelle Terry. Je suis venu voir ta maman et
t’apporter quelque chose de la part du Père
Noël. »
Un grand sourire éclaira le visage de l’enfant.
« C’est son assistant préféré qui t’envoie ?
- En quelque sorte, oui. »
Intriguée par le calme soudain de sa fille, Candy jeta un coup
d’oeil au salon sans la trouver. Les bruits de voix la
guidèrent vers l’entrée et elle crut que le souffle
allait lui manquer quand elle reconnut celui qui se trouvait là,
occupé à entasser dans sa minuscule entrée un
nombre incalculable de boîtes.
La panique s’empara d’elle en comprenant ce qui
était en train d’arriver et tout en elle se
révoltait à cette idée. D’une manière
ou d’une autre, Terry avait appris l’existence de Tess et
il venait la lui prendre. Cette montagne de cadeaux n’avait
d’autre but que de s’attirer les bonnes grâces de
l’enfant et il était en train de réussir. Elle
devait trouver une solution pour contrecarrer ses plans.
« Bonjour Candy, dit la voix profonde de Terry, la tirant de ses réflexions.
- Bon... Bonjour Terry, articula-t-elle péniblement. Je... Suis très surprise de te voir...
- Il est venu pour toi, Maman, affirma Tess en apportant le dernier
paquet. Et pour m’apprendre à faire du vélo !
N’est-ce pas Terry ?
- Bien sûr Tess. J'en serais ravi. »
Fort de ses nouvelles certitudes, il couvait l’enfant d’un
regard attendri qui affola Candy à l’idée de les
laisser partager un moment aussi intense. Elle s’insurgea :
« C’est hors de question ! Il fait beaucoup trop froid pour sortir aujourd’hui !
- Mais Sarah est dehors avec son papa ! Protesta la fillette. A
quoi çà sert que j’ai un nouveau vélo si je
ne peux pas l’essayer ! »
Terry répugnait à contrarier Candy alors qu’il
venait juste de la retrouver, et contester ses décisions vis
à vis de sa fille n’était pas le meilleur moyen de
s’attirer ses bonnes grâces, mais la tension entre eux
était si lourde qu’il remerciait Tess de lui fournir
l’occasion de briser la glace.
« Il ne fait pas si froid, plaida-t-il, et les rues sont bien dégagées... »
Un bruit de cavalcade retentit dans l’escalier et la petite
Sarah, la fille des concierges apparut sur le palier en criant.
« Tess ! Viens voir mon nouveau vélo ! Papa
m’apprend à en faire, il te montrera aussi si tu
veux !
- C’est pas la peine, Sarah. Terry est venu pour m’apprendre. »
Une intense fierté vibrait dans la voix de la fillette qui
glissa sa petite main dans celle du jeune homme pendant qu’elle
toisait avec satisfaction sa compagne de jeu. A peine plus
âgée que Tess, celle-ci fixait avec de grands yeux
l’homme qui se tenait à côté de son amie.
« Dépêche-toi alors, conclut-elle. On va faire la course !
- Je peux y aller Maman ? Supplia Tess en se tournant vers sa
mère. S’il te plait... Dis oui, dis oui, dis
oui... »
Vaincue Candy haussa les épaules et abdiqua.
« D’accord. Viens t’habiller chaudement. Et je
descends avec vous, ajouta-t-elle en jetant un regard de défi
à Terry. »
Celui-ci lui dédia un sourire étincelant et
s’avança dans le salon pour charger sur son épaule
la bicyclette qui se trouvait toujours sous le sapin. Il observa le
mobilier modeste mais ne dit rien.
Son regard fut attiré par un cadre en argent posé sur le
guéridon et qui contenait la photo d’un bébé
d’à peine quelques jours. Sur le pourtour étaient
gravés le poids, la taille et la date de naissance
l’enfant, ainsi que ses prénoms.
Il avait l’impression de flotter sur un nuage en descendant les cinq étages chargé du petit vélo.
Quand elle arriva à la loge de la concierge, Candy fut
stupéfaite de le trouver en train de démonter les petites
roues à l’aide d’une clef que lui avait
prêtée le père de Sarah. Elle n’avait jamais
imaginé qu’il sache se servir de ce genre d’outil.
Il lui tendit son manteau d’un geste tout naturel et se mit
à assister Tess dans ses premiers tours de roue. Le
vêtement était chaud sur le bras de Candy et encore
imprégné du parfum de celui qui l’avait
porté. Un étrange faiblesse s’empara de la jeune
femme en observant Terry qui courait à côté de la
petite fille en la tenant pour assurer son équilibre. Il
était si séduisant ! Elle avait oublié
à quel point il était beau, ou plutôt, elle avait
tout fait pour éviter de s’en souvenir. Maintenant
qu’elle pensait avoir enfin réussi, voilà
qu’il revenait pour perturber cet équilibre si fragile.
Candy ferma son esprit aux pensées qui menaçaient de
l’emporter et se concentra pour trouver un moyen de
l’empêcher de réaliser ses projets. La seule chose
dont elle était sûre était qu’elle devait
à tout prix l’éloigner de Tess.
Soudain la petite tomba et Candy se précipita. Quand elle arriva
près de sa fille, Terry l’avait déjà
relevée et essuyait ses mains pleines de neige en souriant.
« Chérie, tu vas bien ? S’inquiéta
la jeune femme. Tu es sûre que tu ne veux pas
t’arrêter ?
- Cà va très bien maman. Je peux le faire,
répondit l’enfant en tendant la main vers sa mère
pour lui signifier de ne plus avancer. »
Les sourcils froncés et cette expression butée sur son
visage... Candy avait l’impression de voir son père... Le
coeur battant la chamade, elle ne résista pas quand Terry lui
fit signe de regagner sa place sur le trottoir. C’était
comme s’il avait soudain pris la direction des opérations
et que cela était normal ! Or il y avait bien longtemps que
la jeune femme ne laissait plus qui que ce soit décider à
sa place de ce qu’elle devait faire !
Madame Jones la rejoignit en souriant devant les efforts des deux
hommes pour suivre le rythme des petites filles qui rivalisaient
d’ardeur dans leur course improvisée. Au bout d’une
demi-heure, son mari Sam était à bout de souffle et
traînait son embonpoint loin derrière sa fille. Madame
Jones battit le rappel de sa petite famille en frappant dans ses mains
et proposa un chocolat chaud, y compris à Tess qui approuva
à grands cris. Très fière d’elle, la gamine
roula seule jusqu’à sa mère. Les joues rouges et le
regard brillant, elle rayonnait de bonheur et une immense vague
d’amour et de fierté gonfla le coeur de Candy. Elle
était si heureuse qu’elle sourit à Terry qui les
rejoignait, à peine essoufflé.
« Je m’occupe des enfants, décréta la
logeuse avec un regard en coin vers l’homme qui était venu
rendre visite à sa locataire préférée. Je
vous ramènerai Tess tout à l’heure, comme cela vous
pourrez discuter tranquillement avec votre ami... »
Le ton appuyé de Mme Jones signifiait aussi qu’elle
espérait un rapport détaillé dès le
départ de l’ami en question. Candy ouvrit la bouche pour
protester, mais la femme avait déjà tourné les
talons et elle se retrouva seule avec Terry. Ne sachant trop que faire,
elle lui tendit son manteau.
« Merci, murmura-t-elle du bout des lèvres. Tess est
folle tu joie. Tu n’étais pas obligé de...
- C’est Noël Candy. Tous les enfants devraient être
heureux le jour de Noël et cela m’a fait plaisir.
- Si quelqu’un t’a vu courir derrière ce petit
vélo, tu peux dire adieu à ton image de marque, siffla la
jeune femme qui cherchait à instaurer une certaine distance.
- Laisse-moi m’occuper de mon image, répondit Terry,
blessé par sa froideur. Par contre, je ne refuserais pas une
tasse de thé... »
Candy ne pouvait faire autrement que d’accéder à sa
demande. Elle gravit aussi vite que possible les étages
jusqu’à son appartement, douloureusement consciente du
regard que le jeune homme posait sur elle.
Il resta dans le salon pendant qu’elle s’affairait dans la
cuisine. La première chose qu’il remarqua fut la
disparition du cadre en argent sur le guéridon. Les
lèvres pincées, il la rejoignit et s’installa
à la table de la cuisine comme s’il était chez lui.
Il ne la quittait pas des yeux pendant qu’elle préparait
le thé. Il attendait qu’elle parle mais Candy se refusait
à prononcer le moindre mot. Finalement elle posa deux tasses sur
la table et s’assit en face de lui. Elle aurait
préféré rester debout mais ses jambes refusaient
de la porter.
Avec un soupir, Terry se décida à rompre le silence si pesant.
« N’as-tu rien à me dire, Candy ? »
Il vit une incompréhensible lueur de panique dans ses yeux
verts. Puis elle se reprit et haussa les épaules en essayant de
prendre l’air dégagé.
« Il n’y a rien à raconter Terry. J’ai continué ma vie, c’est tout.
- Tu pourrais me parler de Tess par exemple ?
- J’ai eu une fille, dit Candy qui sentait l’affolement la
gagner. Je ne vois rien d’extraordinaire
là-dedans. »
Terry la voyait sur la défensive aussi décida-t-il de
reporter à plus tard le sujet de l’enfant. Il devait avant
tout amener la jeune femme à baisser sa garde.
« Dis-moi alors ce que tu fais ici, dans cet appartement.
Pourquoi n’es-tu pas dans le manoir de la famille André
entourée de domestiques pour s’occuper de toi et de la
petite ?
- C’est plus près de mon travail...
- Cesse de raconter n’importe quoi, s’écria Terry
qui commençait à perdre patience. Tu fais partie
d’une des plus riches familles du pays ! Il y a six ans, ton
père n’était jamais aussi fier que lorsqu’il
pouvait t’exhiber à son bras ! Or depuis cinq ans, tu
as disparu de la vie publique, on ne te voit plus nulle part.
C’est comme si tu n'existais plus pour la famille
André ! Si tu avais continué ta vie, comme tu dis,
tu serais médecin à l’heure qu’il est. Tu ne
vivrais pas dans ce minuscule appartement en peinant pour joindre les
deux bouts avec ton salaire d’infirmière.
- Tu m’as l’air bien renseigné. Il est vrai que tu
es un personnage public, n’est-ce pas ? Ce que j’ai
fait depuis six ans ne te concerne pas ! S’emporta Candy.
J’ai pris des décisions et je les ai assumées,
point final !
- Et Tess ? A-t-elle quelque chose à voir
là-dedans ? Pourquoi n’es-tu pas mariée
Candy ? Ta puissante famille n’a-t-elle pas
apprécié que tu ais un enfant sans
père ? »
Candy posa si violemment sa tasse que la moitié du contenu se
répandit sur la table. Elle se leva aussitôt pour trouver
de quoi éponger mais surtout pour dissimuler le tremblement de
ses mains. Elle se doutait que Terry ne la laisserait pas tranquille
tant qu’il n’aurait pas une certitude. Elle inspira
profondément et le regarda droit dans les yeux.
« Tu ne sais pas de quoi tu parles, affirma-t-elle. Je
t’interdis de dire que ma fille n’a pas de
père ! Si lui et moi sommes séparés, cela ne
te regarde pas !
- Bien sûr que si ! Et je sais bien qu’elle a un
père, puisque c’est moi son père ! »
La pâleur de Candy s’accentua encore. Elle resta bouche
bée un moment, puis retrouva le souffle qu’elle avait
perdu comme des taches rouges envahissaient ses joues.
« Toujours aussi prétentieux on dirait, Votre
Grâce ! Tu n’es pas le centre du monde et tu
n’es pas le seul homme dans ma vie ! »
Terry faisait de son mieux pour rester calme mais la réaction de
Candy le dépassait complètement. Pourquoi refusait-elle
de reconnaître l’évidence ? Il prit sur lui
pour lui répondre d’une voix aussi posée que
possible.
« Ne mens pas, Candy. Tess est née en juin, sept mois
après notre séparation. Elle me ressemble ! Elle a
mes yeux, mes cheveux... Son deuxième prénom est
Eléonore, comme ma mère, et elle a le même grain de
beauté qu’elle au coin des lèvres !
- Comment sais-tu que...
- J’ai consulté les rubriques de l’état civil
dans les archives des journaux locaux. Et je l’ai vu sur le cadre
de naissance dans ton salon, avant que tu le fasses disparaître.
