Candy, la suite

par Edith

Chapitre 8

Le choix de Terry

 

Petit matin. Dans son lit, Suzanne dort d’un sommeil agité.

Suzanne est sous l’arbre dans le parc. Le petit Eddy est en bas, dans les bras de sa mère. Suzanne lève la tête et voit Terry tout en haut. Elle voit son pied descendre vers la branche inférieure et la toucher. Elle regarde son visage. Il sourit et ferme les yeux. Son corps tombe dans le vide.

Il fait jour. Suzanne se réveille dans un cri.

Suzanne (s’asseyant sur son lit et pleurant) : Il l’a fait exprès … Il l’a fait exprès …

Mme Marlow entre précipitamment dans la chambre.

Mme Marlow : Ma chérie, qu’est-ce que tu as ?

Suzanne : Appelle-moi un fiacre, maman. Je vais m’habiller et aller tout de suite à l’hôpital.

Dans sa chambre d’hôpital, Terry se réveille avec le sourire.

On frappe à la porte.

Terry : Entrez.

Une infirmière entre.

Terry (avec le sourire) : Bonjour.

L’infirmière (surprise) : Bonjour. Vous avez l’air bien ce matin.

Terry : Beaucoup mieux. Tellement mieux que je voudrais sortir.

L’infirmière : Pour ça, il faut voir le Dr Keller. Je crois qu’il avait prévu quelques jours de plus.

Terry : Vous croyez que je pourrai le voir ce matin ?

L’infirmière : Eh bien … Je vais faire le nécessaire.

Terry (se levant et allant vers le placard) : Merci.

Dans sa chambre, Candy est en tenue de ville et boucle sa valise. Elle fait une dernière fois le tour de la pièce, ramasse ses affaires et sort.

Candy sort de l’hôpital Jacob avec ses bagages. Albert, Archibald et Annie l’attendent dans une voiture. Annie et Candy se font des signes. Candy va vers eux.

Candy (donnant sa valise à Archibald) : Je suis bien contente que vous m’emmeniez.

Candy s’installe à l’avant à côté d’Albert. Il démarre. A l’arrière, Annie serre une des mains d’Archibald. Ils sont tous silencieux.

Dans sa chambre d’hôpital, Terry, habillé, range ses affaires d’une seule main.

Bruit de disputes dans le couloir.

Voix de Suzanne : Laissez-moi passer.

Autre voix de femme : Mademoiselle, ça n’est pas l’heure des visites.

Voix de Suzanne : Je dois le voir maintenant.

Terry ouvre sa porte et tombe sur Suzanne aux prises avec une infirmière. Les deux femmes s’arrêtent et le regardent.

Suzanne (surprise par l’apparence du jeune homme) : Je voudrais te parler.

L’infirmière : Je suis désolée, ça n’est pas l’heure des visites.

Terry : Eh bien … Nous allons descendre dans le parc.

L’infirmière : Si vous voulez.

Terry et Suzanne marchent silencieusement. Suzanne surveille Terry du coin de l’œil « il a l’air beaucoup mieux. Après tout, ça n’était qu’un rêve.».

Lorsqu’ils sont un peu à l’écart, Terry s’arrête et fait face à Suzanne.

Terry : Suzanne, je vais te faire de la peine …Je ne vais pas t’épouser.

Elle le regarde comme si elle n’avait pas compris.

Terry : J’aime Candy et je ne peux pas vivre sans elle.

Suzanne : Ah, c’est ça. Depuis que tu l’as revu …

Terry : Suzanne ! Je n’ai jamais cessé de penser à elle. Pendant deux ans, j’ai étouffé mes sentiments mais finalement, ce sont eux qui ont failli m’étouffer.

Suzanne : …(brusquement horrifiée) Alors j’avais raison ! Ce rêve, c’était la réalité.

Terry : De quoi parles-tu ? Quel rêve ?

Elle ne répond pas.

Terry : Je te dois la vie. Jamais je ne pourrais …

Suzanne (se reprenant) : Tu ne me dois rien. Je te l’ai dit il y a deux ans ici même. C’était un accident et tu n’y es pour rien. Tu es libre. (très vite) De toute façon, je ne crois pas que nous aurions été heureux ensemble. C’est ce que je venais te dire ce matin. J’ai décidé d’épouser le docteur Keller.

Terry (ahuri) : Je ne comprends pas … Le Dr Keller …

Suzanne : Tu as quelque chose contre le Dr Keller ?

Terry : Non, bien sûr que non. Mais, est-ce que tu as des sentiments …

Suzanne : Terry, je crois qu’on s’est tout dit. Je suis fatiguée, je vais rentrée chez moi.

Terry : Je vais te raccompagner …

Suzanne : Il n’en est pas question.

Elle tourne les talons et part dans l’allée en direction de la sortie. Les larmes coulent sur ses joues.

Terry, tendu, la regarde partir. Elle est presque aux grilles lorsqu’il voit le Dr Keller se précipiter vers elle. Le médecin la prend par le bras et ils sortent dans la rue ensemble.

Terry se décide alors à rentrer dans l’hôpital.

Candy et ses amis arrivent sur le port. Albert gare la voiture. Ils descendent. Archibald porte la valise de Candy.

Albert (montrant un bateau à une centaine de mètres devant lequel une foule est attroupée) : C’est celui-là.

Ils marchent vers le bateau. Annie a les larmes aux yeux.

Candy : Arrêtez de faire ces têtes ou j’y vais toute seule ! On dirait que vous m’avez déjà enterrée. Je ne vais pas me battre, je n’ai pas du tout l’intention de mourir là-bas, moi.