Pourquoi l’avoir caché, sinon pour m’empêcher
de le voir ? »
La jeune femme était perdue. Ce qu’elle avait tant
redouté pendant toutes ces années était finalement
arrivé : Terry venait lui réclamer cette fille dont
elle lui avait refusé la paternité. Incapable de se
justifier, elle choisit d’attaquer.
« Et alors ? Tu aurais pu être son père,
c’est vrai, mais je suis sûre que ce n’est pas le
cas. Désolée que tu l’apprennes de cette
manière, mais je ne suis pas meilleure que toi. Pendant que tu
t’amusais avec ta partenaire au Canada, j’avais aussi une
aventure. Tu as raison en pensant que ma famille n’a pas beaucoup
apprécié que je choisisse de garder l’enfant, mais
c’est lui le père de Tess, et pas toi !
- Tu cherches à me blesser Candy, répondit Terry, ébranlé malgré tout. Pourquoi ?
- Parce que tu as perdu tout droit de me demander des comptes le jour où tu as choisi une autre femme.
- Je n’ai rien choisi du tout ! Les circonstances...
- Les circonstances n’ont pas changé, Terry. Nous sommes
séparés et c’est très bien ainsi. Tu
débarques le matin de Noël avec des cadeaux plein les bras
et tu crois que çà suffit pour être un
père ?
- Bon sang Candy ! S’emporta Terry. Laisse-moi au moins te dire...
- Je ne veux pas t’écouter Terry ! Je veux que tu
sortes de ma vie et de celle de ma fille. La meilleure chose que tu
puisses faire pour nous c’est de ne jamais chercher à nous
revoir ! »
Candy semblait au bord de la crise de nerfs et ses cris devaient
s’entendre dans tout l’immeuble. Terry comprit
qu’elle ne l’écouterait pas quoi qu’il dise.
Mais il n’était pas disposé à baisser les
bras, pas maintenant qu’il avait découvert sa fille. Car
malgré les affirmations de la jeune femme, il restait
persuadé d’être le père de Tess. Il se leva
en soupirant et prit son manteau.
« Je suis désolé que tu le prennes ainsi,
Candy. Je comprends que tu ais été surprise de me voir
mais... Tu n’avais pas le droit de me cacher ta grossesse, et tu
ne peux pas me priver de ma fille. Nous devons avoir une longue
conversation toi et moi. Je reviendrai bientôt. J’ai tant
de choses à te dire... »
Mais Candy lui opposait un visage obstinément fermé et
Terry comprit qu’elle n’était pas disposée
à l’écouter aujourd’hui. Le coeur lourd et
tout ce qu’il n’avait pas réussi à dire, il
quitta l’appartement sans se retourner. S’il l’avait
fait, il aurait vu le regard suppliant que la jeune femme lui jetait et
le geste inconscient qu’elle eut comme pour le retenir.
Tandis qu’il descendait l’escalier à pas lourds, il
croisa Tess accompagnée de la concierge qui la ramenait chez
elle. L’enfant se jeta dans ses bras avec une exclamation de
dépit.
« Tu t’en vas Terry ? Je croyais que tu resterais toute la journée avec nous.
- Je dois y aller ma puce. Mais je reviendrai demain si tu veux.
- Oh oui ! Mais pas avant cinq heures parce que je serai chez la nounou comme maman travaille...
- D’accord, à cinq heures alors, répondit Terry dont l’esprit travaillait à toute vitesse.
- C’est moi qui vais la chercher chez sa nounou, intervint Mme Jones. Comptez plutôt cinq heures et demi.
- C’est entendu, approuva le jeune homme avec un grand sourire.
J’ai même une excellente idée : Je viendrai te
prendre ici et nous irons chercher Maman à son travail pour
qu’elle ne soit pas obligée de prendre le bus.
- Tu as une voiture ? Demanda la petite fille ravie. Comment elle est ?
- Très grande ! Elle te plaira, tu verras. »
CHAPITRE 4
Alors même que Terry tentait d’élaborer un plan
savant pour retrouver la place qu’il estimait être la
sienne dans la vie de Candy et de sa fille, la jeune femme de son
côté se torturait l’esprit pour trouver un moyen de
l’éloigner définitivement de leur existence.
Le revoir après si longtemps avait réveillé en
elle une douleur ancienne qu’elle croyait bien avoir
réussi à oublier. Pour rien au monde elle ne voulait
revivre cela ! Plus encore, elle ne voulait pas imposer une telle
épreuve à sa fille. Elle avait appris à ses
dépens qu’on ne pouvait pas avoir confiance en Terry. Tess
ne devait pas traverser la même épreuve.
Candy se replongea dans ses souvenirs douloureux, comme une
thérapie contre son coeur qui battait un peu plus vite chaque
fois qu’elle évoquait l’image de Terry.
Lorsque le jeune acteur avait décroché ce rôle dont
il rêvait, elle avait été la femme la plus heureuse
du monde. Bien sûr cela impliquait une longue séparation,
mais elle savait à quel point Terry tenait à son
rêve. Pour lui elle était prête à tout
supporter; Elle ne s’attendait pas à ce qu’elle
allait endurer à cause de lui...
Depuis le départ de Terry, elle ne se sentait pas en pleine
forme. Elle mit cela sur le compte de leur séparation et sur le
stress de ses examens qui approchaient. D’ailleurs, chaque fois
qu’ils pouvaient se parler, elle se sentait mieux...
Elle passa ses partiels dans un état d’excitation
extrême et lorsque toutes les épreuves furent
terminées, son soulagement fut tel, qu’elle prépara
son départ pour le Canada sur un petit nuage. Elle était
en pleine euphorie quand elle se jeta enfin dans les bras de Terry
à son arrivée à l’aéroport.
Pourtant quelque chose semblait s’être brisé.
Contrairement à la première fois où ils avaient
été séparés et où les sentiments
qu’ils éprouvaient l’un pour l’autre
n’avaient fait que grandir, cette fois un mur
s’était dressé entre eux. Leurs nuits
étaient toujours aussi passionnées et Terry lui faisait
l’amour avec une ardeur toujours renouvelée, comme si
c’était la dernière fois qu’il la tenait dans
ses bras. Mais les journées étaient mornes et sans vie.
Il donnait l’impression de ne pas savoir quoi lui dire et faisait
de son mieux pour l’éloigner des studios de tournage.
Lasse de passer son temps seule, un jour où Terry l’avait
prévenue qu’il rentrerait plus tard qu’à
l’ordinaire, Candy avait décidé d’aller
l’attendre à la sortie du plateau. Passer la
sécurité fut facile grâce au passe que Terry lui
avait donné. Après avoir demandé plusieurs fois
son chemin, elle finit par rejoindre le lieu de tournage. Elle entra
avec précaution et tomba immédiatement sur des
techniciens qui rangeaient le matériel en discutant gaiement,
heureux d’avoir fini leur journée. Il n’y avait
aucune trace de celui qu’elle cherchait. Les deux hommes lui
dirent que tous les acteurs avaient terminé de tourner depuis un
bon moment et lui indiquèrent la caravane où elle
pourrait trouver Terry.
Personne ne lui répondit quand elle frappa, mais il lui sembla
entendre du bruit à l’intérieur. Candy entra dans
la caravane pour se trouver face à une jeune femme brune
penchée sur le confortable fauteuil dans lequel Terry devait se
reposer entre deux prises de vue. Un peu surprise, Candy craignit de
s’être trompée.
« Excusez-moi... balbutia-t-elle. »
L’autre se retourna brusquement et la toisa des pieds à la tête comme si elle évaluait la marchandise.
« Que faites-vous là ? demanda-t-elle, les sourcils froncés.
- Je cherche Terrence Granchester... J’ai dû me tromper...
- Qui êtes-vous ? Encore une fan qui veut le
séduire ? Désolée ma petite, mais Terry est
amplement pourvu de ce côté là ! Rentrez chez
vous ! »
Ébranlée, Candy regarda l’inconnue qui se
comportait de si étrange manière. Le regard dur de la
femme était déplaisant et elle n’était pas
femme à se laisser éconduire comme une mendiante.
« Mon nom est Candy répondit elle avec fermeté. Je suis la petite amie de Terry. Et vous ?
- Je m’appelle Karen. Je suis la doublure de Susanna Marlow...
Encore plus qu’elle ne le croit, ajouta la jeune femme avec un
rire sans joie. Terry m’a parlé de vous. Il est
déjà parti pour l’hôpital St Jacques voir
notre chère Susanna.
- Elle est blessée, mais comment...
- Oh ! Alors il ne vous a rien dit ? Il y a eu un accident
pendant une cascade. Susanna est tombée et c’est
entièrement la faute de Terry, même si tout le monde
essaie de le cacher. Et il le sait bien le pauvre chéri... Il a
été très affecté surtout qu’ils
étaient très proches. Enfin avec lui, on ne peut jamais
être sûre de rien, sinon il ne m’aurait pas
demandé de... »
Candy fut obligée de se retenir au mur pour ne pas
défaillir. Cette femme était en train d’insinuer
qu’elle et Terry... Que Terry et Susanna...
« Qu’est-ce que vous racontez ? Balbutia-t-elle avec effort.
- Cessez de jouer les bégueules, ma jolie ! Vous
n’imaginiez quand même pas qu’il allait vous rester
fidèle alors que vous étiez à New York ?
Terry est trop séduisant pour cela. N’en faites pas une
montagne. Il a couché avec Susanna, et maintenant avec moi,
quelle importance ? Si vous l’aimez vraiment, il faudra vous
y faire. Bon, je dois y aller maintenant. Retournez à
l’hôtel et attendez Terry gentiment, il vous rejoindra
dès qu’il en aura fini à l’hôpital. Je
vous souhaite une bonne soirée. »
Karen passa devant elle sans que Candy réagisse et disparut
bientôt derrière un décor. De toute façon la
jeune femme était incapable de faire le moindre mouvement. Elle
ne croyait pas un mot de ce qu’elle venait d’entendre.
Cette femme était simplement jalouse et essayait de lui faire du
mal. Jamais Terry ne se comporterait de cette façon ! Elle
savait bien qu’il l’aimait !
Candy se laissa tomber dans le grand fauteuil et serra sur son coeur le
coussin qui était posé dessus. Elle avait beau avoir
confiance en Terry, ce genre d’accusations faisait très
mal. Mais qu’avait voulu dire cette Karen au sujet d’un
accident dont Terry serait responsable et qui aurait envoyé sa
partenaire à l’hôpital ? Cette information
là était beaucoup plus inquiétante. Elle se leva
d’un bond décidée à découvrir le fin
mot de l’histoire quand elle remarqua que quelque chose
s’était accroché dans son pull quand elle
s’était assise. Elle glissa les mains dans son dos pour le
décrocher en pestant contre Terry et sa sale habitude de
dissimuler toute sorte de chose derrière les coussins du
canapé et des fauteuils. Qu’est ce que
c’était cette fois ? Ayant enfin réussi
à se libérer, Candy se retourna pour découvrir...
Un soutien-gorge ! Elle le lâcha comme si elle
s’était brûlée et resta debout un long moment
à contempler l’objet du délit. Puis elle attrapa
son sac et sortit en toute hâte. Elle héla un taxi et se
fit conduire à l’hôpital St Jacques où on lui
indiqua sans difficulté la chambre de Melle Marlow. Bien
décidée à obtenir des explications tant sur
l’accident que sur la conduite de Terry, Candy entra sans
s’annoncer pour trouver celui qu’elle aimait serrant dans
ses bras une Susanna au comble du bonheur.
Pour Candy, ce fut comme si le monde s’écroulait autour
d’elle. Elle enregistra rapidement la délicate rougeur qui
envahissait les joues de Susanna et le brusque mouvement de Terry qui
lâcha sa partenaire et se mit debout. Le regard qu’il
posait sur elle n’exprimait ni honte ni remord. Il était
simplement... désolé ! Il ne chercha même pas
à se justifier ni à s’excuser. Son visage
n’affichait qu’une immense tristesse et c’est ce qui
fit le plus mal à Candy. Puis elle entendit comme dans un
rêve Susanna prier le jeune homme de les laisser seules et il
sortit les yeux baissés.
« Vous êtes Candy, n’est-ce pas ? »
La jeune femme reporta son attention sur la comédienne qui la
regardait en souriant, parfaitement détendue, rayonnante de
bonheur.
« Vous êtes telle que je me l’imaginais, reprit
Susanna. Je suis si heureuse que nous puissions enfin nous rencontrer.
- Je ne pense pas pouvoir en dire autant, marmonna Candy en s’approchant du lit.
- Je comprends que vous soyez blessée; mais il ne faut pas en
vouloir à Terry. Il ne savait pas comment vous annoncer la
nouvelle...
- Çà j’imagine !
- S’il n’y avait pas eu ce stupide accident, tout aurait
été différent, vous savez. Nous voulions vous dire
la vérité depuis un moment mais... »
Candy ferma les yeux pour chasser l’image qui s’imposait
à son esprit d’un Terry et d’une Susanna tendrement
enlacés venus l’accueillir à
l’aéroport et lui annonçant qu’elle pouvait
prendre le premier vol en sens inverse. C’était ridicule,
mais elle se demandait si elle n’aurait pas
préféré cela. Elle avait mal, terriblement mal et
sa tête commençait à bourdonner. En entendant les
propos de Karen, elle avait supposé que Susanna en voudrait
terriblement à Terry, pourtant ce n’était pas le
cas au vu de la scène qu’elle venait de surprendre.
« On dit que votre blessure est grave et que Terry...
- Ne croyez pas ce qu’on raconte, s’exclama Susanna. Ce ne
fut pas la faute de Terry, du moins pas entièrement... Je suis
tout aussi responsable que lui. Jamais nous n’aurions dû
accepter de tourner cette scène dans l’état
où nous étions. La nuit d’avant nous avions
beaucoup bu et... Enfin nous n’avions pas assez dormi...
- Épargnez-moi les détails, siffla Candy entre ses dents.
- Oh ! Je comprends... Je suis désolée Candy, mais
Terry et moi avons tant de choses en commun ! La connexion entre
nous a été immédiate. Nous avons la même
vision de la vie, de notre travail... Ce qui est arrivé
était inéluctable. Aucun de nous n’aurait pu
empêcher cela. Je suis seulement triste que cela vous fasse
souffrir, mais je vous promets de le rendre heureux. »
Un éclair de défi brilla soudain dans les yeux de Candy.
Karen n’avait-elle pas insinué que son rôle de
doublure ne se limitait pas aux plateaux de cinéma mais se
poursuivait jusque dans le lit de Terry ? Et le soutien-gorge
qu’elle avait trouvé ? Il ne saurait appartenir
à Susanna qui devait faire au minimum deux tailles de
moins ! Qui avait bien pu l’oublier ? Karen ou... une
autre ?
Candy eut soudain le désir impérieux de
révéler à la jeune actrice que son tendre Terry
n’était en réalité qu’un coureur de
jupons sans vergogne. Est-ce que cela effacerait de son visage ce
sourire comblé qu’elle ne pouvait plus supporter ?
Mais son bon coeur reprit le dessus. A quoi bon se venger sur
Susanna ? Terry n’était-il pas le seul responsable
dans cette histoire ? S’il se lassait un jour de Melle
Marlow comme il s’était lassé d’elle, ce
serait bien assez douloureux. Ce jour là Susanna souffrirait
comme elle souffrait aujourd’hui. Malgré sa gentillesse
naturelle, Candy ne pouvait s’empêcher d’en
éprouver une étrange satisfaction.
« J’espère que vous vous remettrez rapidement,
Melle Marlow, dit Candy. Et... Je vous souhaite beaucoup de
bonheur. »
Sa voix se brisa sur les derniers mots et elle tourna les talons pour
sortir en toute hâte. C’était sans compter sur Terry
qui l’attendait dans le couloir. Les dernières bribes de
dignité qui lui restaient s’évaporèrent
quand elle se trouva en face de lui.
Les yeux baissés pour ne pas croiser son regard si bleu, elle murmura :
« Reste avec elle, Terry. Elle a besoin de toi.
- Mais toi, Candy ? Laisse-moi te raccompagner. Je dois t’expliquer...
- Il n’y a rien à expliquer !
L’interrompit-elle avec brusquerie. Elle ne t’en veut pas
de ce qui est arrivé. Cela prouve qu’elle est plus
gentille que moi. Je ne sais pas si j’aurais eu autant de
générosité ! Prends soin d’elle. Moi,
je me débrouillerai. »
Puis elle avait dévalé les escaliers aussi vite
qu’elle le pouvait pour fuir cet homme, cet hôpital, ce
pays... Quand Terry était rentré à
l’hôtel, elle avait disparu. Jusqu’au dernier
instant, Candy avait guetté tous les passants dans le hall de
l’aéroport, redoutant, espérant qu’il
viendrait la chercher, qu’il la supplierait de ne pas partir,
mais il n’était pas venu et elle avait regagné les
Etats Unis le coeur en cendres.
Elle n’eut pourtant pas beaucoup de temps pour se lamenter sur
son sort. Peu après son retour, elle eut la confirmation de ce
qu’elle soupçonnait depuis plusieurs semaines : Elle
était enceinte ! Le premier choc passé, elle loua
l’instinct qui l’avait retenue de parler à Terry de
ses espoirs. De quoi aurait-elle eu l’air, alors qu’il la
trompait allègrement depuis longtemps et qu’il
était sur le point de lui annoncer son intention de rompre.
Non ! Mieux valait qu’il ne sache rien. Candy était
bien trop fière pour l’informer maintenant de son
état. Elle aurait eu l’impression de mendier pour le
récupérer, et elle ne voulait pas s’abaisser
à çà. Elle était assez grande pour
s’occuper de son enfant sans lui !
Mais rien ne s’était déroulé comme elle
l’imaginait. D’abord sa famille avait crié au
scandale en découvrant son état. Le conseil de famille au
grand complet, son père adoptif et la grand’tante Elroy en
tête, avait exigé qu’elle régularise la
situation en épousant le père de l’enfant. Devant
le refus obstiné de Candy à dévoiler
l’identité du père, ils avaient été
jusqu’à envisager de la marier à un inconnu qui
accepterait d’endosser la paternité pour rétablir
l’honneur de la famille. L’unique autre solution selon eux
était de se débarrasser de l’enfant, avant sa
naissance de préférence, ou à la rigeur de
l’abandonner dès qu’il aurait vu le jour.
Dégoûtée par leur attitude la jeune femme
était entrée dans une colère noire comme jamais
encore elle ne se l’était permis. Le ton était
rapidement monté, surtout face à l’intransigeance
de la matriarche, et Candy était partie en claquant la porte.
Quelques jours plus tard, alors qu’elle était à
peine remise de la pénible scène, elle avait eu la
surprise de voir son père Albert se présenter chez elle.
Malgré l’affection qu’il lui portait, il lui
annonça que si elle ne se soumettait pas aux exigences du
conseil de famille, elle pouvait se considérer comme exclue
définitivement de la maison André. Lui qui connaissait
tout de son histoire mouvementée avec Terry soupçonnait
le jeune acteur d’être le père, et il proposa
d’aller le trouver pour le mettre devant ses
responsabilités. Candy pria et supplia qu’il n’en
fasse rien, allant jusqu’à prétendre qu’elle
n’était pas sûre de la paternité de Terry.
Elle ajouta ainsi de qualificatif de traînée à
celui d’ingrate dont on l’affublait si souvent.
Albert aimait énormément sa fille adoptive, mais
s’il était le chef de famille et le PDG des puissantes
industries André, il restait un membre comme un autre du conseil
de famille où sa voix ne pesait pas plus que celle de n'importe
lequel des participants. La garante de la moralité restait la
Tante Elroy et son opinion avait force de loi pour les autres membres.
Mis en minorité, Albert ne pouvait que s’incliner. Dans
l’impossibilité de retourner dans la maison des
André, Candy qui avait déjà quitté New York
pour Chicago se mit à la recherche d’un appartement et
d’un moyen de subsistance.
A la vitesse à laquelle elle avait réussi à
trouver le premier, elle soupçonnait Albert d’être
intervenu discrètement pour l’aider, mais jamais il ne lui
en fit part, et elle était trop fière pour le contacter
la première. Privée des ressources de la famille
André, Candy décida d’abandonner ses études
de médecine. Elle s’inscrivit au concours
d’infirmières. Avec ce qu’elle avait
déjà appris, il lui suffit de quelques cours
supplémentaires et elle fut reçue avec les honneurs.
L’excellente place obtenue lui ouvrit les portes de plusieurs
hôpitaux qui acceptèrent de l’engager malgré
sa grossesse avancée. Elle travailla à peine un mois
avant que le bébé ne décide de venir au monde avec
un peu d’avance.
Dès l’instant où la sage-femme lui posa le
bébé sur le ventre, plus rien d’autre ne compta
pour Candy. Les yeux remplis de larmes, elle oublia la douleur, les
doutes, la trahison de Terry. Devant ce petit miracle qui criait de
toutes ses forces, elle se jura que jamais la petite fille
n’aurait à souffrir comme elle de l’absence
d’une mère. Malgré les difficultés
qu’elle éprouvait à joindre les deux bouts avec son
salaire d’infirmière et un enfant à charge, elle
consacra toute son énergie à être la meilleure
mère possible. Aveuglée par son amour, elle oublia juste
que l’enfant avait aussi besoin d’un père.
Or voilà justement que ce père qu’elle avait
occulté de sa vie réapparaissait soudain. En un instant,
tous les sentiments de Candy étaient remontés à la
surface. Pourtant curieusement, la douleur et la souffrance
n’étaient pas ceux qui occupaient la première
place. La force avec laquelle son coeur avait battu quand elle
l’avait vu, la faiblesse de ses jambes et la chaleur qui
s’était répandue dans son corps signifiaient tout
autre chose. Un souvenir très doux, très tendre et
très dangereux...
Toute la journée, une seule pensée avait occupé
l’esprit de Candy : Comment éloigner Terry de
Tess ? Heureusement, l’enfant était aujourd’hui
chez sa nounou, mais elle savait que le jeune homme n’en
resterait pas là. Elle était persuadée que son
explication au sujet d’une aventure ne l’avait pas
convaincu. Il ne la laisserait pas tranquille tant qu’il
n’aurait pas une certitude au sujet de la petite fille. Candy
avait beau retourner le problème dans sa tête, elle ne
voyait qu’une solution : la fuite ! Une nouvelle fois
elle devait tout laisser derrière elle et disparaître avec
sa fille, n’importe où pourvu que ce soit loin de Terry.
Résolue, elle rentra chez elle ce soir là en se demandant
comment annoncer à Tess leur tout prochain départ.
Contrairement à son habitude, sa fille ne l’attendait pas,
le visage collé à la vitre de la loge, mais comme Candy
était sortie de son travail un peu plus tôt que
d’ordinaire, cela ne l’étonna pas. Les deux petites
filles étaient certainement en train de jouer avec les cadeaux
que Sarah avait reçus pour Noël. Elle décida de
monter se changer et mettre le repas du soir en route avant de
redescendre chercher Tess.
En ouvrant la porte de son appartement elle trouva une enveloppe
probablement glissée sous la porte. Celle-ci portait dans un
coin le nom et le logo d’un des plus grands hôtels de
Chicago et Candy crut un instant à une publicité. Mais
son nom était écrit sur l’enveloppe d’une
écriture fine et aristocratique qu’elle ne connaissait que
trop bien. Après une courte hésitation, elle ouvrit la
lettre et en sortit le message, lui aussi rédigé sur une
feuille à en-tête de l’hôtel. Quelque chose
tomba sur le sol et la jeune femme ouvrit de grands yeux : Un
billet d’avion pour Los Angeles ! Et en classe VIP en
plus !
Terry avait-il l’intention de l’inviter en
Californie ? Il était fou s’il croyait qu’elle
allait entrer dans son jeu. Et pourquoi un seul billet ? Il ce
comptait quand même pas qu’elle allait partir sans sa
fille, ou pire, qu’elle enverrait Tess seule là-bas !
Certaine que l’explication se trouvait dans la lettre, elle se
décida à la lire enfin. Le message était bref et
quelques secondes plus tard, Candy se retrouvait à genoux sur le
sol carrelé de l’entrée, vidée de ses
forces. Elle aurait voulu crier mais aucun son ne sortait de ses
lèvres sèches. Le sang martelait à ses tempes et
les mots qu’elle venait de lire dansaient devant ses yeux comme
autant de papillons affolés.