Albert : Pardon Candy. Mais on ne peut pas nier que cette séparation nous est très pénible.

Candy : Vous allez tous me manquer aussi mais j’espère bien que cette guerre ne durera pas trop longtemps. En tout cas, c’est ce que nous promettent tous ces messieurs en uniforme !

Archibald : Regardez ! Ils commencent l’embarquement.

Hôpital Jacob. Dans le couloir, avant de rentrer dans sa chambre, Terry croise Dora qui pousse le chariot des médicaments.

Terry : Je vous demande pardon, mademoiselle.

Dora (arrêtant le chariot) : Oui.

Terry : Est-ce que vous connaissez Candy André ?

Dora : Candy ? Oui, on est venu ensemble de Chicago. C’est même moi qui lui ai annoncé votre accident. Je ne savais pas qu’elle vous connaissait. La pauvre a eu un gros choc. Alors je l’ai conduite au bloc où vous étiez. C’est comme ça qu’elle s’est retrouvée à panser vos blessures.

Terry : C’est Candy qui a pansé mes blessures …

Dora : Vous ne le saviez pas ?

Terry : Non … Où est-ce que je peux la trouver ?

Dora (le regardant, incrédule) : Mais …Candy n’est plus ici. Elle est partie ce matin prendre le bateau pour la France.

Terry : Mais non, vous devez vous tromper … Ca n’est pas possible.

Dora : Décidément, je n’annonce que des mauvaises nouvelles … Elle devait être au port à 11h et (regardant sa montre) il est 11h. Mais je crois que le bateau part à midi …

Elle a à peine fini sa phrase que Terry est rentré dans la chambre. Il ressort avec son sac.

Terry (partant, à Dora) : Merci.

Dora (le regardant s’éloigner) : Monsieur Grandchester … (pour elle-même) Je ne crois pas que le Dr Keller ait signé votre sortie …

Terry sort de l’hôpital Jacob et hèle un fiacre. Un cocher s’arrête.

Terry (montant) : Au port. Aussi vite que vous pouvez.

Le fiacre démarre à vive allure.

Dans le fiacre, Terry regarde les rues défiler avec anxiété : « Candy … Tu partais vraiment aujourd’hui … mais pas pour Chicago. C’est pour ça que tu t’es autorisée à venir me voir hier soir … Pourquoi ai-je voulu parler à Suzanne d’abord ? Je voulais être libre, libre de te dire … Pourvu que je n’arrive pas trop tard ».

Terry arrive enfin au port. Il est midi moins vingt. Le quai est noir de monde. Il avance de bateau en bateau, cherchant celui dans lequel part Candy.

Terry ( à un passant) : Vous savez où est le bateau pour la France ?

Le passant (lui indiquant le bateau suivant sur le quai) : Juste là …(Terry poursuit rapidement sa route) He, dites pas merci.

Terry arrive devant le bateau. Il se retrouve dans la foule des gens qui embarquent. Il regarde partout et ne voit rien. Il s’éloigne un peu pour prendre du recul et regarder le pont du bateau.

Annie l’aperçoit.

Annie (à Archibald et Albert, montrant Terry) : regardez, c’est Terry.

Ils se précipitent vers le jeune homme.

Albert : Terry, qu’est-ce que vous faites là ?

Terry : Où est Candy ? Elle n’est pas avec vous ?

Archibald : Où veux-tu qu’elle soit ? Sur le bateau. Elle a embarqué dans les premiers.

Terry a l’air désespéré.

Annie (montrant une silhouette à l’extrémité du pont) : Tu vois, c’est elle là-bas.

Terry regarde la silhouette menue. C’est bien sa chevelure. Annie fait des grands signes. Candy lui répond.

Terry (pour lui-même) : Ca n’est pas possible … Ca ne peut pas arriver.

Soudain, il se redresse et regarde les autres presque en souriant.

Terry : Je vous dis au revoir. J’espère qu’on se reverra bientôt.

Archibald : Qu’est-ce qui lui prend ?

Ils voient Terry s’élancer vers le bateau. Il semble avoir complètement oublié ses blessures et son bras toujours en écharpe.

Sur le pont du bateau, Candy est collée contre le bastingage.

Candy (regardant ses amis) : On dirait … Terry …Il s’avance … Mon dieu, c’est lui.

Candy s’éloigne du bastingage pour ne plus être vue.

Elle reste quelques minutes en arrière puis n’y tenant plus, elle s’approche à nouveau du bastingage. Terry n’est plus là. Elle se penche au maximum. Mais rien …

Un militaire (autoritaire, la ramenant en arrière en tirant sur son épaule) : Mademoiselle, reculez !

Candy : Pardon.

Elle recule un peu puis regarde à nouveau. Annie lui fait des signes. Elle répond. Aucune trace de Terry.

La bateau se met à vibrer.

Candy (pour elle-même, regardant toujours le quai) : C’est mieux comme ça …

Le bateau démarre et elle voit le quai s’éloigner. Les silhouettes d’Annie, Archibald et Albert disparaissent petit à petit.

Elle se détourne pour regarder vers l’intérieur du bateau.

Terry est devant elle. Il est en uniforme. Le bandage de son bras a disparu.

Candy ferme les yeux puis les rouvre. Il est toujours là. Il s’approche.

Ils tombent dans les bras l’un de l’autre.

Le bateau s’éloigne, leurs silhouettes enlacées deviennent de plus en plus petites.

© Edith 2006