Ma chère Candy,
J’ai emmené Tess avec moi à Los Angeles. Rejoins-nous vite, nous t’attendons.
Terry
NOTE DE LA WEBMISTRESS
Le chapitre suivant présente un contenu qui, par sa nature,
s'adresse à un public, disons, "ADULTE"... Afin d'éviter
toute réaction négative envers cette fiction, veuillez
donc prendre en considération cet avertissement... |
CHAPITRE 5
Tout en suivant les autres passagers qui quittaient le contrôle
des bagages, Candy cherchait dans la foule la haute silhouette qu'elle
connaissait si bien sans réussir à la trouver.
« Il ne va quand même pas me laisser plantée
à l’aéroport ! Songea-t-elle pendant que la
colère reprenait le pas sur
l’énervement. »
Préoccupée, elle sursauta quand une voix au fort accent
mexicain prononça son nom. Elle se retourna pour se trouver nez
à nez avec une pancarte blanche où son nom était
inscrit en lettres d’imprimerie. Les cheveux noirs de jais, les
yeux sombres et le teint basané de celui qui la tenait faisaient
de lui l’archétype de l’hidalgo. Pourtant sa voix
hésitante et son sourire timide contrastaient avec sa grande
taille et sa carrure impressionnante. Mal à l’aise,
l’homme se balançait d’un pied sur l’autre
sous le regard inquisiteur de cette petite femme qui ne lui arrivait
même pas à l’épaule. En hésitant il
retourna son panneau au dos duquel Candy put lire « Melle
Taches de Sons. »
« M. Granchester m’a demandé de venir vous chercher, précisa-t-il bien inutilement. »
Dès qu’elle avait lu son surnom, la jeune fille avait
compris qui envoyait cet étrange géant aux gestes un peu
gauches. Ainsi il n’avait pas daigné se déplacer
lui-même ! Sans doute avait-il eu raison car elle se sentait
prête à faire un scandale au beau milieu du terminal. Ses
yeux brillaient de colère, mais celle-ci n’était
pas dirigée contre le malheureux messager qui se penchait pour
prendre sa valise. Le volumineux bagage qu’elle avait eu tant de
mal à traîner semblait minuscule dans la main de
l’athlète et elle était obligée de presser
le pas pour suivre ses grandes enjambées tandis qu’ils se
dirigeaient vers le parking.
L’homme lui ouvrit la portière arrière, mais Candy
refusa d’un signe de tête et contourna le véhicule
pour s’installer à l’avant. Son compagnon glissa sa
haute stature derrière le volant de la berline de luxe et la
voiture s’inséra sans difficulté dans le trafic
chargé bien qu’il soit deux heures du matin.
Gêné par le silence de sa voisine qui n’avait pas desserré les dents, le chauffeur se racla la gorge.
« Nous en avons pour quarante-cinq minutes de route,
mademoiselle. Vous êtes sûre que vous ne voulez pas vous
installer à l’arrière ?
- Je suis très bien ici, ne vous inquiétez pas... Je ne sais même pas votre nom, constata soudain Candy.
- José, mademoiselle. Je travaille pour M. Granchester depuis deux ans.
- Et il vous demande souvent de vous priver de sommeil pour jouer les
chauffeurs ? C’est vous qu’il charge des sales
besognes, José ? »
Surpris par le ton agressif de sa passagère, l’homme
hésita un instant. Il entendait encore son patron lui
décrire la jeune femme avec un luxe de détails et une
emphase qui prouvaient à quel point il tenait à elle.
Jamais il n’avait parlé de Melle Marlow avec autant de
joie au fond des yeux. A n’en pas douter, le bel acteur
était amoureux et José s’était réjoui
pour lui. Certes la jolie blonde assise à côté de
lui était ravissante mais son caractère était loin
d’être commode. Comme son employeur n’était
pas en reste de ce côté-là, la cohabitation
risquait de provoquer des étincelles.
« Monsieur Granchester me l’a demandé comme un
service, répondit-il, prudent. Ma femme aurait été
heureuse de veiller sur la petite fille, mais monsieur ne voulait pas
la laisser. »
A la mention de Tess, les lèvres de Candy se crispèrent
et ses yeux se remplirent de larmes. Elle se renfonça dans son
siège et se mura dans un silence que José respecta
jusqu’à la fin du trajet.
Après avoir passé un impressionnant portail automatique
et traversé un immense parc, la voiture s’arrêta
enfin devant une grande villa où seules quelques fenêtres
du rez-de-chaussée étaient éclairées. Tout
le premier étage, sans doute celui des chambres, était
plongé dans l’obscurité.
D’autres lumières s’allumèrent et José sourit en aidant sa passagère à descendre.
« Monsieur vous attend avec impatience. Je vais m’occuper de votre valise. »
Candy acquiesça et avança à pas lents vers le
perron. La colère qui l’avait poussée
jusqu’ici depuis qu’elle avait découvert la
disparition de Terry et de sa fille, laissait place à une sourde
angoisse qui la paralysait. Elle resta debout devant la porte
d’entrée. Devait-elle sonner ? Elle levait le bras
avec une infinie lenteur quand le battant s’ouvrit à la
volée.
Alors qu'elle avait ruminé toute la nuit ce qu'elle lui dirait,
la jeune femme se retrouvait sans voix. Celui qui lui faisait face
n'avait plus rien de commun avec l'homme élégant et
sûr de lui qu'elle avait vu à Chicago à peine
quelques jours plus tôt. En jean et en tee-shirt, il ressemblait
au Terry de ses années d'université, le Terry qu'elle
avait tant aimé. Elle remarqua qu'il était pieds nus, et
cette découverte la troubla au point qu'elle ne pouvait renouer
le fil de ses pensées.
Lui-même détaillait la femme qui lui faisait face. Le
pantalon étroit glissé dans des bottes et qui moulait ses
formes, le blouson fourré d'aviateur... Elle ressemblait
à une adolescente. Ses cheveux était noués en une
simple natte qui pendait dans son dos, mais quelques petites
mèches s'en étaient échappé et frisottaient
sur sa nuque. Il ne lui avait pas laissé le choix, mais elle
était là, et rien d'autre ne comptait. Il s'effaça
pour la laisser entrer et referma soigneusement la porte
derrière elle.
La première idée qu'il s'imposa à Candy fut celle
de la mouche prise dans une toile d'araignée. Mais elle
n'était pas du genre à se laisser dévorer sans se
battre. Elle fit quelques pas dans le salon en jetant des regards
anxieux autour d'elle. Puis elle se tourna vers lui, toute sa
combativité retrouvée.
« Où est ma fille ? »
Sa fille, songea Terry. Pas Tess, et encore moins notre fille. Elle
avait dit sa fille ! Cela lui fit mal au point d’oublier ses
bonnes résolutions.
« Il est trois heures du matin, Candy. Où veux-tu
qu’elle soit ! Elle dort, bien sûr, répondit-il
sur un ton plus acerbe qu’il ne l’aurait voulu.
- Je veux la voir ! »
La voix de la jeune femme ne souffrait aucune réplique.
D’un signe de tête, Terry lui fit signe de le suivre dans
l’escalier jusqu’à l’étage où il
ouvrit une porte avec précaution. Quand Candy passa devant lui,
il la retint par l’épaule.
« Elle va très bien, alors ne la réveille pas. »
La jeune mère fit quelques pas dans la pièce. La chambre
n’avait pas été aménagée à
l’origine pour accueillir un enfant, pourtant le sol était
jonché d’une quantité de jouets et de peluches.
Dans un coin, une veilleuse rose décorée de princesses de
contes de fées prodiguait assez de lumière pour
qu’elle puisse distinguer certains détails. Elle
s’approcha du lit d’où provenait une respiration
légère et régulière. Tess paraissait encore
plus petite au milieu de ce grand lit. En voyant sa fille qui dormait
paisiblement en serrant contre elle un ours au moins aussi grand
qu’elle, Candy poussa une exclamation de soulagement et porta les
mains à ses lèvres pour l‘étouffer. Elle
allait se précipiter pour serrer son enfant sur son coeur, quand
un bras puissant se noua autour de sa taille et l’entraîna
sur le palier. Elle tenta bien de résister mais Terry
était trop fort pour elle.
« C’est mon bébé ! S’exclama-t-elle. Tu n’as pas le droit... »
Candy devenait hystérique. Sans hésiter, Terry la poussa
dans une chambre voisine et referma la porte avant que ses cris ne
réveillent la petite.
Les yeux de la jeune femme lançaient des éclairs et ses
narines frémissaient de colère. Incapable de se contenir,
elle cria :
« Comment as-tu osé faire cela ! Tu as pris mon
bébé, c’est un enlèvement !
J’aurais dû appeler la police !
- Mais tu ne l’as pas fait, et tu sais très bien pourquoi,
répondit Terry agacé. Maintenant arrête de hurler,
tu vas la réveiller ! »
Candy ressemblait à une lionne défendant ses lionceaux.
Mais à aucun moment elle ne l’incluait dans ses propos,
comme s’il n’existait pas, ou pire, comme s’il
était un danger pour sa propre fille. Cela, il ne pouvait
l’admettre. L’affection qu’il portait à Tess
était sans bornes et les deux derniers jours qu’il avait
passés avec elle avaient été un enchantement.
S’il avait été exclu de sa vie pendant cinq ans, se
séparer d’elle maintenant lui déchirerait le coeur.
« Je ne te laisserai pas me la prendre, reprit Candy qui
essayait de contenir sa voix. Je suis toujours une André !
Tu pourras m’envoyer autant d’avocats que tu voudras,
Albert t’en opposera le double, dix fois plus malins.
- Une armée d’avocats sera inutile, répliqua-t-il
en sentant l’impatience le gagner. Un test de paternité
suffira, tu ne crois pas ? »
Le coeur de Candy manqua un battement. Non seulement il savait, mais il
n’avait aucun doute ! Il l’avait
abandonnée ! Il avait choisi une autre femme et maintenant
il voulait lui prendre Tess ! Malgré ce qu’elle avait
dit, elle redoutait ce que pourrait décider un tribunal. Elle
n’était qu’une modeste infirmière, une
mère célibataire qui se battait tous les jours pour
élever sa fille. Terry était une
célébrité et il était riche. Il pourrait
assurer à l’enfant une aisance matérielle
qu’elle était bien incapable de lui donner depuis
qu’elle avait rompu avec sa famille.
« Bon sang, Candy, comment as-tu pu me cacher que nous
avions un enfant ! S’emporta Terry. Quand je l’ai
rencontrée à Chicago j’ai eu le plus grand choc de
ma vie !
- Tu peux parler ! Que crois-tu que j’ai ressenti quand
j’ai découvert qu’il y avait une autre femme dans ta
vie ? Quand je me suis aperçu que j’étais
enceinte ? Quand je suis rentrée chez moi hier et que mon
enfant avait disparu ?
- Elle ne risquait rien, elle était avec moi.
- Avec toi ! Tu te découvres père depuis une semaine
et tu crois tout savoir de ce que peut ressentir un parent ? Tu ne
sais rien du tout !
- A qui la faute ? Ce dont je suis certain c’est que
j’ai perdu les cinq premières années de la vie de
ma fille parce que sa mère n’a caché son
existence ! Mais c’est terminé, Candy. Je suis son
père et je veux me comporter comme tel
dorénavant. »
Les jambes de Candy se mirent à trembler. Ainsi elle ne
s’était pas trompée ; Terry voulait sa
fille ! Le désespoir ajouté à la fatigue des
dernières quarante-huit heures s’abattirent sur ses
épaules et elle se laissa glisser au sol. La tête entre
les mains elle éclata en sanglots.
Stupéfait devant sa réaction, Terry s’approcha
à pas lents. Il ne comprenait pas ce qui pouvait provoquer chez
elle une telle détresse alors qu’il lui proposait de
s’occuper d’elles deux. Mais s’il y avait une chose
qu’il ne supportait pas, c’était de la voir pleurer.
Il s’agenouilla près d’elle et écarta les
mains de son visage pour la regarder. Toute colère
envolée il supplia :
« Ne pleure pas, je t’en prie. Si j’avais su que
cela te mettrait dans cet état, je n’aurais pas agi aussi
impulsivement. Mais tu refusais de m’écouter à
Chicago. Je n’ai vu que ce moyen de te faire venir ici.
- Tu ne sais que me faire souffrir depuis toujours ! Tu veux donc tout me prendre ? »
Le jeune homme ne saisissait pas ce qu’elle voulait dire par
là. Cédant à son impulsion, il voulu la serrer
dans ses bras. Candy le repoussa avec violence et se précipita
vers la porte tout en essayant de se redresser. Vif comme
l’éclair, il se jeta derrière elle et
réussit à lui attraper la cheville. Elle tomba sur la
moquette et se retourna pour lui donner un coup de pied mais il
l’immobilisa sous son poids. Comme elle tentait de le griffer et
de le frapper, il s’empara de ses mains et les maintint au dessus
de sa tête.
« Nom d’une pipe, Candy, tu comptais faire quoi, là ?
- Je veux récupérer ma fille et partir d’ici !
- Ta fille ! Tu ne l’as pas faite toute seule il me
semble ! Pour être exact, je me souviens même
très bien d’avoir participé activement à sa
conception ! »
Quelques instants plus tôt il désirait ardemment la serrer
contre lui mais sentir le corps tremblant de Candy sous le sien
était encore plus agréable. Plus troublant surtout. Non
il n’avait rien oublié. Chacune de leurs nuits de passion
était gravée dans sa mémoire. Il avait fait
l’amour à d’autres femmes, mais la satisfaction
qu’il en retirait était fade et incomplète, tandis
que Candy enflammait ses sens au moindre contact. Et maintenant elle
était là, à sa merci. Un frisson courut le long de
son épine dorsale. D’une main il descendit la fermeture
à glissière du blouson qu’elle n’avait pas
quitté et en écarta le pans pour se perdre dans la
contemplation de la poitrine ronde qui soulevait son pull-over à
un rythme saccadé.
Le corps de la jeune femme provoquait en lui une ivresse à nulle
autre pareille. Il voulait plus que tout retrouver
l’intimité qui avait été la leur, mais pas
dans ces conditions. Pas tant qu’ils ne se seraient pas
expliqués. Il plongea son regard dans le sien et toutes ses
bonnes résolutions s'envolèrent quand il constata
qu’elle ne se débattait plus.
« Et toi Candy, demanda-t-il le souffle court. Est-ce que tu as oublié nos nuits d’amour ?
- Non, avoua-t-elle. »
Il avait lâché ses mains, mais elle ne cherchait plus
à s’échapper. Elle avait su qu’elle
était perdue à l’instant même où elle
avait senti le corps puissant de Terry peser sur elle. En fait
dès l’instant où elle l’avait vu sur le seuil
de sa porte à Chicago elle avait compris que son long sommeil
était terminé. Son coeur avait recommencé à
battre et même si c’était douloureux, elle
était à nouveau en vie. Malgré sa trahison,
malgré son abandon, elle l’aimait toujours. Mais
au-delà de l’amour, c’était la puissante
attirance physique qui les unissait qui lui faisait le plus peur. Le
plaisir que Terry savait lui procurer avait marqué son corps au
fer rouge. Il y avait si longtemps qu’elle n’avait plus
ressenti cela.
Le visage de l’homme s’inclinait vers elle, de plus en plus
proche. Elle le caressa du bout des doigts et repoussa une mèche
rebelle derrière son oreille sans réfléchir. Terry
ferma les yeux pour dissimuler la lueur de désir qui y brillait.
Leurs lèvres se cherchèrent, se frôlèrent et
tout le corps de Candy fut traversé d’une décharge
électrique.
« Reviens-moi, chuchota-t-il à son oreille. Comme avant...
- Je suis là, capitula-t-elle dans un soupir. »
Une bouche possessive se posa sur la sienne et le serpent du
désir les enserra dans ses anneaux tandis qu‘un
gémissement rauque échappait à Candy. Des mains
fiévreuses parcouraient son corps, se glissaient sous son pull
et sa peau la brûlait partout où ses doigts la touchaient.
Plus rien n’avait d’importance que ce doux vertige qui
s’emparait d’elle. Terry avait envie d’elle et
c’était la seule chose qui comptait. Même si cette
attirance était tout ce qui subsistait de l’amour
qu’il avait eu pour elle, ce pouvoir lui appartenait.
Elle le sentit la libérer de son poids, mais ce fut pour la
redresser puis défaire la fermeture à glissière de
ses bottes. Il l’en débarrassa en un tour de main pendant
qu’elle retirait son blouson et son pull-over. Il enfouit la
tête entre ses seins avec un grognement de plaisir. Elle
s’attaquait déjà aux boutons de son jean mais il
l’arrêta en lui prenant les mains pour les nouer autour de
son cou.
« J’ai envie de toi, Candy, chuchota-t-il contre sa
bouche. Si tu savais comme tu m’as manqué !
- Tu m’as manqué aussi !
- Mais il y a cinq minutes tu m’en voulais à mort...
- Et je t’en voudrai encore plus si tu ne finis pas ce que tu viens de commencer. Ne me laisse pas maintenant !
- Jamais je ne te laisserai ! S’exclama Terry en se relevant. »
L’instant d’après elle se retrouvait nue entre ses
bras. Le torse puissant qui se frottait contre sa poitrine la rendait
folle. Il la déposa sur le lit et se défit de ses
vêtements avant de s’allonger sur elle avec urgence. Elle
accueillit ce corps viril sur le sien avec impatience et lui offrit sa
bouche sans retenue.
« Fais-moi l’amour, Terry. Je t’en supplie ! »
Mais le jeune homme n’avait nul besoin d’encouragement. Il
redécouvrait avec délices ce corps adoré qui avait
hanté ses rêves depuis des années. Ses
lèvres tracèrent un sillon de feu sur la peau
satinée de Candy qui se cambra vers lui quand elles atteignirent
sa poitrine gonflée. Sa bouche gourmande engloutit les mamelons
fièrement dressés qui se tendirent douloureusement dans
cette humidité chaude et caressante.
Elle pressa la tête de Terry contre sa peau pour prolonger la
caresse et retrouver le doux vertige qui la faisait trembler. Mais il
avait d'autres projets. Aucune drogue, aucun alcool ne pouvait lui
apporter une ivresse comparable à celle que lui procurait le
corps de Candy. Il la dévora de baisers, savoura le goût
de sa peau, s'enivra des gémissements incontrôlés
qu'elle poussait, à en perdre la raison. Le besoin qu'il avait
de la posséder se faisait impérieux et un soupir rauque
lui échappa quand il s'insinua en elle et qu'elle s'ouvrit comme
une fleur pour le recevoir. La sensation fut si grisante que tout son
corps se mit à trembler et il se retira bientôt pour
recommencer, encore et encore.
Candy était au bord du délire, partagée entre
l'envie qu'il poursuive ses assauts furieux sur son corps, et celle de
le voir enfin combler ce vide qu'elle éprouvait chaque fois
qu'il se retirait. Ses gémissements se transformèrent
bientôt en cris. Elle s'accrocha à ses épaules
puissantes, enfonça ses ongles dans ses flancs en
répétant inlassablement son prénom adoré.
Terry n'était pas dans un meilleur état. Avide de la
combler, il accéléra la cadence jusqu'à atteindre
ce moment hors du temps où l'explosion de leurs sens les projeta
dans un bouquet de lumière.
Eperdus, le souffle court, ils restèrent de longues minutes
enlacés jusqu'à ce que Candy se décide à
ouvrir les yeux.
« Oh, je te déteste ! Murmura-t-elle en posant
sur lui un regard qui disait exactement le contraire. Je te
déteste de me faire éprouver cela, et je me
déteste de souhaiter que cela continue
toujours ! »
Le souffle encore court, Terry ne pouvait se lasser de contempler le visage bouleversé qui lui faisait face.
« Pourquoi es-tu la seule à me faire perdre mon
contrôle ainsi ? Jamais je n’ai ressenti ce que je
ressens avec toi. Reste avec moi, Candy, et toutes les nuits
ressembleront à celle-ci ! »
Il effleurait machinalement du bout des doigts la pointe dressée
d’un sein et la jeune femme ne tarda pas à soupirer de
plaisir sous la caresse. Elle voulut nouer les bras autour de son cou,
mais il roula sur le dos, l’entraînant avec lui. Quand elle
tenta de se redresser, elle lui offrit la vision délicieuse de
sa poitrine magnifique. Souple comme un chat, Terry se laissa glisser
sous le corps vibrant et sa bouche gourmande s’empara de chacun
des mamelons, l’un après l’autre.
Encore humide de leur récente étreinte, le sexe de Candy
appuyait sur sa cuisse musclée. Il replia lentement la jambe
pour accentuer la pression, obligeant la jeune femme à se
cambrer pour profiter au maximum de cette caresse nouvelle tandis qu'il
contractait le quadriceps plusieurs fois. Bientôt elle ondulait
contre lui, incapable de contrôler les mouvements de son corps.
Terry se délectait de la vision de ses seins blancs qui
dansaient devant lui, des gémissements qui emplissaient ses
oreilles. La voir aussi réceptive aux jeux de l'amour lui
procurait une excitation comme il n'en avait jamais ressentie. Sa
longue main se faufila entre les jambes de son amante qui se raidit
dès que son pouce effleura le bouton de rose dur et vibrant. Il
continua à le caresser tout en introduisant un doigt, puis deux
dans le puits chaud qui ne tarda pas à s'inonder.
Candy se mit à trembler et ouvrit les yeux. Son regard
noyé de désir se perdit dans les yeux profonds qui la
regardaient avec amour, puis parcoururent tout le corps de son amant.
La peau brûlante sous cette inspection, Terry sentit une vague de
picotements monter le long de son échine. Il enfonça plus
profondément sa main, arrachant un cri rauque à sa
compagne. Effrayé par la violence de sa réaction, il
voulut retirer vivement ses doigts mais Candy serra les cuisses pour
l'en empêcher. Avec un sourire carnassier il reprit la caresse,
anxieux de la combler.
En appui sur les mains et les genoux, la tête renversée en
arrière et les yeux clos, elle bougeait de plus en plus vite au
rythme de ses doigts.
« Laisse-toi aller, chuchota-t-il. Tu es si belle! »
Mais elle ne l'écoutait pas, attentive au flot de chaleur qui
montait en elle, de plus en plus puissant. Dans un sursaut de tout son
être, Candy se crispa en atteignant l’orgasme. Sa
tête retomba sur sa poitrine et ses longs cheveux couvrirent son
visage bouleversé.
Terry l’allongea tendrement contre lui. Ses doigts imbibés
à la source du plaisir de sa partenaire caressèrent les
lèvres tremblantes. Il se mit à les lécher
à petit coups de langue, savourant autant le goût de sa
jouissance que les halètements désordonnés qui
s’échappaient de la poitrine de Candy.
« Pourquoi fais-tu cela ? Gémit-elle entre deux soupirs.
- Parce que j’aime te donner du plaisir, avoua l’homme
d’une voix hachée. Ton corps est plus facile à
convaincre que toi. Il aime ce que je lui fais et il le montre. Dis-moi
que tu aimes çà, mon amour ! Je veux
l’entendre de ta bouche. »
La tête encore bourdonnante, Candy laissa son instinct la guider.
Les mots qu’il avait prononcés chantaient à ses
oreilles. Il l’avait appelée « mon
amour » ! Qu’avouerait-il d’autre si elle
réussissait à l’entraîner aussi haut
qu’il avait su le faire ?. Elle détourna la main
libre du jeune homme qui voulait s’emparer d’un de ses
seins, et se dégagea doucement de ses doigts inquisiteurs. Sous
le regard incrédule de Terry elle lui écarta les bras en
croix sur le lit en bataille en se penchant sur lui, le regard lourd de
promesses. Elle l’embrassa avec passion et les globes laiteux de
sa poitrine qui lui caressaient le torse firent courir une dose
d’adrénaline supplémentaire dans les veines de son
partenaire. Émerveillé et incrédule, il la laissa
prendre la direction des opérations.
« Ma bouche ne demande pas mieux que de te montrer ce que je ressens pour toi ! »
Son souffle chaud contre sa peau faisait frissonner Terry de plaisir,
autant que les lèvres douces qui exploraient son corps. Elle
embrassa les muscles fermes de sa poitrine, s’arrêta sur
ses seins plats qu’elle excita du bout de la langue. Elle
descendit encore plus bas, étonnant le jeune homme qui se
demandait jusqu’où elle oserait aller et s’il serait
capable de supporter cette douce torture encore longtemps. Plus elle se
rapprochait de son entrejambe et plus le plaisir de Terry montait.
Un soupir lui échappa quand elle atteignit son membre viril.
Quelques baisers et coups de langue suffirent pour qu’il enfle et
prenne vie sous la caresse. Elle l’engloutit dans sa bouche et
fit de lents va et vient en laissant glisser la verge tendue entre ses
dents de nacre.
Comme si cela ne suffisait pas pour le rendre fou, Terry sentit
qu’elle prenait ses testicules au creux de sa main pour les
presser et les agacer. Puis ses doigts agiles
s’insinuèrent dans la vallée entre ses fesses. Le
jeune homme entendit un râle puissant et réalisa
qu’il émanait de sa propre gorge. Il comprit qu’il
avait atteint le point de rupture et réussit à se
redresser dans une contraction de tous ses muscles pour attraper Candy
par les épaules et la ramener vers lui.
Même si elle n’avait pas prononcé les mots
qu’il attendait, son regard vert rempli d’amour
était plus qu’éloquent.
« N’est-ce pas ce que tu voulais, demanda-t-elle avec
un sourire mutin. Laisse-moi t’emmener là où tu
m’as emmenée tout à l’heure. »
Il la renversa sur le dos et s’allongea sur elle avant de prendre
sa bouche dans un baiser passionné qui lui ôta le peu de
souffle qui lui restait.
« C’est un endroit où je ne veux pas aller sans
toi ! Haleta-t-il avec effort. Plus jamais sans
toi ! »
Candy glissa les mains autour de sa nuque en soupirant d’aise.
Elle tendit les hanches vers lui et s’ouvrit pour
l’accueillir. Terry la pénétra lentement pour
savourer le moment au maximum. Il bougea lentement, puis de plus en
plus vite, s’enfonçant plus profondément à
chaque coup de reins. L’urgence s’emparait de lui et il
craignit de ne pas réussir à tenir. Mais Candy
était prête. Aussi impatiente que lui, elle
s’accrochait à ses épaules, enfonçait ses
ongles dans la peau de son dos... Elle gémissait des mots sans
suite qu’il ne comprenait pas mais qui n’avaient aucune
importance. Seul comptait le plaisir qui montait en eux, de plus en
plus fort.
A l’instant où elle se tendit comme un arc en criant son
prénom, il cessa toute résistance et explosa en elle
avant de se laisser emporter pas la vague de jouissance la plus
puissante qu’il ait jamais éprouvée.
Leurs deux corps étaient parcourus de tremblements qui
semblaient de jamais vouloir s’arrêter, et ils
restèrent de longues minutes dans les bras l’un de
l’autre, dans l'attitude où le plaisir les avait surpris,
incapables de bouger.
Finalement, Terry se redressa sur un coude et s’allongea contre
elle. Les yeux fermés, les lèvres entrouvertes et son
corps magnifique brisé par le plaisir, elle n’avait jamais
été aussi belle qu’en ce moment. Il repoussa
quelques mèches collées sur son front et laissa sa main
glisser le long de son cou, sur son sein et jusqu’à sa
taille et il l’attira contre lui.
« Tu ne partiras pas ce soir, constata-t-il simplement.
- Non, pas ce soir, murmura Candy dans un souffle. Pour aller
où ? De toute façon, je n’ai même plus
la force d’ouvrir les yeux.
- Alors dors, ma douce, chuchota Terry en la serrant dans ses bras. Il
y cinq ans que j’attends de te tenir comme cela. Je ne renoncerai
pas maintenant. »
CHAPITRE 6
Candy avait l'impression qu'elle venait à peine de poser la
tête sur l'oreiller quand elle se réveilla. Elle aurait
bien prolongé son sommeil de quelques heures, mais son instinct
l'avertissait qu'il ne fallait pas. Elle parcourut du regard la chambre
où elle se trouvait sans la reconnaître. Puis tout lui
revint en mémoire et une bouffée de chaleur fit rougir
ses joues. Elle avait fait l'amour avec Terry toute la nuit ! Elle
était seule dans le grand lit mais la place à
côté d'elle était encore tiède. Elle trouva
un T-shirt du jeune homme posé près d'elle et l'enfila
pour couvrir sa nudité.
L'instant d'après, la porte s'ouvrait et sa fille se
précipitait vers elle en courant, sautait sur le lit comme si
c'était la chose la plus naturelle du monde et se jetait dans
ses bras.
« Maman ! Tu es là, comme Terry l’avait promis ! »
Candy leva des yeux pleins de gratitude vers l’homme qui se
tenait dans l’encadrement de la porte et qui avait pensé
à ménager sa pudeur avant l’arrivée de
l’enfant pour lui éviter les question embarrassantes de
Tess. Mais c’était sans compter avec l’esprit
curieux de la petite fille qui ne manqua pas de demander :
« Pourquoi tu dors dans le lit de Terry ? »
La jeune femme chercha de l’aide vers celui-ci, mais ne rencontra
qu’un visage fermé. Il les observait sans un mot et ne
semblait pas avoir entendu la question de Tess. La vision qu’il
s’offrait à lui était si belle que sa poitrine se
serra. La femme qu’il aimait et leur enfant, dans son lit,
serrées l’une contre l’autre... Il aurait voulu se
précipiter vers elles et les prendre dans ses bras mais il
n’osait pas. Incapable de contenir son émotion plus
longtemps, il se détourna et sortit.
Candy balbutia une explication au sujet de la première chambre
qu’elle avait trouvé, ce qui sembla satisfaire
l’enfant.
« Viens prendre le petit déjeuner avec nous, maman.
- Qu’est ce que tu veux que je te prépare, demanda Candy
machinalement, encore étonnée par l’attitude
incompréhensible de Terry.
- Ici c’est Lupe qui prépare le petit déjeuner,
expliqua Tess la mine sérieuse. Tu n’as pas besoin de
t’en occuper. Et elle fait des pancakes
formidables ! »
Candy sourit et se laissa entraîner au rez-de-chaussée par
sa fille surexcitée. La petite se comportait déjà
comme chez elle et était parfaitement à l’aise dans
la grande maison. Comment réagirait-elle quand elles
retourneraient dans leur petit appartement de Chicago ?
La table avait été dressée sous la véranda.
Terry les y attendait, déjà habillé. Quand
avait-il trouvé le temps de se préparer, songea Candy.
Tess était en pyjama et elle portait pour tout vêtement un
T-shirt trop grand, alors qu’il avait l’air d’une
gravure de mode ! Maussade, elle observa le jeune homme qui
servait à sa fille un grand bol de chocolat et des pancakes,
comme s’il avait toujours connu ses goûts.
Heureuse comme une reine, Tess babillait sans arrêt et ne
prêtait pas attention aux regards lourds de signification
qu’échangeaient les deux adultes par dessus sa tête.
« Je peux faire visiter la maison à maman ? Demanda-t-elle quand elle eut fini.
- Bien sûr ma puce, répondit Terry en souriant. »
Mais Candy était d’un autre avis. Ces deux-là
avaient l’air de s’entendre comme de vieux complices, mais
elle avait toujours son mot à dire !
« Non, décréta-t-elle. Nous allons
d’abord faire un brin de toilette et nous habiller. »
Elle se souvint soudain qu’elle ne savait pas où
José avait emporté sa valise et fronça les
sourcils. Terry devina ce qui la tourmentait et sourit.
« José a monté ta valise dans ta chambre, dit-il.
- Ma chambre ? Quelle chambre ? »
Tess éclata de rire.
« Tu as déjà oublié où tu as dormi, maman ? Viens, je vais te montrer. »
Prenant son rôle très au sérieux, elle guida sa
mère jusqu’à l’étage comme si celle-ci
était perdue. Candy se laissait faire, mais son coeur battait la
chamade. Ce n’était pas sa chambre !
C’était la chambre de Terry ! Et elle y avait fait
beaucoup de choses la nuit précédente, mais pas vraiment
dormi ! Elle retrouva un peu de sa sérénité
en accomplissant les gestes familiers qu’elle accomplissait tous
les matins avec sa fille, comme un rituel. Puis l’enfant attendit
patiemment que sa mère soit prête avant de lui faire la
visite guidée de la luxueuse villa de Terry.
Elle ne lui épargna pas la plus petite pièce, pas le
moindre recoin. On aurait dit un agent immobilier faisant
l’article à un futur client et une sonnette d’alarme
se mit à tinter dans l’esprit de Candy. De retour sous la
véranda, la petite était très contente
d’elle.
« Tu la trouves jolie cette maison, maman ? Demanda Tess l’air innocent.
- Bien sûr ma chérie. Elle est magnifique, répondit Candy d’une voix incertaine. »
Comme toutes les mères, elle sentait arriver la question
piège et la lueur de satisfaction qui s’alluma dans les
yeux de l’enfant confirma ses craintes.
« J’aimerais beaucoup qu’on habite ici.
- C’est la maison de Terry, dit Candy en fronçant les
sourcils pour signifier à sa fille qu’elle
s’aventurait sur un terrain dangereux. Notre maison à nous
est à Chicago.
- Mais s’il était mon papa, on pourrait rester ici avec
lui ! S’il te plait, maman, tu dois juste dire oui !
- Cela suffit, Tess ! Ce n’est pas à toi de décider de ce genre de chose ! »
Surprise par le ton cassant de sa mère, l’enfant rentra la
tête dans les épaules et sa mine se renfrogna. Candy
s’en voulut aussitôt d’avoir été aussi
brusque et reprit d’un ton plus doux :
« Et puis, tu ne sais même pas s’il serait d’accord.
- Mais si ! Il a dit qu’il avait très envie
d’avoir une petite fille, mais que c’est toi qui doit
décider ! Dis oui, maman !
- Je voudrais bien te faire plaisir, ma Tessy, mais...
- Mais quoi, Candy ? Intervint une voix profonde depuis le seuil. »
La jeune femme sursauta et se tourna vers l’homme nonchalamment
appuyé contre le chambranle qui avait écouté leur
conversation. La petite fille se précipita vers lui et il
s’accroupit pour l’accueillir dans ses bras. Le coeur
serré, Candy contemplait la scène et tout le poids de sa
responsabilité lui tomba sur les épaules. Elle
n’avait pas le droit de séparer l’enfant de son
père, mais elle ne pouvait se résoudre à
abandonner sa fille.
Jamais auparavant celle-ci n’avait fait la moindre allusion
à son désir d’avoir un père et Candy
s’était maintenue dans l’illusion que leur vie
à toutes les deux était tout ce qu’il leur fallait.
Mais à voir ainsi Terry serrer sa fille contre lui, elle comprit
à quel point elle avait été injuste en le
maintenant dans l’ignorance. Elle songea à la douleur qui
serait la sienne si on la privait de sa fille et le souffle lui manqua.
Terry qui l’observait déposa un baiser sur la joue de Tess et la poussa gentiment vers le salon.
« Tu devrais aller regarder un DVD ma puce. Je dois parler avec Maman. »
Sans rechigner, l’enfant quitta la pièce, à la
grande surprise de sa mère qui l’avait rarement vue aussi
obéissante. Terry redressa sa haute silhouette et
s’avança vers elle.
« Alors, Candy. Pourquoi ce mais... ? »
Plus troublée qu’elle ne voulait l’avouer au
souvenir de la nuit passée, la jeune femme tenta de maintenir la
conversation sur Tess, terrain sensible mais moins scabreux.
« Tu n’as rien dit à Tess ? Je pensais que
tu lui aurais révélé la vérité. Rien
ne la rendrait plus heureuse, elle veut tellement un père !
Mon Dieu ! Comment ai-je pu oublier ! »
Submergée par les souvenirs, Candy se tourna vers la fenêtre et laissa son regard errer sur le jardin.
« Quand j’avais son âge, j’aurais tout donné pour avoir des parents !
- A la différence que Tess a des parents, répondit Terry
en s’approchant d’elle. Elle a une mère formidable
et un père qui l’a aimée à l’instant
où il a posé les yeux sur elle, comme j’ai
aimé sa mère. Elle peut avoir ce que nous n’avons
jamais eu. Pourquoi le lui refuser ?
- Ma fille n'a jamais manqué de rien Terry, s'emporta Candy.
J'ai renoncé à mes études de médecine pour
elle. Je suis devenue infirmière pour avoir un emploi tout de
suite et subvenir à ses besoins. Je n'ai pas eu besoin de toi
jusqu'à présent et je peux très bien continuer.
- Tu lui as donné tout ce que tu pouvais, sauf un père... Pourquoi ne m'as-tu rien dis, Candy. Si j'avais su...
- Je ne voulais pas que tu te sentes obligé de...
- Obligé ! S’exclama Terry en la prenant par les
épaules pour la tourner vers lui. Pourquoi me sentirais-je
obligé de faire la seule chose qui puisse me rendre
heureux ? Ai-je donné l’impression de te faire
l’amour par obligation la nuit dernière ? Moi non
plus je ne veux pas te forcer la main, Candy. Voilà pourquoi je
n’ai pas encore dit la vérité à Tess. Mais
je veux plus que tout prendre soin de vous deux comme j’aurais
dû le faire il y a six ans. Je veux vous offrir tout ce que je
n’ai pas pu vous donner durant toutes ces années, je...
- Monsieur Granchester... »
Terry se tourna contrarié vers le malheureux José qui
sentait bien qu’il n’aurait pas pu tomber à un plus
mauvais moment. Déjà Candy s’écartait et se
détournait pour cacher les larmes qui emplissaient ses yeux.
« Pas maintenant, José !
- Mais c’est la police, Monsieur ! S exclama le
malheureux. Ils disent qu’il y a un problème au studio et
que vous devez y aller tout de suite. Ils ont parlé d’une
effraction je crois...
- Ce n’est pas mon problème ! Qu’ils voient cela avec la sécurité ! »
Alors qu’il avait enfin l’occasion d’exprimer
à Candy tout ce qu’il ressentait pour elle, les
événements semblaient une nouvelle fois se liguer contre
lui. Le visage baigné de larmes de la jeune femme
n’exprimait qu’un immense désespoir. De toute
évidence, elle ne voulait pas entendre ce qu’il avait
à lui dire. Elle pleurait à cause de lui, encore...
Pour ajouter à sa confusion, la petite silhouette de Tess se précipita dans la pièce.
« Maman ! Pourquoi est-ce que tu pleures ? »
Impressionnée, la fillette s’avançait vers eux
à pas lents sans quitter sa mère des yeux. Terry
s’accroupit devant elle et tenta de la prendre dans ses bras.
« Ne t’inquiète pas ma chérie. Maman et moi avons encore à parler. »
Mais malgré son jeune âge, Tess était une petite
fille qui comprenait beaucoup plus de choses que Terry ne pouvait
l’imaginer avec sa faible expérience de père. Il
était évident pour elle que le responsable du chagrin de
sa mère se trouvait devant elle.
« Tu as fait pleurer ma maman ! Cria-t-elle. Tu es méchant ! »
Puis elle se précipita dans les bras de Candy en sanglotant.
Bouleversé par ce chagrin d’enfant devant lequel il ne
savait comment réagir, Terry fixa les deux êtres
qu’il aimait le plus au monde serrées dans les bras
l’une de l’autre. Il se sentit comme un intrus. De quel
droit arrivait-il dans leur vie pour les bouleverser ? Les dents
serrées, il se redressa lentement. Il n’avait pas
réussi à reconquérir Candy et il était en
train de perdre Tess. Il était désemparé.
« Ce n’est pas ce que tu crois, Tess, implora-t-il. Je dois te dire quelque chose...
- Pas maintenant, Terry ! L’interrompit la jeune mère.
- Candy, supplia-t-il, la voix tremblante. Ne m’exclus pas de sa vie ! Il faut lui dire...
- Je lui parlerai mais vas-t-en ! Laisse-nous seules Terry. »
Abattu, le jeune acteur sortit du salon pour rejoindre José qui
s’était éclipsé discrètement et prit
le téléphone qu’il lui tendait. Mais il
n’entendait pas un mot de ce que lui disait son interlocuteur,
son esprit entièrement tourné vers le fiasco de sa
tentative de réconciliation. Le coeur lourd, il confirma son
arrivée aux studios dans les meilleurs délais et sortit
sans un regard en arrière, persuadé qu’il avait
perdu Candy à jamais.
Terry vécut les heures qui suivirent comme dans un automate. Le
directeur du studio et son manager l’accueillirent à grand
renfort de lamentations. La caravane de l’acteur avait
été fracturée et mise à sac. Lui seul selon
eux était à même de dire ce qui avait disparu.
Terry jeta un regard circulaire sans rien voir. Il fit appeler son
secrétaire pour procéder à l’inventaire des
lieux. Pour lui, il s’agissait là d’un simple outil
de travail où il ne laissait jamais rien de personnel. Un tel
fanatisme de la part de ses admirateurs l’aurait fait sourire
dans d’autres circonstances. L’empressement des
autorités judiciaires était tout aussi risible pourtant
les policiers insistèrent pour le questionner plusieurs fois,
comme si un fond de linge sale avait la moindre importance ! Son
esprit était entièrement tourné vers la maison
qu’il venait de quitter, et vers Candy et sa fille qui, il en
était certain, s’étaient empressées de
prendre le premier avion en direction de Chicago.
C’est le coeur lourd qu’il regagna sa demeure en fin
d’après-midi. La nuit ne tarderait pas à tomber et
le silence de la maison ne fit que conforter son malaise. Aucun jouet
ne traînait sur la moquette, le lecteur DVD ne diffusait aucun
des dessin animés préférés de Tess et plus
rien n’indiquait qu’un enfant avait vécu dans la
maison quelques heures plus tôt. Pourtant Terry était plus
résolu que jamais à se battre pour obtenir ce qu’il
désirait plus que tout au monde. Puisque Candy avait fui, il la
retrouverait une nouvelle fois et tenterait de la persuader
qu’ils étaient faits l’un pour l’autre. Il ne
lui restait plus qu’à s’envoler à son tour en
direction de Chicago en espérant rattraper la jeune femme avant
qu’elle ne disparaisse.
Il crut un instant que ses oreilles lui jouaient un tour
lorsqu’il entendit résonner un rire d’enfant alors
qu’il décrochait le téléphone pour
réserver son vol. Il sortit sur le patio comme une voix
féminine qu'il aurait reconnue entre mille répondait aux
exclamations enfantines. Deux silhouettes remontaient
l’allée venant du fond du parc et il se dirigea vers elles
sans croire à ce qu’il voyait. Puis la petite fille se mit
à courir vers lui et lui sauta dans les bras.
« Papa ! Je suis si contente que tu sois revenu ! Ce
n’est pas vrai que tu es méchant, je te promets que je ne
le dirais plus !
- Ce n’est pas grave ma chérie, balbutia Terry qui
n’arrivait pas à croire ce qu’il entendait. Je...
Papa n’est pas fâché contre toi.
- Alors je peux t’appeler Papa maintenant ? »
Ces deux syllabes chantaient aux oreilles de Terry sans qu’il
trouve la force de répondre à l’enfant. Il leva un
regard suppliant vers Candy qui arrivait plus posément et qui
approuva d'un hochement de tête.
« Bien sûr, Tessy. Rien ne me ferait plus plaisir répondit Terry d’une voix cassée.
- Tant mieux, parce que je ne voudrais pas d’un autre papa que toi !
- Oh je vous aime tant toutes le deux avoua le jeune homme en attirant Candy contre lui de son bras libre.
- Nous aussi on t’aime, papa. »
CHAPITRE 7
Terry entraîna les deux femmes de sa vie vers la maison. Tess se
précipita à la cuisine pour annoncer la grande nouvelle
à Lupe et José. Le jeune homme se tourna vers Candy mais
elle ne lui laissa pas l’occasion d’exprimer ce qu’il
ressentait.
« Pas maintenant Terry. Tess est trop heureuse. Ne lui
gâchons pas ce moment avec nos problèmes,
d’accord ? »
Terry aurait été bien incapable de trouver le moindre
problème dans sa vie en ce moment. Il avait près de lui
sa fille qui le connaissait enfin et qui ne se lassait pas de
l’appeler Papa à tout bout de champ, et la femme
qu’il aimait. Même si Candy parut distante et
préoccupée toute la soirée, elle était
là et rien d’autre ne comptait.
Il savoura chaque instant de la soirée, du repas qu’ils
prirent en famille jusqu’à la partie de petits chevaux au
cours de laquelle sa fille tricha avec une mauvaise foi exemplaire sous
l’oeil amusé de ses parents. Épuisée, Tess
finit par s’endormir dans les bras de son père pendant
qu’il lui racontait une histoire.
Candy les observait le coeur battant en se laissant bercer par la voix
profonde de Terry. Elle connaissait l’histoire choisie par Tess
pour l’avoir déjà lue des dizaines de fois, mais
les talents d’acteur de Terry lui donnaient une profondeur et une
intensité qu’elle n’avait jamais
soupçonnée. Le père et la fille se ressemblaient
tant que le remord ne la laissait pas en paix. Qui était-elle
pour vouloir les séparer ? Tess était aux anges et
Terry semblait l’homme le plus heureux du monde. Il faisait un
père merveilleux. Si elle n’avait pas pris la fuite il y a
six ans et laissé sa fierté prendre le dessus sur son
coeur, tout aurait pu être différent. Mais elle avait fait
le choix de dissimuler sa grossesse et de ne rien dire à Terry.
Pourrait-il un jour lui pardonner de l’avoir privé de sa
fille pendant tant d’années ?
« La demoiselle a fini par s’endormir, constata
soudain Terry en couvant sa fille d’un regard attendri. Je vais
la monter dans sa chambre. Je n’en ai pas pour
longtemps. »
Candy s’affola. Le moment qu’elle redoutait était
arrivé. Ils ne pourraient éviter d’avoir une
explication tous les deux, et elle n’avait aucune idée de
ce qu’elle pourrait bien lui dire pour se justifier.
Accepterait-il un arrangement amiable pour la garde de Tess ? La
jeune femme en doutait mais elle était prête à se
battre bec et ongles pour ne pas se séparer de sa fille.
Après avoir couché la petite, Terry retrouva Candy dans
sa chambre. Elle fouillait sa valise en maugréant, à la
recherche de quelque chose qu’elle ne trouvait manifestement pas.
Il s’approcha d’elle en hésitant et perçut la
crispation de ses épaules.
« Elle dort comme un ange, dit-il. Merci pour ce cadeau Candy. Merci de lui avoir dit la vérité.
- Je suis désolée, avoua la jeune femme en baissant les
yeux. C’était très égoïste de ma part
de te priver ainsi de ta fille. Pardonne-moi ! Quand je vous ai vu
ensemble ce matin... Tout est devenu tellement évident. Tess a
besoin de son père et... tu es un très bon père,
Terry. Je devais le lui dire, même si maintenant... Mon Dieu,
qu’allons nous faire à présent, je ne sais plus...
- Mais moi je sais, répondit Terry en lui soulevant le menton
pour l’obliger à le regarder. C’est une petite fille
formidable et c’est grâce à toi. Mais tu n’as
plus besoin de tout assumer toute seule Candy. Je suis là
maintenant, nous prendrons soin d’elle ensemble...
- Ce n’est pas si simple, s’exclama Candy en se
détournant pour recommencer à fourrager dans sa valise.
- Bon sang Candy qu’est ce que tu fais ! J’essaye de
te dire que... Qu’est ce que tu cherches nom d’une
pipe !
- Mon pyjama ! J’étais tellement
énervée quand j’ai fait mes bagages que j’ai
oublié d’en prendre un ! »
De grosses larmes se mirent à rouler sur ses joues, comme si
l’oubli de cette pièce de lingerie était la pire
catastrophe qui soit jamais arrivée.
« S’il te plait Terry, hoqueta-t-elle, peux-tu de nouveau me prêter ton... »
Sans un mot, l’acteur ouvrit un tiroir et sortit un de ses T-shirts.
« Tu es ici chez toi, Candy. Tu peux prendre tout ce que tu
veux, et moi en prime ! Répondit-il en
s’avançant vers elle.
- Arrête çà ! Pria la jeune femme qui sentait
son coeur s’accélérer comme il approchait. Je sais
que nous devons parler, mais je suis tellement fatiguée. Je
n’ai pratiquement pas fermé l’oeil depuis trois
jours. J’ai besoin de dormir et... je n’arrive pas à
aligner deux idées cohérentes !
- Dois-je comprendre que c’est moi qui te trouble ? Demanda
Terry en lui tendant le vêtement avec un sourire charmeur.
- Je vais... aller dormir avec Tess, balbutia Candy en serrant le T-shirt sur sa poitrine.
- Çà je ne crois pas ! affirma-t-il en posant les
mains sur sa taille fine pour l’attirer à lui. Je te
promets d’être sage, si c’est ce que tu veux, mais il
est hors de question que je laisse la femme que j’aime dormir
ailleurs que dans mes bras. Reste avec moi, Candy... »
Il plongea son regard dans le sien et la jeune femme se sentit perdre
pied. La proximité de Terry faisait courir son sang plus vite
dans ses veines et sa voix caressante l’emportait loin de toutes
ses bonnes résolutions. Elle était incapable de
détourner les yeux, incapable de lui échapper tandis que
les mots qu’il avait prononcés s’insinuaient avec
lenteur dans son cerveau engourdi.
« Qu’est-ce que tu as dit ? chuchota-t-elle enfin quand le sens de ses paroles atteignit sa conscience.
- Reste avec moi, répéta Terry.
- Non... avant...
- Que je serai sage ?
- Non ! Après çà ! »
Un éclair de compréhension s’alluma soudain dans les yeux de Terry qui resserra son étreinte.
« Que tu es la femme que j’aime ? Pourquoi est-ce que cela t’étonne ?
- Parce que tu dis çà maintenant. C’est une autre
de tes tactiques, n’est-ce pas ? Je sais que tu veux ta
fille. Tu es venu pour la chercher à Chicago... Tu l’a
emmenée ici... C’est pour elle que tu... »
Candy ne put en dire plus parce qu’il lui ferma la bouche
d’un tendre baiser. Trop surprise pour réagir, elle se
laissa envahir par les délicieuses sensations que cela
éveillait en elle.
« Tu as raison, affirma Terry. Tu es tellement fatiguée que tu ne dis que des bêtises. »
Il souriait pourtant et la couvait d’un regard ensorcelant. Elle
aurait préféré qu’il se mette en
colère. Elle savait gérer la colère de Terry, mais
sa tendresse la laissait désemparée. Dans une tentative
inutile pour reprendre le contrôle de la situation, elle protesta
quand il commença a défaire calmement les boutons de son
chemisier.
« Que fais-tu ? Arrête Terry...
- Chut ! Murmura-t-il à son oreille sans cesser de la
déshabiller. Je suis devenu très fort pour apaiser les
petites filles inquiètes. Laisse-moi faire... »
En un tour de main, Candy se retrouva en petite culotte et Terry lui
fit enfiler son immense T-shirt avant de se débarrasser de ses
propres vêtements pour ne conserver que son caleçon. Puis
il l’obligea à s’allonger entre les draps avant de
se glisser à ses côtés.
« Tout ce qu’il te faut, c’est un baiser
affirma-t-il en joignant le geste à la parole, et une
histoire. »
Il l’attira contre lui et la tête de la jeune femme se
nicha tout naturellement au creux de son épaule. Les draps
étaient froids, mais enveloppée par la chaleur de Terry,
Candy ne s’était jamais sentie aussi bien.
« Ecoute-moi bien Candy et essaye de faire rentrer cela dans
ton adorable tête de mule. C’est toi que je suis venu
chercher à Chicago ! Je n’ai jamais cessé de
t’aimer pendant toutes ces années. Dès que ma
rupture avec Susanna a été réglée, je me
suis précipité à Chicago pour te persuader de
revenir avec moi. Je savais que tu n’étais pas
mariée puisque tu portais toujours ton nom de jeune fille, donc
j’espérais que tu éprouvais encore quelque chose
pour moi. Je t’aurais dis ce que je ressentais, mais reconnais
que tu n’étais pas vraiment disposée à
m’écouter ! Découvrir l’existence de
Tess a été le plus grand choc de ma vie. Pourtant tu
refusais de reconnaître que j’étais son
père... Tu refusais de me laisser entrer dans vos vies... Je
t’aime Candy. C’est la seule chose dont je sois sûr
en ce bas monde et je ferai n’importe quoi pour que nous soyons
à nouveau ensemble. Pour que nous formions une
famille. »
Candy aurait voulu rester des heures à écouter
l’homme qu’elle aimait lui avouer son amour. Mais les mots
qu’il prononçait la berçaient et sa main qui lui
caressait les cheveux la plongeait dans une douce torpeur. Ses
paupières s’alourdissaient malgré elle. Il fallait
qu’elle lui réponde, pourtant la force lui manquait.
« Je sais que demain matin tu auras retrouvé toute ta
combativité, reprit Terry, et que tu essaieras encore de me
chasser. Je saurai bien un jour te faire dire pourquoi tu m'en veux
autant. Mais je ne renoncerai jamais Candy. Alors, que penses-tu de mon
histoire ?
- C’est un conte de fées, réussit-elle à répondre, presque endormie.
- Pas tout à fait, mon amour... pas encore. Les contes de
fées finissent par « ils furent heureux et eurent
beaucoup d’enfants ».
- J’adore les contes de fées, marmonna Candy avant de sombrer dans le sommeil.
- Moi c'est toi que j'adore, ma princesse, chuchota Terry dans ses
cheveux. Tu es la seule dont j'ai besoin pour être heureux. Je
réussirai bien à t'en persuader. »
Candy sortit du sommeil, certaine d'avoir entendu Tess l'appeler. Terry
dormait près d'elle, un bras en travers de sa taille. Elle se
dégagea avec précautions et se dirigea à pas
prudents vers la chambre de sa fille.
L'enfant s'agitait dans son sommeil et marmonnait des mots sans suite.
Sa mère posa une main apaisante sur son front et lui caressa les
cheveux.
« Tout va bien, ma chérie, chuchota-t-elle. Tu as ton papa et ta maman avec toi maintenant... »
La petite fille se calma bien vite et repartit dans ses rêves
d’enfant. Quand elle fut certaine que Tess dormait paisiblement,
Candy regagna la chambre de Terry.
Le jeune homme n’avait pas bougé depuis qu’elle
s’était levée. Adossée à la porte,
elle resta à le contempler. Il était si beau, si fort et
elle l’aimait tant... Si seulement elle n’avait pas
été aussi stupide six ans auparavant ! Les mots
d’amour qu’il avait prononcé chantaient encore
à ses oreilles. Il l’aimait toujours ! Elle voulait
tant y croire...
Pas pour légitimer sa fille ou pour lui faire plaisir. Pour la
première fois depuis qu’elle était mère,
elle voulait penser à elle avant de penser à son enfant.
Elle voulait être heureuse, et le seul homme capable de cela se
trouvait à quelques mètres d’elle, endormi,
disponible, amoureux...? Sans plus hésiter elle se glissa entre
les draps. Terry se réveillerait-il si elle se rapprochait de sa
chaleur qui lui avait tant manqué ? Elle n’eut pas le
temps de tenter l’expérience qu’il l’entourait
de ses bras et enfouissait la tête dans son cou avec un soupir.
« Tu ne dormais pas ! Reprocha-t-elle gentiment. »
Le jeune acteur ne jugea pas utile de répondre.
« Comment va Tess ? Demanda-t-il.
- Elle ne s’était même pas réveillée.
C’était juste un mauvais rêve. Elle dort comme un
ange.
- Et comment vas-tu, toi ? »
Candy caressa doucement les épaules de son homme en souriant.
« Je vais bien, répondit-elle en déposant un baiser sur son front. Maintenant je vais bien...
- J’ai vécu l’enfer en t’attendant. Tu es
restée si longtemps immobile... Je mourais d'envie de
t’attirer dans ce lit, mais... Je ne voulais pas te forcer...
Mais puisque tu es là, c’est que tu me fais à
nouveau confiance, sinon tu serais restée dormir avec notre
fille. Dis-moi que je ne me trompe pas...
- Je suis la personne la plus mal placée pour accorder sa
confiance, avoua Candy émue. Si je t’avais fait confiance
il y a six ans, nous n’en serions pas là. Mais au lieu de
te parler, j’ai cru ce que Karen et Susanna m’ont
raconté, que tu couchais avec elles... Que tu ne voulais plus de
moi... C’est à moi de te demander pardon, Terry.
J’ai été tellement idiote... »
Le jeune acteur se détacha d’elle et roula sur le dos. Il
restait silencieux et Candy se maudit d’avoir
révélé ce secret qui la brûlait comme un fer
rouge. Elle savait qu’il était blessé en
découvrant le peu de foi qu’elle avait accordé
à leur amour. Elle ne pouvait lui en vouloir mais son coeur lui
faisait mal à en mourir. Elle ne voulait pas le perdre une
nouvelle fois. Elle se tourna sur le côté pour le regarder.
« Je suis désolée de t’avoir
blessé. Je t’aimais tant que je n’ai pensé
qu’à cacher ma douleur derrière ma fierté.
Plus jamais je ne serai aussi stupide ! Enfin... Si tu acceptes
de... Si tu penses que tu arriveras à me pardonner... Ce que
j’éprouve pour toi est tellement fort ! Reconnut-elle
en posant une main timide sur le torse de Terry. »
Le jeune homme s’en empara et la porta à ses lèvres
le coeur battant. Il se redressa sur un coude et approcha lentement son
visage de celui de Candy.
« Dis-le moi, mon amour... Chuchota-t-il contre sa bouche.
- Je t’aime, Terry ! Je t’ai toujours aimé...
- Enfin ! S’exclama l’acteur en la couvrant de son
grand corps. Moi aussi je t’aime, Candy. Pourquoi faut-il
toujours que nous nous déchirions alors que la seule chose qui
compte c’est cet amour qui nous unit ? Ne pensons plus
à nos erreurs passées, évitons juste d’en
commettre de nouvelles !
- Crois-tu que nous en serons capables ?
- Bien sûr ! Pour commencer je vais faire ce que
j’aurais dû faire il y a six ans ! Te demander de
m’épouser ! »
Il sourit quand Candy noua les bras autour de son cou pour le
rapprocher d’elle et déposer un doux baiser sur ses
lèvres.
« Oui ! Rien ne me rendrait plus heureuse que de devenir ta femme !
- Oui ? Demanda Terry en fronçant les sourcils. Simplement oui ?
- Espérais-tu que je refuse ?
- Bien sûr que non ! Grommela le jeune homme en lui rendant
son baiser. J’avais pensé que tu serais plus difficile
à convaincre, et j’envisageais de te faire l’amour
jusqu’à ce que tu capitules !
-Le programme est intéressant, reconnut Candy en riant. Mais je
croyais que tu avais promis d’être sage... »
Déjà ses mains fines qui effleuraient les flancs de son
compagnon et sa voix altérée exprimaient son consentement.
Terry ne s’offusqua pas de l’entendre rire à ses
dépens et roula avec elle sur le grand lit pour l’amener
au dessus de lui. Une lueur malicieuse brillait dans son regard quand
il lui montra l’heure affichée par le réveil
digital : 2h15.
« Cà, c’était hier, ma princesse.
Aujourd’hui est le premier jour de notre nouvelle vie. Celle
où ton adorable sourire éclairera chaque heure de ma
vie... Je ne veux plus jamais te voir pleurer, Candy... Je vais faire
de toi la femme la plus heureuse de la terre.
- Et nous aurons beaucoup d’enfants ?
- Autant que tu en voudras ! » Affirma Terry
déjà occupé à soulever le bas du T-shirt
pour caresser avec douceur les fesses rondes et tendres de Candy.
Il se souvenait parfaitement de ce qu’elle aimait et il prit son
temps pour le lui prouver. Il n’était plus pressé.
Il savait désormais que de nombreuses autres nuits les
attendaient et il était bien décidé à
goûter pleinement chacune d’entre elles.
Pour la première fois de sa vie, Terry eut envie de croire
à ce vieux bonhomme qu’on appelle le Père
Noël. Il avait reçu cette année les deux plus beaux
cadeaux qu’il ait jamais eus : Une fille avec un jour
d’avance, et la femme qu’il aimait avec quelques jours de
retard. Si la chance continuait à lui sourire, peut-être
le prochain Noël lui apporterait-il un autre enfant ? Mais il
savait déjà qu’avec Candy près de lui,
chaque jour serait un cadeau.
FIN
Dinosaura, 02 septembre 2009
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